MOSAÏQUE, art
Carte mentale
Élargissez votre recherche dans Universalis
À l'encontre de la peinture et de la sculpture, la mosaïque est une technique d'art limitée à la civilisation gréco-romaine et au monde paléochrétien et byzantin. Ses « renaissances » au Moyen Âge et à l'époque moderne, en Occident, furent éphémères et sporadiques.
Le terme « mosaïque », utilisé dans toutes les langues européennes, vient du latin musiuum opus. Né à Rome au ier siècle avant J.-C., il désignait tout d'abord les mosaïques qui ornaient des grottes naturelles ou artificielles et des fontaines de forme architecturale. Consacrés aux Muses, ces lieux de prélassement et de repos étaient appelés musaea, d'où le nom de leur décor, musiuum opus, en abrégé musiuum (mosaïque). Par la suite, le terme a été appliqué aux mosaïques murales en général ; ce n'est qu'aux temps modernes qu'il a été étendu à la technique tout entière.
Procédé d'art qui, au sens large du mot, fait partie de la peinture, la mosaïque exige des équipes d'ouvriers spécialisés une préparation technique et matérielle plus minutieuse que toutes les autres techniques picturales. Faite de petits cubes de matière dure, elle est appliquée, sauf de rares exceptions, au sol, aux murs et aux voûtes de grandes surfaces architecturales. Moins malléable, partant moins riche de nuances que la peinture, elle est plus résistante que celle-ci et, par sa nature, plus proche de l'architecture. Aussi fut-elle aux moments de ses apogées la peinture monumentale par excellence.
La mosaïque comprend deux branches principales : la mosaïque de pavement et la mosaïque murale ou de revêtement. L'histoire de la mosaïque de pavement peut être divisée en trois grandes périodes. La première, celle de la mosaïque de galets, s'étend du viiie au iiie siècle avant J.-C. La deuxième, qui va du iiie au ier siècle, est celle de la mise au point du procédé technique qui permet d'imiter la peinture. La troisième, qui s'étend jusqu'au viie siècle de notre ère, est celle de la pleine expansion de cet art qui se caractérise alors par une quasi-industrialisation. L'organisation rationnelle des équipes et des méthodes de travail eut pour résultat une certaine uniformité des canevas dans tout l'Empire romain, malgré une grande richesse du répertoire ornemental.
Mosaïque de pavement
Mosaïque de galets
La mosaïque de galets est née au nord de l'Asie Mineure (Gordion) au viiie siècle avant J.-C. Des galets de deux (blanc et noir) ou de trois (blanc, noir et rouge) couleurs, de 1 à 2 centimètres de longueur, fichés verticalement dans un lit de pose de ciment, formaient des tapis à décor géométrique. La technique a dû passer en Grèce au vie siècle ; on a trouvé un échantillon de cette époque à Delphes. Dès le siècle suivant, des mosaïques de galets à sujets figurés apparaissent à Corinthe et en Sicile, pour se multiplier au ive et au iiie siècle (Athènes, Érétrie, Olynthe, Olympie, Pella en Macédoine, Rhodes, Sicyone, Égypte). Sujets mythologiques, animaux fantastiques de type oriental s'associent dans ces œuvres aux ornements de l'art grec classique. Généralement à deux tons, dessin clair sur fond sombre, ces mosaïques ressemblent par la palette et par le style aux peintures des vases à figures rouges. Les personnages et certains ornements ont été cernés de filets de plomb ou de terre cuite qui rappellent les contours incisés de ces peintures. Cependant, les galets ne pouvant être joints étroitement, le béton rosâtre du lit de pose est visible et forme une fine résille de lignes qui produit un effet esthétique particulier. Cet art semble avoir atteint son apogée vers 300 avant J.-C. dans les mosaïques de Pella (à 40 km au nord-ouest de Thessalonique), capitale de la Macédoine sous Alexandre le Grand. Des tons plus riches, des dégradés plus délicats sont obtenus par des galets d'une gamme de couleurs variées et par des tesselles de composition chimique (en particulier dans les tons verts et jaunes). Néanmoins, le contraste entre la tonalité claire des sujets et le fond sombre est toujours respecté.
Ruines du palais de Pella. Au premier plan, pavement en mosaïque sur galets. Vers 300 av. J.-C., Grèce.
Crédits : Carole Raddato/ flickr ; CC BY-SA 2,0
Tout en se rattachant par la typologie et par la bichromie à la mosaïque de galets, des mosaïques d'une technique intermédiaire, qui associe des galets coupés en deux et des cailloux, annoncent la véritable mosaïque de tesselles. On en a découvert, datant des iiie, iie et ier siècles, en Grèce à Sparte et à Mantinée, en [...]
1
2
3
4
5
…
pour nos abonnés,
l’article se compose de 7 pages
Écrit par :
- Jean-Pierre DARMON : directeur de recherche au C.N.R.S.
- Henri STERN : directeur de recherche au C.N.R.S.
