ORFÈVRERIE

La notion d'orfèvrerie ne peut se réduire à une définition simple. En effet, s'il est vrai que cet art est intimement lié au travail des métaux précieux, dont il sera nécessaire également de proposer une définition rigoureuse, il n'en est pas moins vrai que la seule présence de ces matériaux ne saurait constituer une définition absolue ; ainsi, les monnaies et médailles, souvent frappées en or ou en argent, ne peuvent-elles être assimilées à l'orfèvrerie. D'une manière générale sont considérées comme relevant de l'orfèvrerie diverses catégories d'objets métalliques, essentiellement en or ou en argent, destinés par nature à agrémenter certains aspects de la vie religieuse ou civile ; ainsi, objets de culte, ustensiles de table ou de toilette, accessoires de l'ameublement relèvent-ils fréquemment de l'orfèvrerie, même si des émaux, des perles et des pierres précieuses en complètent éventuellement la décoration. Si l'on se réfère au domaine de la parure, bijouterie ou joaillerie, où les métaux, bien que nécessaires techniquement, s'effacent derrière les gemmes, les frontières apparaîtront plus incertaines.

Aucune civilisation ne semble avoir ignoré le travail des métaux précieux ; toutefois, cette apparente continuité ne doit pas masquer certains paradoxes ; ainsi, l'intrusion de métaux non précieux, tel le cuivre, dans des fabrications a priori réservées à l'or ou à l'argent, implique l'élargissement du domaine envisagé ; ce qui est fréquent à l'époque médiévale. Plus encore, dès le xviii e siècle, l'apparition du « plaqué », suivie au xix e siècle de l'invention des procédés galvanoplastiques, puis, au xx e siècle, de la diffusion des métaux industriels (acier inoxydable, aluminium, etc.) pourraient être considérées comme autant de raisons de souligner le caractère changeant de ce qu'il convient d'entendre par orfèvrerie. Il n'en demeure pas moins que, dans le domaine des arts décoratifs, si l'on se réfère au développement de l'art des métaux précieux tel qu'il s'observe en Europe à partir de l'époque gothique, dans le cadre juridique progressivement affirmé du système des corporations, l'étude de l'orfèvrerie se fera à l'intérieur de limites précises. Celles-ci seront fixées par un critère de matière : ne sont considérés comme métaux précieux que l'or et l'argent, parce qu'ils sont à la fois inaltérables, encore que cela ne soit tout à fait exact que pour l'or, et doués d'une ductilité exceptionnelle, grâce à laquelle ils peuvent être aisément travaillés à froid ; lorsque l'argent est doré (au feu), il prend le nom de vermeil.

On observera que l'étymologie n'est pas en parfait accord avec cette définition : au sens strict, le travail de l'orfèvre, du latin auri faber, ne devrait désigner que celui de l'or ; néanmoins, l'argent ne saurait en être dissocié, et, effectivement, les mêmes règles définissent leur emploi à partir du moment où celui-ci a fait l'objet d'une surveillance rigoureuse, c'est-à-dire depuis le haut Moyen Âge. Le platine, bien qu'utilisé expérimentalement à Paris dès la fin du xviii e siècle, n'a été assimilé aux métaux précieux et soumis au contrôle qu'à partir du xx e siècle.

Si l'or et l'argent présentent naturellement par leur couleur et leur éclat les qualités esthétiques qui sont à l'origine de leur prestige, il n'en est pas moins vrai qu'utilisés à l'état pur ils n'offrent pas la résistance mécanique exigée par les objets dont ils constituent la matière. Pour cette raison, ils subissent un alliage avec un autre métal, en l'occurrence le cuivre, qui leur apporte[...]

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Écrit par

  • Gérard MABILLE : conservateur en chef au département des Objets d'art du musée du Louvre

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Pour citer cet article

Gérard MABILLE, « ORFÈVRERIE », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le . URL :

Médias

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