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ANALYSE MATHÉMATIQUE

Groupes de Lie et espaces fibrés

Vers le milieu du xixe siècle, à côté des groupes de permutations d'ensembles finis, introduits au début du siècle par Cauchy et Galois, on est peu à peu amené, dans des problèmes de géométrie, ou en vue d'intégration d'équations différentielles ou aux dérivées partielles, à considérer des groupes dont les éléments sont des transformations d'un espace Rn ou d'une portion de cet espace, la loi du groupe étant (comme pour les permutations) la composition des transformations ; en général, ces groupes sont formés d'une infinité de transformations, dépendant de paramètres qui varient « continûment ». Par exemple, les homothéties :

de l'espace Rn, de rapport t ≠ 0, forment un groupe dépendant du seul « paramètre » t. Les transformations orthogonales de R3, c'est-à-dire les transformations linéaires conservant la distance euclidienne forment un groupe de transformations :
où la matrice :
doit vérifier la relation tU(U = I (matrice unité) ; ces relations entraînent que U dépend de trois paramètres.

D'une façon générale, les transformations d'un groupe seront de forme St : x f (x, t), où x varie dans une variété différentielle M, le « paramètre » t dans une variété différentielle G et f est une application différentiable de M × G dans M (dans le premier exemple précédent, G est l'ouvert R − {0} complémentaire de 0 ; dans le second, G est la sous-variété de R9 formée des matrices orthogonales).

Puisque les transformations St doivent former un groupe, on doit avoir StSt = St, où t″ = g (t, t′), g étant donc une application différentiable de G × G dans G, qui définit sur G une loi de groupe. Une variété G munie d'une loi de groupe différentiable est appelée groupe de Lie réel (on peut définir de même des groupes de Liecomplexes en partant de variétés analytiques complexes). La découverte fondamentale de Lie dans la théorie de ces groupes est que leur structure « infinitésimale » les détermine dans une très large mesure. De façon plus précise, en prenant sur G des coordonnées locales au voisinage de l'élément neutre, le « paramètre » t correspond à un système de r nombres (tk), et g (t, t′) est un système de r fonctions de 2r variables gk (t1, ..., tr, t1, ..., tr) ; la connaissance des dérivées des gk au point correspondant à l'élément neutre (on peut supposer que c'est le point de coordonnées locales (0, ..., 0)) jusqu'au second ordre détermine complètement leurs développements de Taylor (et, en fait, par un choix convenable des coordonnées locales, on peut même faire en sorte que ces développements soient convergents au voisinage de l'origine). De plus, ces valeurs des dérivées d'ordre ≤ 2 ne sont pas arbitraires, et lorsqu'on écrit les conditions qu'elles doivent vérifier, on obtient une structure purement algébrique appelée algèbre de Lie, dont l'étude équivaut donc à l'étude locale des groupes de Lie. Jusque vers 1925, on se limita à cette dernière ; les travaux de Lie lui-même, puis de Killing et d' Élie Cartan mirent en évidence une classe particulière de groupes de Lie, les groupes semi-simples, que l'on peut déterminer de façon explicite et qui, ainsi que l'on s'en est peu à peu aperçu, jouent un rôle capital dans pratiquement toutes les parties des mathématiques. Avec les mémoires célèbres de H.  Weyl en 1925 commence la théorie des groupes de Lie sous leur aspect global, développée ensuite par É. Cartan lui-même et une pléiade de mathématiciens de la génération suivante ; il est remarquable qu'ici encore, tout au moins pour les groupes semi-simples connexes, la seule connaissance de l'algèbre de Lie g du groupe permette de décrire globalement tous[...]

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Pour citer cet article

Jean DIEUDONNÉ. ANALYSE MATHÉMATIQUE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ABEL NIELS HENRIK (1802-1829)

    • Écrit par Jean-Luc VERLEY
    • 1 304 mots

    À une époque où la Norvège était d'une extrême pauvreté par suite des guerres qui l'avaient ruinée, Niels Henrik Abel, second fils d'une famille de sept enfants, naquit le 5 août 1802 dans l'île de Finnøy, près de Stavanger. Dès sa quinzième année, il lut et assimila les travaux les plus difficiles d'Euler...

  • BESICOVITCH ABRAM SAMOILOVITCH (1891-1970)

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 440 mots

    Mathématicien russe ayant effectué la plus grande part de ses recherches à Cambridge (Royaume-Uni), spécialiste de la théorie des fonctions. Né le 24 janvier 1891 à Berdyansk (Russie), Abram Samoilovitch Besicovitch est le fils d'un joaillier devenu caissier à la suite du cambriolage de sa boutique....

  • BOLZANO BERNARD (1781-1848)

    • Écrit par Jan SEBESTIK
    • 3 609 mots
    Le premier travail mathématique de Bolzano est consacré à la « démonstration » du postulat des parallèles d'Euclide.Plus importants sont ses mémoires d'analyse de 1816-1817, dont les préfaces esquissent le programme d'une « transformation totale des sciences a priori » et qui, en particulier,...
  • BOURGAIN JEAN (1954-2018)

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 390 mots

    Mathématicien belge, lauréat de la médaille Fields en 1994 pour ses travaux en analyse. Né le 28 février 1954 à Ostende (Belgique), Jean Bourgain fait ses études supérieures à l'université libre de Bruxelles, où il soutient sa thèse de doctorat en 1977. Boursier de recherche puis professeur à Bruxelles...

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