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SANCTUAIRE, Grèce hellénistique et Rome antique

Sanctuaires et rituels à Rome

Membres de la cité, d'un collège ou d'une famille, les dieux des Romains résident sur terre, au milieu du peuple des humains. Selon leur statut, les sanctuaires qui leur servent de demeures sont construits par le peuple romain ou par des particuliers sur des terres publiques ou privées, et offrent le cadre de leur vie sociale. Noyau de la pratique religieuse, ces relations entre hommes et dieux sont régies par des « traditions rituelles » (ritusromanus, graecus, etc.), qui structurent, à côté d'autres impératifs formels, l'aménagement des espaces cultuels.

Avant d'étudier la distribution et la fonction des lieux du culte, il convient de faire deux remarques préliminaires. Qu'appelle-t-on, d'abord, un sanctuaire dans la Rome ancienne ? D'un point de vue formel, un sanctuaire n'est pas nécessairement un bâtiment, ni d'ailleurs simplement un lieu ou un édifice occupés par une divinité. En effet, tout lieu public ou privé peut servir de sanctuaire, de lieu de culte, pour peu qu'il y ait des hommes pour célébrer les rites : souvent un espace purifié avec un autel permanent ou portatif suffit. Toutefois, reconnaître une présence divine, dresser un autel, une chapelle, un temple, et célébrer un culte ne revient pas pour autant à créer un lieu sacré. En termes romains, seuls sont sanctuaires les terrains ou bâtiments consacrés par un magistrat du peuple romain, ou à défaut, en vertu d'une loi, ou par ceux que le peuple a élus à cette fin. Si ces règles ne sont pas respectées, la consécration et la dédicace ne sont pas valables, et on peut disposer librement de l'objet ou du lieu en question. Ainsi un autel, une chapelle et un lit sacré, dédiés en 120 avant notre ère par une vestale « sans l'ordre du peuple », furent détruits (Cicéron, Sur sa maison, LIII, 136 sqq.). Bien entendu, tant qu'un sanctuaire privé n'empiète pas sur les terres du peuple romain et n'engage que la communauté qui l'a aménagé et le patronne, qu'il s'agisse d'un collège professionnel, d'un groupe de militaires (voir le sanctuaire des sous-officiers à Osterburken, Bade Wurtemberg) ou d'une famille, sa dédicace est pleinement valable, à l'intérieur de ces limites, et la cité la cautionne comme telle.

Rites de fondation

Les premiers rituels dont un sanctuaire est le théâtre sont ceux de sa fondation, à commencer par les règles spatiales auxquelles il est soumis. En effet, un sanctuaire n'est pas élevé n'importe où. Comme les habitants de Rome, les dieux romains ne sont pas tout à fait égaux entre eux. Sans même parler de ceux qui, du haut du Capitole, gèrent et protègent la destinée du peuple romain, il y a les divinités considérées comme romaines « depuis toujours » (Jupiter, Junon, Minerve, Janus, Vesta...), et celles qui ont reçu le droit de cité à une date plus récente. Pour peu que leur fonction l'autorise, les dieux « anciens » établissent leur résidence principale dans la partie la plus intime de Rome, à l'intérieur du pomerium, limite archaïque englobant à la fin de la République l'aire comprise entre le forum, le Capitole, la vallée du Grand Cirque et le Tibre. Au-delà de cette ligne, rarement franchie sous la République par les divinités naturalisées, Cybèle par exemple, on trouve les nouveaux venus comme Apollon, Esculape, Hercule ou les dieux de l'Aventin, à côté de vieilles divinités comme Mars ou Vulcain qui ne peuvent être présentes qu'aux limites de l'espace habité. Les règles ont évolué sous l'Empire et sont devenues plus complexes puisque la ligne pomériale fut étendue à plusieurs reprises, au point d'englober des sanctuaires jadis exclus de la résidence privilégiée dans le premier cercle de la citoyenneté.

Les rites de fondation[...]

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Écrit par

  • : chaire de civilisation et archéologie romaines à l'Institut universitaire de France, université de Provence-Aix-Marseille-I
  • : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section)

Classification

Pour citer cet article

Pierre GROS et John SCHEID. SANCTUAIRE, Grèce hellénistique et Rome antique [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Priène - crédits : G. Sioen/ De Agostini/ Getty Images

Priène

Ara Pacis, Rome - crédits : Dagli Orti/ The Art Archive/ Picture Desk

Ara Pacis, Rome

Détail du décor de l'Ara Pacis Augustae - crédits : Index/  Bridgeman Images

Détail du décor de l'Ara Pacis Augustae

Autres références

  • BAALBEK

    • Écrit par Claude NICOLET
    • 718 mots
    • 2 médias

    Le nom de Baalbek remonte à l'époque phénicienne ( Baal Beqaa, le seigneur de la Beqaa), et on y reconnaît la trace du grand dieu phénicien, Baal, qu'on retrouve dans de multiples cités, à Tyr par exemple. On ne sait s'il faut identifier Baalbek avec la ville mentionnée dans la Bible,...

  • CARTHAGE

    • Écrit par Abdel Majid ENNABLI, Liliane ENNABLI, Universalis, Gilbert-Charles PICARD
    • 9 841 mots
    • 5 médias
    Un autre témoignage important de la Carthage punique est le «  tophet », sanctuaire de Tanit et de Baal Hamon. On sait par diverses sources antiques que les Carthaginois pratiquaient des sacrifices de jeunes enfants en l'honneur de divinités tutélaires de la ville. C'est par hasard que ce lieu consacré...
  • DELPHES

    • Écrit par Bernard HOLTZMANN, Giulia SISSA
    • 9 618 mots
    • 9 médias

    Pour les Grecs, Delphes était le centre géographique du monde : les deux aigles dépêchés par Zeus depuis les bords du disque terrestre s'y étaient rejoints. Aussi le nombril ( omphalos) terrestre y était-il représenté dans la fosse oraculaire ( adyton) du temple sous la forme d'une...

  • DIDYMES

    • Écrit par Martine Hélène FOURMONT
    • 1 224 mots

    La célébrité de Didymes est due au sanctuaire d'Apollon Didymaios, le Didyméion,, implanté en bordure des côtes égéennes, à 17 kilomètres environ au sud de Milet, dont il était dépendant. Il appartenait d'abord à la famille des Branchides, puis il devint le plus grand sanctuaire de la cité,...

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Voir aussi