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ROME ET EMPIRE ROMAIN L'art romain

Thermes de la villa de Piazza Armerina - crédits : Index/  Bridgeman Images

Thermes de la villa de Piazza Armerina

Rome est une des villes d'art les plus prestigieuses du monde, et une bonne partie des monuments qui font sa gloire remontent à l'Antiquité. Sur toute l'étendue de l'Empire qu'elle a régi, de l'Écosse au Sahara, de l'Atlantique à l'Euphrate, d'innombrables vestiges d'architecture, de sculpture, de peinture et de mosaïque excitent encore l'admiration ; du xve au xxe siècle, ils ont été considérés comme les modèles d'une perfection que tous les artistes européens s'efforçaient d'imiter. La révolution qui de nos jours a bouleversé l'esthétique n'a pas entièrement aboli leur prestige. Il semble donc évident qu'il y a eu un art romain, égal à celui des civilisations les plus puissamment créatrices. Cependant, depuis la fin du xviiie siècle, l'existence même de cet art a été contestée par des critiques parmi les plus illustres, dont le premier fut Winckelmann et plus près de nous Malraux ; sous sa forme la plus simple, cette attitude consiste à affirmer que la production romaine n'a été très longtemps qu'une suite dégénérée de celle de la Grèce avant de devenir un reflet de celle de l'Orient. Les Latins eux-mêmes auraient été stériles. Cette thèse s'appuie sur des arguments nombreux et solides : il est certain que beaucoup de monuments figurés exécutés à la fin de la République ou à l'époque impériale, en Italie ou dans les provinces, reproduisent ou adaptent des thèmes inventés par les Grecs ; certain aussi que les auteurs de ces copies ou de ces adaptations étaient très fréquemment eux-mêmes originaires des provinces balkaniques ou orientales, et que le grec était leur langue maternelle. Enfin, et c'est sans doute le plus grave, des représentants particulièrement autorisés de la pensée romaine, comme Cicéron et Virgile, ont affirmé expressément que l'art était une activité indigne d'un vrai Romain. Un grand effort d'analyse historique, commencé au début du xxe siècle par le Viennois F. Wickhoff et qui a abouti à la magistrale synthèse de R. Bianchi-Bandinelli, permet enfin d'affirmer que la société romaine, dont personne ne conteste qu'elle ait fait faire des progrès décisifs à l'humanité méditerranéenne dans le domaine de l'organisation politique, a également créé un mode d'expression artistique qui lui est propre : les éléments qui composent ce langage ont certes été presque tous inventés par les Grecs, mais la syntaxe qui les unit est l'œuvre de Rome.

Un exemple frappant de cette réutilisation des thèmes de l'art grec pour exprimer une idéologie nouvelle nous est fourni par les sarcophages sculptés utilisés comme tombeaux par des membres de l'aristocratie romaine depuis le début du iie siècle après J.-C. La plupart de ces sarcophages représentent des scènes de la mythologie grecque ; mais, comme l'a démontré K. Schefold, ces scènes ont été choisies parce qu'elles évoquaient des idées morales à la mode au moment où le sarcophage a été sculpté, et en particulier les vertus que le mort était censé avoir pratiquées. Pour mieux mettre en valeur cette signification, l'auteur de la décoration n'hésitait pas à déformer le mythe qui lui fournissait son sujet au point de le rendre incompréhensible. Le Louvre possède un sarcophage de la seconde moitié du iie siècle qui reproduit deux épisodes de la légende de Jason et de Médée : à gauche, Jason dompte le terrible taureau de Colchide, en présence du roi Aeétès ; à droite, il épouse Médée ; pourquoi avoir choisi ces deux scènes, bien peu significatives, de la geste des Argonautes ? Parce qu'en domptant le taureau, Jason manifeste sa virtus, ce courage à la fois physique et moral, qui était la plus haute valeur éthique pour les Romains ; et parce[...]

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Pour citer cet article

Gilbert-Charles PICARD. ROME ET EMPIRE ROMAIN - L'art romain [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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Barbare combattant un légionnaire romain - crédits : A. Dagli Orti/ De Agostini/ Getty Images

Barbare combattant un légionnaire romain

Largo Argentina (porticus Minucia) à Rome - crédits : Encyclopædia Universalis France

Largo Argentina (porticus Minucia) à Rome

Statue d'Auguste dite de Prima Porta - crédits : Csaba Peterdi/ Shutterstock

Statue d'Auguste dite de Prima Porta

Autres références

  • CIVILISATION ROMAINE (notions de base)

    • Écrit par Universalis
    • 4 292 mots
    • 18 médias

    Le destin de Rome est celui d’une obscure bourgade de la péninsule italienne devenue, en l’espace de quatre siècles, une mégapole, capitale d’un immense empire s’étendant de l’Écosse à l’Arabie, des confins sahariens aux rives du Danube. Ce processus historique s’accompagna de la disparition de la ...

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