Classification
Autres références
« MOSAÏQUE, art » est également traité dans :
AFRIQUE ROMAINE
Dans le chapitre « La mosaïque » : […] Les études d'ensemble les plus récentes consacrées aux mosaïques d'un certain nombre de sites africains (Utique, Thuburbo-Majus), tout en couvrant de larges tranches chronologiques, semblent, malgré leur nombre limité, suggérer qu'il faut attendre le ii e siècle après J.-C. pour qu'apparaisse une production caractérisée par la polychromie et par la présence de thèmes figurés. Cette production att […] Lire la suite
ALICATADO
Le terme d' alicatado désigne, en Espagne, une mosaïque constituée par des fragments de céramique émaillée de formes et de couleurs différentes, incrustées dans du plâtre. Ces fragments de faïence sont obtenus à partir d' azulejos monochromes sur lesquels on trace un décor et dont on détache ensuite la partie dessinée à l'aide de pinces appelées alicates , en frappant le carreau à petits coups. […] Lire la suite
ALLÉGORIE
Dans le chapitre « L'Antiquité » : […] Le terme grec allegoria ne se rencontre qu'à partir de l'époque hellénistique dans le vocabulaire de la rhétorique pour désigner, du point de vue du créateur, une suite continue de métaphores par lesquelles celui-ci rend accessible un concept abstrait à l'imagination de son lecteur (Quintilien, Inst. or. , 9, 2, 46) ou, parfois, pour dissimuler sa pensée jusqu'à forger des « énigmes » (Cicéron, […] Lire la suite
ANTIQUITÉ - L'Antiquité tardive
Dans le chapitre « Formes et goûts nouveaux » : […] L'architecture reste directement tributaire de l' Antiquité, mais des villes et des quartiers nouveaux naissent ou se développent, notamment là où réside l'empereur. Parmi les palais du iv e siècle, seul celui de Trèves (avec peut-être celui de Thessalonique dont l'identification reste incertaine) a laissé des vestiges significatifs, et notamment la « basilique » à nef unique se terminant par un […] Lire la suite
APOCALYPSE DE JEAN
Dans le chapitre « La mosaïque romaine » : […] L'art chrétien s'inspira très tôt des visions de l'Apocalypse. Même en Orient, où l'ouvrage était quelque peu suspect, on trouve dans la décoration des lieux de culte une atmosphère apocalyptique, qui s'exprime en particulier dans les thèmes byzantins de l' hétimasie, préparation du trône pour le retour du Christ, ainsi que dans le sujet voisin du Jugement dernier. Mais les illustrations littérale […] Lire la suite
BALDOVINETTI ALESSO ou ALESSIO (1425-1499)
L'art de Baldovinetti constitue un point de rencontre entre les deux tendances qui s'étaient affirmées dans la peinture florentine de la génération précédente, celle des coloristes et celle des dessinateurs. Il se rattache plus profondément au premier groupe, à Domenico Veneziano surtout, qui fut son maître et lui enseigna l'art des tonalités affinées par la lumière, des compositions sereines et l […] Lire la suite
BETH ALPHA
La synagogue galiléenne de Beth Alpha, découverte en 1929 (E. L. Sukenik, The Ancient Synagogue of Beth Alpha , Jérusalem, 1932), possède un pavement de mosaïque intégralement conservé. La construction appartient au troisième type des synagogues, celui dont le plan à triple nef — une nef centrale séparée des bas-côtés par deux rangées de colonnes, et terminée en une abside hémisphérique — reprend […] Lire la suite
BOISSONNET EDMOND (1906-1995)
Edmond Boissonnet, né le 20 juillet 1906 à Bordeaux, est un artiste français du xx e siècle. Son indépendance ne l’empêchera pas de suivre de près les grands courants artistiques de son temps. Après un apprentissage en sculpture sur bois à l’école des Beaux-Arts de Bordeaux, il travaille dans une entreprise de décoration. Il participe en 1929 à la fondation de la Société des artistes indépendant […] Lire la suite
BYZANCE - Les arts
Dans le chapitre « L'époque protobyzantine » : […] La mosaïque, par la somptuosité des coloris, la simplification du dessin et, surtout, le rôle joué par la lumière, convenait parfaitement à l'expression du surnaturel, et les artistes des v e et vi e siècles en perfectionnèrent la technique pour en exploiter toutes les possibilités. Les monuments conservés à Thessalonique (rotonde Saint-Georges, Hosios-David, Saint-Démétrius) et à Ravenne (maus […] Lire la suite
BYZANCE, 330-1453 (exposition)
Du marbre représentant le monstre marin rejetant Jonas sur la rive à la plaque d'orfèvrerie de l'éclatant saint Michel archange et à l'icône de l' Échelle sainte de Jean Climaque, plus de trois cents objets ont exprimé, lors de l'exposition Byzance, 330-1453 (Royal Academy of Arts, Londres, 25 octobre 2008-22 mars 2009), l'intensité, la fécondité, l'intégration à la fois dans une spiritualité ex […] Lire la suite
Voir aussi
Pour citer l’article
Jean-Pierre DARMON, Henri STERN, « MOSAÏQUE, art », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 08 mai 2022. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/mosaique-art/