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ÉGLISE, architecture

La rénovation carolingienne

La volonté qu'avait Grégoire le Grand d'une remise en ordre de l'Église devait trouver un prolongement inattendu avec l'ascension des Pippinides, et bientôt leur prise de pouvoir. L'alliance avec Rome d'une famille dont l'ambition était d'affirmer la réalité d'un royaume jusqu'alors fragile, allait aboutir à assurer l'avenir de la papauté et à donner aux monarques le moyen d'intervenir dans le domaine de la foi. Ils affirmèrent qu'il était de leur devoir, comme autrefois Josias, d'intervenir dans la vie de l'Église. Les conquêtes territoriales – la dilatatio imperii – prirent une allure de croisade, destinée à amener les peuples païens à la vérité du Christ. Les souverains convoquèrent les conciles, réformèrent le clergé – séculier, régulier –, et imposèrent le rite romain contre les traditions religieuses locales. Les évêques furent confinés dans un rôle sacerdotal, le clergé qui en formait l'entourage dans un rôle spirituel. Cette réorganisation eut des conséquences à long terme, dont l'importance a récemment été mise en lumière, dans l'aménagement des cathédrales d'abord, dans leur parti pris architectural ensuite, mais également dans l'évolution des villes. Ceux qui prirent bientôt le nom de chanoines se trouvèrent réunis dans un monastère urbain, situé à proximité de la cathédrale, pour mener une vie communautaire. La réforme correspondante, confiée par Pépin le Bref à l'évêque de Metz Chrodegang, fut étendue par Charlemagne à l'ensemble de l'empire. Elle imposa une nouvelle partition de la cathédrale, pour réserver aux clercs réguliers l'espace d'un chœur. La réforme séculière, confiée par Louis le Pieux à Benoît d'Aniane, eut un rôle non moins déterminant sur le long terme, par la mise au net d'un plan idéal de monastère élaboré à la suite du concile d'Inden, en 816. Concentrés dans un espace réduit, les différents bâtiments étaient organisés suivant un schéma organique, autour de l'église abbatiale. Le plan, connu par l'exemplaire conservé à l'abbaye de Saint-Gall, a servi de référence aux moines cisterciens au xiie siècle, puis mauristes au xviie siècle.

Premier Saint-Pierre de Rome - crédits : Encyclopædia Universalis France

Premier Saint-Pierre de Rome

L'adoption de la liturgie romaine devait avoir également des conséquences architecturales à court et à long terme. Les traditions constantiniennes avaient été précieusement maintenues à Rome, elles le furent également par la nouvelle monarchie, avant d'être étendues à l'ensemble du monde carolingien, avec la prise en compte des changements apportés par Grégoire le Grand. À cet égard, l'abbatiale de Saint-Denis, reconstruite sous Pépin le Bref par Fulrad, apparaît comme un manifeste éloquent. L'architecte a adopté le parti basilical du ive siècle en plan comme en élévation, et a ménagé sous le sanctuaire surélevé une confession autour de la tombe du martyr, inspirée de celle de Saint-Pierre de Rome. Le parti de la « confession à la romaine » allait être repris dans nombre de constructions renouvelées ou neuves. Dans les cathédrales, comme celle de Cologne, où elle fut ajoutée à l'ouest, en l'honneur du prince des apôtres. Dans les abbatiales, comme celle de Fulda, toujours à l'ouest, en l'honneur de saint Boniface. Cette adjonction occidentale – les églises romaines du ive siècle sont occidentées – devait créer un édifice de culte bipolaire, dont les masses extérieures occidentales et orientales s'équilibrent. Il s'agissait alors de la plus importante modification apportée au parti basilical conçu par les architectes du ive siècle. À cet égard, le plan et l'élévation imposés par Charlemagne à Eudes pour sa chapelle palatine d'Aix apparaît, comme à Saint-Denis,[...]

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Pour citer cet article

Alain ERLANDE-BRANDENBURG. ÉGLISE, architecture [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Premier Saint-Pierre de Rome - crédits : Encyclopædia Universalis France

Premier Saint-Pierre de Rome

Cathédrale de Cologne - crédits : Encyclopædia Universalis France

Cathédrale de Cologne

Autres références

  • ABADIE PAUL (1812-1884)

    • Écrit par Claude LAROCHE
    • 977 mots

    Paul Abadie est né à Paris le 9 novembre 1812. Il est le fils d'un architecte néo-classique homonyme (1783-1868) qui fut architecte du département de la Charente : on lui doit notamment le palais de justice d'Angoulême (env. 1825-1828). Abadie entre à Paris dans l'atelier d'Achille Leclère...

  • ABBATIALE DE CLUNY III

    • Écrit par Christophe MOREAU
    • 223 mots

    La légende veut que ce soit saint Pierre, apparaissant au moine Gunzo, qui ait jeté les plans de la troisième église abbatiale de Cluny, la plus grande de tout l'Occident médiéval. Cette transformation débuta en 1088, sous l'abbatiat d'Hugues de Semur (1049-1109), afin de répondre aux besoins...

  • ALBERTI LEON BATTISTA (1404-1472)

    • Écrit par Frédérique LEMERLE
    • 3 110 mots
    • 8 médias
    ...édifices sont cependant très importants pour l'histoire de l'architecture, car ils posent, d'entrée de jeu, les deux problèmes cruciaux de l'architecture religieuse de la Renaissance : celui du plan (centré ou longitudinal) et celui de l'adaptation des formules antiques aux façades des églises modernes....
  • AMBON

    • Écrit par Maryse BIDEAULT
    • 194 mots

    Nom donné, dans l'art paléochrétien, à la chaire du haut de laquelle sont lus les textes sacrés ou prononcés les sermons. De formes diverses, l'ambon peut être isolé dans la nef principale de l'édifice ou bien faire partie d'un chancel situé devant l'abside ; dans ce...

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