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ÉGLISE, architecture

La révolution des ordres mendiants

Cathédrale de Cologne - crédits : Encyclopædia Universalis France

Cathédrale de Cologne

L'insatisfaction des fidèles demeurait, de ne pas trouver un écho suffisant à leur foi. Ainsi s'explique le succès foudroyant des ordres mendiants : Carmes, Dominicains, Franciscains. À la différence des Bénédictins, ils s'installèrent à proximité immédiate des villes ou à l'intérieur de leurs enceintes, dans les quartiers les moins favorisés. Tournés uniquement vers les fidèles, ils trouvèrent auprès d'eux un accueil si favorable que nombre de villes européennes comportèrent bientôt un couvent de chacun de ces ordres. Les Dominicains développèrent leurs connaissances et s'introduisirent dans nombre d'universités. Une concurrence s'établit alors avec le clergé séculier, mal préparé à la demande des laïcs. Les conflits devinrent permanents, arbitrés généralement par le pape, en faveur des ordres mendiants. Le concile de Latran IV (1215) fut convoqué pour trouver une réponse à des difficultés d'ordre matériel, mais également spirituel. Il devait marquer une nouvelle étape de la réforme grégorienne. Une fois encore se trouvait réaffirmé le rôle prééminent de l'évêque dans son diocèse, et par voie de conséquence, celui de la cathédrale. Celle-ci s'ouvre plus encore aux fidèles, qui gagnent jusqu'aux piles orientales de la croisée du transept. Quant au clergé, il va s'établir au-delà, suivant un schéma qui se prolongera au moins jusqu'au concile de Trente (1545-1563) : le chœur des chanoines, avec l'évêque, est installé à proximité de l'autel majeur, dans une association étroite qui aboutit à la construction d'une architecture dans l'architecture. L'espace ainsi défini est clos à l'ouest par un jubé, autour du sanctuaire par des murs latéraux. Dans certains cas, cet aménagement se réalisa sans difficulté, mais en de nombreuses occasions il fallut reconstruire le chevet pour lui donner les dimensions indispensables à cette nouvelle fonction, tout en conservant la nef (ainsi à Laon, au Mans, en Normandie ou dans le Midi). Dans les constructions neuves du début du xiiie siècle, le programme fut enrichi dès le départ en ce sens (ainsi à Amiens, Beauvais ou Cologne). En Espagne, le schéma adopté différait, les fidèles ayant accès au transept alors que le chœur des chanoines, fermé, était disposé dans les travées les plus orientales de la nef.

Cette exaltation de la partie orientale de la cathédrale allait avoir une incidence sur son traitement extérieur. Jusqu'au début du xiiie siècle, il demeurait attaché à l'horizontalisme roman de superposition des masses. L'adjonction d'arcs, qu'ils soient boutants ou qu'ils servent à évacuer les eaux de pluie du grand comble, donnait à l'édifice une dynamique verticale qui s'imposa bientôt à l'ensemble. Ce mouvement s'achevait sur une flèche disposée à la croisée du transept – Notre-Dame de Paris fut ainsi modifiée dans les années 1220-1230. Quant aux programmes nouveaux, ils intégrèrent dès l'origine cette transformation, dont le mouvement se répercutait sur la ville même (ainsi à Amiens, Beauvais, Cologne ou Reims).

Le succès des ordres mendiants devait en même temps assurer celui du parti architectural qu'ils avaient choisi. Ils renoncèrent au plan basilical à trois vaisseaux pour une nef unique, qui offrait de multiples avantages : d'abord un espace mieux adapté à la prédication, ensuite une diversité de traitements et, par voie de conséquence, de lumières, enfin un coût de construction relativement réduit. Charpenté ou couvert de voûtes d'ogives, ce vaisseau fut scandé par des supports centraux qui ne mettaient pas en cause la perception unique de l'espace (Jacobins de Toulouse). Ce parti pris d'une seule nef fut adopté pour ces mêmes raisons dans les églises paroissiales à Carcassonne[...]

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Pour citer cet article

Alain ERLANDE-BRANDENBURG. ÉGLISE, architecture [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Premier Saint-Pierre de Rome - crédits : Encyclopædia Universalis France

Premier Saint-Pierre de Rome

Cathédrale de Cologne - crédits : Encyclopædia Universalis France

Cathédrale de Cologne

Autres références

  • ABADIE PAUL (1812-1884)

    • Écrit par Claude LAROCHE
    • 977 mots

    Paul Abadie est né à Paris le 9 novembre 1812. Il est le fils d'un architecte néo-classique homonyme (1783-1868) qui fut architecte du département de la Charente : on lui doit notamment le palais de justice d'Angoulême (env. 1825-1828). Abadie entre à Paris dans l'atelier d'Achille Leclère...

  • ABBATIALE DE CLUNY III

    • Écrit par Christophe MOREAU
    • 223 mots

    La légende veut que ce soit saint Pierre, apparaissant au moine Gunzo, qui ait jeté les plans de la troisième église abbatiale de Cluny, la plus grande de tout l'Occident médiéval. Cette transformation débuta en 1088, sous l'abbatiat d'Hugues de Semur (1049-1109), afin de répondre aux besoins...

  • ALBERTI LEON BATTISTA (1404-1472)

    • Écrit par Frédérique LEMERLE
    • 3 110 mots
    • 8 médias
    ...édifices sont cependant très importants pour l'histoire de l'architecture, car ils posent, d'entrée de jeu, les deux problèmes cruciaux de l'architecture religieuse de la Renaissance : celui du plan (centré ou longitudinal) et celui de l'adaptation des formules antiques aux façades des églises modernes....
  • AMBON

    • Écrit par Maryse BIDEAULT
    • 194 mots

    Nom donné, dans l'art paléochrétien, à la chaire du haut de laquelle sont lus les textes sacrés ou prononcés les sermons. De formes diverses, l'ambon peut être isolé dans la nef principale de l'édifice ou bien faire partie d'un chancel situé devant l'abside ; dans ce...

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