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MARIAGE

Le droit du mariage

Aucune société ne pouvant courir le risque de l'anomie, toutes enserrent dans des normes plus ou moins contraignantes l'union des sexes et la procréation, faits de nature sur la base desquels s'édifient les familles. La permanence et l'universalité du droit du mariage expriment la nécessité d'institutionnaliser et de façonner le couple humain. Cette exigence, indispensable à la société comme à l'individu, n'exclut nullement la diversité selon les temps et les lieux du droit du mariage, car tous les peuples, et même tous les hommes, n'ont pas du mariage la même conception et n'assignent à l'institution ni la même forme ni la même nature. Cette diversité existe parfois au sein d'une même société au même moment de son histoire. La manière dont le mariage est saisi par le droit, quant à la formation et à la dissolution du lien conjugal et quant à la nature des relations entre époux, trace les lignes de partage des grandes civilisations et définit aussi les seuils de leur évolution historique et sociologique.

Diversité des conceptions

Malgré l'apparente sécheresse des lois, la complexité du droit du mariage résulte du fait que l'union des sexes en un couple stable est située au carrefour de plusieurs systèmes normatifs qui tantôt se combinent les uns avec les autres, tantôt s'ignorent, tantôt s'opposent et entrent en conflit. La diversité affecte le droit lui-même à travers la nature des normes, autant que la conception juridique du mariage.

En effet, le lien conjugal est appréhendé non seulement par le droit positif de l'État, mais aussi par des normes religieuses et morales, comme par des coutumes ou des règles de mœurs. Si bien que le droit du mariage et, plus généralement, le droit de la famille, est un des domaines privilégiés des phénomènes d'internormativité.

Toutes les grandes religions ont élaboré un système de normes relatif au mariage. En Occident, par suite de la division des chrétiens, de la laïcisation de l'État et du droit étatique, l'évolution a conduit la quasi-totalité des États européens à dégager le mariage de l'emprise du droit canonique et de la juridiction de l'Église, dont l'autorité en la matière était reconnue par l'État dans l'Ancien Régime en France, et jusqu'à une date beaucoup plus récente en Italie, en Grèce et en Espagne.

Dans les pays musulmans, c'est dans le Coran que la plupart des États arabes puisent encore leur droit du mariage, soit que les règles religieuses aient par elles-mêmes force de loi, soit qu'elles aient inspiré la législation de l'État. Certains pays multiconfessionnels comme le Liban conservent en conséquence un grand pluralisme juridique car on applique aux adeptes de chaque religion le droit qui leur est propre. Mais une tendance plus ou moins forte à la laïcisation du droit du mariage et à la rupture avec les conceptions religieuses traditionnelles est aussi observable, en particulier en Turquie, en Tunisie ou plus récemment au Maroc.

Quant aux règles morales, le droit du mariage et plus encore celui du divorce en est imprégné. Pendant de longues années, le mariage fut en Occident, et sous l'influence de l'Église, considéré comme la forme permissive des relations sexuelles et exclusive de telles relations avec un autre partenaire. De nos jours, les mœurs et l'opinion ayant changé, le droit semble avoir opéré un relatif désengagement moral, en ne réprimant plus pénalement l'adultère, ou en admettant le divorce pour simple séparation de fait des époux.

Les règles de mœurs et les coutumes très diversifiées selon les milieux ou les régions contribuent à définir la pratique sociale. Plus étudiées par les sociologues que par les juristes, ces derniers ne peuvent cependant les ignorer soit pour les combattre,[...]

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Pour citer cet article

Catherine CLÉMENT, Universalis, Catherine LABRUSSE-RIOU et Marie-Odile MÉTRAL-STIKER. MARIAGE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Mariage : empêchements fondés sur la parenté ou l'alliance - crédits : Encyclopædia Universalis France

Mariage : empêchements fondés sur la parenté ou l'alliance

Le Contrat de mariage, G. Traversi - crédits : DeAgostini/ Getty Images

Le Contrat de mariage, G. Traversi

Autres références

  • ACTION RATIONNELLE

    • Écrit par Michel LALLEMENT
    • 2 646 mots
    • 1 média
    ...années 1970, à des objets habituellement réservés aux sociologues : le mariage, la déviance, l'éducation, etc. G. Becker développe par exemple une théorie du mariage qui, faisant fi des considérations sociales habituelles, propose d'assimiler le couple à une entreprise. Le mariage peut...
  • CANTIQUE DES CANTIQUES

    • Écrit par Jean-Pierre SANDOZ
    • 1 834 mots
    Au cours de son existence prélittéraire, le Cantique aurait donc été lié à de grands moments de l'institution domestique, le mariage, dont il faut se rappeler que l'importance et la force tenaient, à cette époque, non pas aux rites religieux, mais à la valeur accordée à l'institution elle-même....
  • CÉLIBAT RELIGIEUX

    • Écrit par André BAREAU, Jacques POHIER
    • 7 034 mots
    Des dimensions essentielles de l'existence humaine sont en cause dans tout ce qui concerne le mariage, l' affectivité et la sexualité. Les recherches entreprises depuis un siècle par les différentes sciences de l'homme ont révélé combien relatives pouvaient être en ces matières les institutions...
  • COUPLE

    • Écrit par Jean-Jacques LEMOULAND
    • 5 084 mots

    Dans le Code civil français de 1804, le mariage était la seule forme de couple reconnue. Cela exprimait, à l'époque, une conviction politique, que la famille fondée sur le mariage était la meilleure garante du bon ordre social. En conséquence, tant les conditions de formation du mariage que le statut...

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Voir aussi