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ARN (acide ribonucléique) ou RNA (ribonucleic acid)

Faut-il voir dans une molécule biologique omniprésente dans toute structure cellulaire des êtres vivants, l'ARN (acide ribonucléique), la première étape de l'histoire de la vie ? Les ARN contemporains sont-ils les fossiles d'anciennes molécules ? Les voies métaboliques primordiales ont-elles été guidées par de petits ARN ? La biologie moléculaire, en mettant en évidence l'extraordinaire diversité moléculaire de l'ARN, est venue appuyer les prédictions formulées dans les années 1960 par Carl Woese, Francis Crick et Leslie Orgel. Selon eux, un « monde ARN », le « RNA World » ainsi baptisé par Walter Gilbert en 1986, aurait précédé le monde à ADN-ARN-protéines contemporain. Le message de dizaines d'années de recherche est maintenant bien clair. Dans les laboratoires, l'ARN a changé de statut : de simple molécule au rôle transitoire permettant de bâtir des objets plus complexes, les protéines, elle est devenue, au fil des découvertes, une molécule aux multiples fonctions métaboliques. Ce que nous observons à ce jour de l'activité des ARN pourrait bien n'être que le sommet d'un immense iceberg...

Le « monde ARN » moderne

Un véritable « monde ARN » existe en fait dans chaque cellule vivante qui met en œuvre de multiples ARN aux fonctions variées : informationnelles, catalytiques, ou servant de matrices, de guides, de défenses contre virus, transposons, etc., certaines molécules étant même capables de cumuler plusieurs de ces activités. Ce monde trouve-t-il ses sources dans le passé du vivant ?

Toutes les cellules vivantes possèdent trois grandes classes d'ARN, impliquées dans la biosynthèse des protéines : les ARN messagers (ARNm), les ARN de transfert (ARNt), et les ARN ribosomaux (ARNr). Synthétisés dans le noyau cellulaire au cours de la « transcription » de gènes faisant partie de l'ADN des chromosomes, ces ARN, molécules en simple brin, sont transférés dans le cytoplasme de la cellule après différentes étapes de « maturation ». À côté de ces ARN, on connaît, depuis peu, de petits ARN non codants (dits ARNnc), encore appelés ARNnm (ou ARN non messagers).

En tant qu'acide ribonucléique tout ARN est un enchaînement de ribonucléotides. Ils peuvent s'apparier localement (appariements intramoléculaires) et les forces d'empilement et d'appariement des nucléotides construisent alors des « tiges en hélices » et des structures bien définies appelées « motifs ». Parmi les motifs identifiés, on note des renflements, des coudes, des boucles, formant des « épingles à cheveux » permettant certaines fonctions métaboliques. Par exemple, le déchiffrage pas à pas de l'ARN messager par le ribosome, c'est-à-dire sa « traduction » aboutissant à la synthèse des protéines, est réglé par des motifs en épingles à cheveux ou par des pseudonœuds nommés ARN de transfert.

ARN de transfert : structure en feuille de trèfle - crédits : Encyclopædia Universalis France

ARN de transfert : structure en feuille de trèfle

ARN transfert-messager - crédits : Encyclopædia Universalis France

ARN transfert-messager

Un ARN de transfert (ARNt) est une petite molécule de 100 nucléotides. Ubiquitaire, et fortement conservé au cours de l'évolution, l'ARNt est impliqué à plusieurs niveaux dans le métabolisme de tous les types cellulaires. Au niveau du ribosome, qui est en fait l'organite assurant la synthèse des protéines, sa fonction principale est d'apporter l'acide aminé correspondant à chacune des structures codantes (codons) consécutivement exposées par l'ARNm. Les ARNt servent également d'amorce au cours de la réplication virale et sont impliqués dans l'activité des télomérases (enzymes agissant sur les extrémités des chromosomes). Contenant un fort pourcentage de bases modifiées, dont certaines pourraient avoir une lointaine origine prébiotique, cette catégorie d'ARN est considérée comme étant les « reliques » les plus évidentes d'un ancien monde de l'ARN. Quant à l'ARN ribosomal (ARNr) sa structure secondaire type est aussi remarquablement conservée. Les[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-VI-Pierre-et-Marie-Curie, Institut Jacques-Monod

Classification

Pour citer cet article

Marie-Christine MAUREL. ARN (acide ribonucléique) ou RNA (ribonucleic acid) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

ARN de transfert : structure en feuille de trèfle - crédits : Encyclopædia Universalis France

ARN de transfert : structure en feuille de trèfle

ARN transfert-messager - crédits : Encyclopædia Universalis France

ARN transfert-messager

Autres références

  • EUCARYOTES (CHROMOSOME DES)

    • Écrit par Denise ZICKLER
    • 7 721 mots
    • 9 médias
    La synthèse protéique ne se fait pas directement sur l'ADN mais par l'intermédiaire d'ARN. L'information génétique contenue dans l'ADN est d'abord transférée (transcription) à des molécules d'ARN qui servent à leur tour de matrice pour la fabrication au niveau des ribosomes des séquences d'...
  • ADN (acide désoxyribonucléique) ou DNA (deoxyribonucleic acid)

    • Écrit par Michel DUGUET, Universalis, David MONCHAUD, Michel MORANGE
    • 10 074 mots
    • 10 médias
    ...en particulier appel à l'action d'enzymes capables à la fois de former et de détruire les liaisons entre acides aminés existant au sein des protéines. Le biochimiste belge Jean Brachet démontra le rôle des ARN (acide ribonucléique) dans la production des protéines. L'ARN, acide nucléique formé d'une...
  • ALTMAN SIDNEY (1939-2022)

    • Écrit par Georges BRAM, Universalis
    • 377 mots

    Le biochimiste américain d'origine canadienne Sidney Altman est né le 7 mai 1939 à Montréal (Canada). Après des études de physique au Massachusetts Institute of Technology (MIT) à Cambridge et une année à l'université Columbia à New York, il fait, à l'université de Boulder (Colorado), des recherches...

  • ANTIBIORÉSISTANCE

    • Écrit par Aurélie CHABAUD, Sylvain MEYER, Marie-Cécile PLOY
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Voir aussi