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GROUPES (mathématiques) Groupes classiques et géométrie

Jusque vers 1800, la géométrie dite « élémentaire » est restée à peu de chose près ce qu'elle était dans l'Antiquité, tant dans sa substance que dans ses méthodes (l'invention de la « géométrie analytique » ayant à peu près exclusivement servi à prolonger le champ d'action de la géométrie classique dans les directions de la géométrie algébrique et de la géométrie différentielle). Mais, même dans les exposés d'Euclide et de ses continuateurs, bien que l'intérêt se concentre sur les propriétés des figures « classiques » (triangle, rectangle, parallélogramme, cercle, coniques, etc.), les isométries ( transformations de l'espace ou du plan conservant les distances) jouent un rôle essentiel, non toujours explicité ; le fait qu'elles forment un groupe était implicitement utilisé bien avant que la notion abstraite de groupe ne se fût dégagée. À partir de 1800 environ, avec le développement de la géométrie projective, on commence à distinguer, parmi les notions géométriques invariantes par isométrie, celles qui sont de nature « descriptive » de celles que l'on qualifie de « métriques », les premières restant invariantes par des transformations plus générales, à savoir celles qui transforment linéairement les coordonnées cartésiennes ; par exemple, dans le plan, au point (x, y) correspond le point (x′, y′) tel que :

C'est ainsi que, par une telle transformation, une médiane d'un triangle se transforme en une médiane du triangle image : la notion de médiane est « descriptive » ; au contraire, une hauteur d'un triangle n'a pas cette propriété : la notion de hauteur est « métrique ». Avec Félix Klein et son «   programme d'Erlangen » (1872), cette distinction s'est précisée, et le concept même de « géométrie » a reçu une définition générale, englobant la géométrie classique (dite aussi « euclidienne »), la géométrie projective, la géométrie conforme, les géométries « non euclidiennes », etc. : une géométrie est l'étude des notions et des propriétés qui restent invariantes par un groupe donné de transformations. De ce fait, la « géométrie », après Klein, est devenue essentiellement l'étude de ces groupes, les propriétés des « figures » classiques passant au second plan ; plus généralement, dans toutes les parties des mathématiques où intervient un espace homogène G/H (ou, ce qui revient au même, un espace dans lequel un groupe G opère transitivement), un principe fécond est d'en ramener l'étude à celle du groupe G lui-même.

Les groupes envisagés par Klein et certaines de leurs généralisations sont connus sous le nom de « groupes classiques » ; en tant que groupes de Lie, ils correspondent aux algèbres de Lie simples « classiques » (cf. groupes [mathématiques] – Groupes de Lie) et, de ce fait, la théorie des représentations linéaires (de dimension finie) et des invariants de ces groupes peut être regardée comme entièrement connue (ibid.) ; ce qui, en un certain sens, permet de considérer les « géométries » correspondantes comme essentiellement achevées et ne présentant plus aucun problème digne de recherches mathématiques sérieuses.

Nous allons parler d'abord en détail des deux groupes les plus liés à la géométrie classique, le groupe linéaire général et le groupe orthogonal ; mais nous nous placerons d'emblée dans la géométrie à n dimensions (n arbitraire ≥ 2). Nous supposons connus du lecteur les notions et résultats fondamentaux de l'algèbre linéaire et multilinéaire, exprimés dans le langage géométrique des espaces vectoriels ou projectifs (cf. algèbre linéaire) ; il pourra voir combien l'algèbre linéaire facilite, dans ces groupes, la solution de problèmes qui présentent de grandes difficultés[...]

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Pour citer cet article

Jean DIEUDONNÉ. GROUPES (mathématiques) - Groupes classiques et géométrie [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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Autres références

  • ALGÈBRE

    • Écrit par Jean-Luc VERLEY
    • 7 143 mots
    La structure de groupe est une des structures algébriques les plus simples et, sans conteste, la plus importante des mathématiques modernes. Son universalité ne s'arrête pas là : le psychologue Piaget a mis en évidence le rôle essentiel joué par cette notion dans les mécanismes mêmes de la pensée, et...
  • ALGÉBRIQUES STRUCTURES

    • Écrit par Jean-Marie PRUVOST-BEAURAIN
    • 29 463 mots
    Un groupe peut être défini indifféremment comme un monoïde (E, l) tel que tout élément de E soit symétrisable, ou comme un magma associatif unifère (E, l) tel que tout élément de E soit symétrisable, ou comme un groupoïde ayant un et un seul élément neutre. Tout semi-groupe fini est un groupe....
  • BOREL ARMAND (1923-2003)

    • Écrit par Pierre CARTIER
    • 795 mots

    En 1992, le mathématicien Armand Borel a reçu le prix international Balzan « pour ses contributions fondamentales à la théorie des groupes de Lie, des groupes algébriques et des groupes arithmétiques, et pour son action inlassable en faveur de la recherche mathématique et de la propagation...

  • BURNSIDE WILLIAM SNOW (1852-1927)

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 394 mots

    Mathématicien britannique, spécialiste de la théorie des groupes. Né le 2 juillet 1852 à Londres (Grande-Bretagne) d'un père écossais, William Snow Burnside fait ses études supérieures au Pembroke College de l'université de Cambridge, dont il est diplômé en 1875 et où il effectue ses recherches...

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