Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

LOGIQUE

La logique symbolique moderne

La renaissance de la logique

Algèbre de Boole - crédits : Planeta Actimedia S.A.© Encyclopædia Universalis France pour la version française.

Algèbre de Boole

L'année 1847, où paraît la Mathematical Analysis of Logic de George Boole, marque le départ d'une nouvelle forme de logique, une logique qui, à la fois symbolique et mathématique, réalise enfin le double rêve de Leibniz. Se fondant sur certaines analogies entre les opérations fondamentales de la logique et des mathématiques, Boole transcrit les premières dans le symbolisme algébrique. L'analogie cesse, il est vrai, pour l'élévation aux puissances qui est sans effet dans la multiplication logique, où x2 = x (par exemple, les Anglais qui sont des Anglais sont des Anglais, simplement). Cependant, même en algèbre, cette loi d' idempotence se trouve vérifiée pour les cas particuliers où x = 0 et où x = 1. Boole construit donc une espèce particulière d'algèbre n'admettant que ces deux valeurs numériques, et qui sera l'algèbre de la logique. Dès lors, devant un problème d'ordre logique, il en traduit l'énoncé en langage algébrique, puis opère selon les lois de son algèbre binaire, et retraduit enfin le résultat en termes logiques. Cette algèbre est efficace, elle fournit une procédure de décision pour des problèmes bien plus complexes que ceux auxquels s'applique la logique classique ; mais elle a l'inconvénient de n'admettre une interprétation logique (logique des classes, et même, avec quelques aménagements, logique des propositions) qu'aux deux extrémités du calcul. C'est un instrument pour la logique, non une logique.

C'est ce que lui reprochera William Stanley Jevons. Il complète la loi de Boole sur la multiplication logique par une loi analogue sur l'addition logique ; par là, il a contribué à faire admettre définitivement l'interprétation non exclusive de la disjonction (addition logique), en raison de l'intéressante dualité qui s'établit alors entre conjonction et disjonction, et a commencé ainsi à libérer la logique de l'asservissement déformant à la mathématique à laquelle Boole l'avait soumise. On lui doit aussi l'invention d'un « piano logique » où le calcul se fait automatiquement par le jeu des touches : c'est la première machine logique. Après lui, J.  Venn, substituant aux deux interprétations extensive et intensive des propositions une interprétation « existentielle », double le calcul de forme algébrique par l'invention de diagrammes, beaucoup plus satisfaisants que ceux d'Euler. L'algèbre de la logique trouvera enfin son couronnement dans les ouvrages de Schröder et de Alfred North Whitehead, le premier plus poussé dans les détails techniques, le second d'esprit plus philosophique.

Contemporain de Boole et mathématicien comme lui, Augustus De Morgan est le véritable initiateur de la logique des relations. Celle-ci sera ensuite développée par Charles Sanders Peirce, par Ernst Schröder, et surtout par Bertrand Russell. Peirce a d'ailleurs d'autres mérites, par exemple d'avoir dégagé la notion moderne des quantificateurs, amorcé le calcul des fonctions de vérité par l'usage des matrices, et surtout d'avoir libéré la logique nouvelle de la fascination pour les équations et pour les opérations inverses qui caractérisait l'algèbre de la logique. À la relation d'égalité, il substitue comme copule logique fondamentale la relation d'« illation », qui marque à la fois l'inclusion hypothétique et l'implication entre propositions. Tournant décisif dans le développement de la logique contemporaine.

De l'algèbre de la logique à la logistique

L'algèbre de Boole est, en somme, une théorie mathématique particulière qui, comme telle, présuppose les lois logiques de la déduction. Même s'il est vrai que quelques-unes se retrouvent parmi les interprétations possibles[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur honoraire à la faculté des lettres et des sciences humaines de Toulouse
  • : docteur ès lettres, chargé de recherche au C.N.R.S.

Classification

Pour citer cet article

Robert BLANCHÉ et Jan SEBESTIK. LOGIQUE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Algèbre de Boole - crédits : Planeta Actimedia S.A.© Encyclopædia Universalis France pour la version française.

Algèbre de Boole

Tripartition signe-sens-référence - crédits : Encyclopædia Universalis France

Tripartition signe-sens-référence

Bertrand Russell - crédits : Kurt Hutton/ Picture Post/ Getty Images

Bertrand Russell

Autres références

  • ANALOGIE

    • Écrit par Pierre DELATTRE, Universalis, Alain de LIBERA
    • 10 427 mots
    Dès les années 1200, et pour une large période, l'analyse du phénomène logico-sémantique de l'équivocité se voit lestée de thèmes directement empruntés à Avicenne. C'est sous son influence que l'équivocité « selon l'antérieur et le postérieur » est reconnue par les logiciens (...
  • ANALYTIQUE PROPOSITION

    • Écrit par Françoise ARMENGAUD
    • 459 mots

    Le mot « analytique » a au moins trois sens.

    1. Au sens large, une proposition est dite analytique si elle est vraie en vertu de la signification des termes qu'elle contient. La simple considération des significations suffit à donner l'assurance de sa vérité. À ce sens se rattachent le...

  • ANTINOMIE

    • Écrit par Françoise ARMENGAUD
    • 372 mots

    N'est pas antinomie n'importe quelle contradiction, mais seulement celle qui joue entre des lois — soit des lois juridiques ou théologiques, soit des lois de la raison (Kant), soit des thèses déduites de lois logiques (théorie des ensembles) —, ni n'importe quel paradoxe...

  • CATÉGORIES

    • Écrit par Fernando GIL
    • 6 071 mots
    Körner énonce encore un quatrième fait, la logique sous-jacente aux cadres catégoriaux, selon qu'elle est plus ou moins rigide. En effet, de très nombreux travaux récents ont mis en relief le fonctionnement d'une pensée constructive et stratégique, proche de la logique intuitionniste, dont les exigences...
  • Afficher les 76 références

Voir aussi