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NUCLÉIQUES ACIDES

Lésions et réparations de l'ADN

Le matériel génétique des organismes vivants est exposé à des agents génotoxiques variés dont l'interaction directe ou indirecte (par l'intermédiaire de métabolites formés lors des réactions enzymatiques intracellulaires) avec l'ADN induit une importante gamme de lésions. Aussi l'état de l'ADN est-il contrôlé par des facteurs présents dans la cellule touchée, et, quand une lésion est repérée, des systèmes enzymatiques de réparation sont mobilisés afin d'éliminer les dommages et de restituer un ADN intact (réparation fidèle) ou incomplètement réparé (réparation source d'erreur).

En cas de réparation fidèle, il ne reste aucune trace de l'accident subi par l'ADN. Celui-ci reste donc le garant de la conformité au programme spécifique lors des reproductions cellulaires, impliquant – après réplication de l'ADN grâce à l'enzyme ADN-polymérase – le partage chromosomique qui caractérise la mitose, et assure la transmission d'un patrimoine génétique intact et identique d'une cellule mère à ses deux cellules filles. L'ADN reste aussi le support de l'information génétique que transcrit – au niveau des gènes en activité – la machinerie enzymatique dont l'acteur principal, l'ARN-polymérase, fabrique les ARN messagers indispensables à la synthèse des protéines cellulaires qui auront donc été codées par les gènes.

Par contre, s'il reste trace de la lésion subie par l'ADN, l'activité cellulaire peut être entravée ou déviée vers des modalités pathologiques se manifestant notamment par des anomalies du cycle cellulaire de mise en œuvre de l'information génétique, d'où l'importance cruciale du mécanisme de réparation. Celui-ci a en effet pour rôle de corriger ou de franchir la lésion, par coopération entre la machinerie réplicative (reproduction de l'ADN) et les systèmes enzymatiques réparateurs, lesquels fonctionnent de concert avec les systèmes de transcription de l'information génétique (formation d'ARN messager).

Les principales lésions de l'ADN

On notera d'abord que la molécule d'ADN peut être endommagée au niveau des bases puriques et pyrimidiques, support du code génétique. Ces bases peuvent être perdues ou désaminées, ou encore remplacées (changement tautomérique) par des substances analogues. Les bases peuvent aussi subir des réactions de méthylation ou d'éthylation par des agents alkylants (polluants de l'atmosphère, médicaments antitumoraux, etc.). Des produits d'addition sur les bases, produits extrêmement variés que l'on désigne par le terme d'adduits, résultent enfin de l'action nocive de nombreux agents génotoxiques tels que les hydrocarbures polycycliques contenus dans les produits de combustion (par exemple la fumée de cigarette).

La structure de la double hélice de l'ADN peut être perturbée par la formation de pontages intrabrin (entre deux bases adjacentes d'un même brin) ou interbrins (entre deux bases situées sur les brins homologues). Les ultraviolets germicides de 254 nanomètres (U.V.-C) provoquent la formation de ponts entre pyrimidines (ainsi devenues dimériques), alors que les antitumoraux bifonctionnels, tel le cisplatine, forment des ponts entre purines adjacentes. D'autre part, en s'intercalant entre deux étages ou plateaux des bases dans la double hélice de l'ADN, certaines molécules vont former des liaisons covalentes stables entre les bases portées par les brins opposés.

Les ruptures simple et double brin de l'ADN sont produites directement par des agents tels que les radiations ionisantes, et indirectement par l'action de radicaux libres. La destruction d'un désoxyribose entraîne une rupture des liaisons phosphodiesters au niveau du site lésé, donc[...]

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Écrit par

  • : docteur en médecine, docteur ès sciences, professeur de biochimie à la faculté de médecine de Cochin-Port-Royal
  • : directeur de recherche de classe exceptionnelle au C.N.R.S., unité 1292 (génotoxicologie et réparation de l'ADN)
  • : ingénieur-docteur, docteur ès sciences, professeur au Conservatoire national des arts et métiers, ingénieur E.S.C.I.L.
  • : directeur de recherche au C.N.R.S., directeur de l'Institut de recherche sur le cancer, agrégé de l'Université

Classification

Pour citer cet article

Jacques KRUH, Ethel MOUSTACCHI, Michel PRIVAT DE GARILHE et Alain SARASIN. NUCLÉIQUES ACIDES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Molécules constitutives des nucléotides - crédits : Encyclopædia Universalis France

Molécules constitutives des nucléotides

Nucléosides et nucléotides dérivés de l'adénine - crédits : Encyclopædia Universalis France

Nucléosides et nucléotides dérivés de l'adénine

ARN de transfert : structure en feuille de trèfle - crédits : Encyclopædia Universalis France

ARN de transfert : structure en feuille de trèfle

Autres références

  • ADN (acide désoxyribonucléique) ou DNA (deoxyribonucleic acid)

    • Écrit par Michel DUGUET, Universalis, David MONCHAUD, Michel MORANGE
    • 10 074 mots
    • 10 médias
    Le 25 avril 1953, l'Américain James D. Watson et le Britannique Francis H. C. Crick, récipiendaires, en 1962, avec le Britannique Maurice Wilkins du prix Nobel de physiologie ou médecine, proposaient, dans la célèbre revue scientifique anglaise Nature, une structure tridimensionnelle...
  • ALTMAN SIDNEY (1939-2022)

    • Écrit par Georges BRAM, Universalis
    • 377 mots

    Le biochimiste américain d'origine canadienne Sidney Altman est né le 7 mai 1939 à Montréal (Canada). Après des études de physique au Massachusetts Institute of Technology (MIT) à Cambridge et une année à l'université Columbia à New York, il fait, à l'université de Boulder (Colorado), des recherches...

  • ANTIGÈNES

    • Écrit par Joseph ALOUF
    • 7 382 mots
    • 5 médias
    L'immunogénicité des acides nucléiques, longtemps niée, est désormais bien établie, mais ne concerne que certains acides ribonucléiques (ARN) et désoxyribonucléiques (ADN). Les autoanticorps anti-ADN caractérisent certaines maladies auto-immunes (lupus érythémateux disséminé). Enfin, certains lipides...
  • ARN (acide ribonucléique) ou RNA (ribonucleic acid)

    • Écrit par Marie-Christine MAUREL
    • 2 772 mots
    • 2 médias

    Faut-il voir dans une molécule biologique omniprésente dans toute structure cellulaire des êtres vivants, l'ARN (acide ribonucléique), la première étape de l'histoire de la vie ? Les ARN contemporains sont-ils les fossiles d'anciennes molécules ? Les voies métaboliques primordiales...

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Voir aussi