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ENFERS ET PARADIS

Enfers et paradis bouddhiques

Angkor Vat: relief - crédits : H. Champollion/ AKG-images

Angkor Vat: relief

Dans le Majjimanikāya, collection d'un certain nombre de « discours du Bouddha », les tortures de l'enfer sont décrites avec précision. Certains pécheurs, attelés à de lourds chariots, parcourent une étendue de flammes ; d'autres sont forcés de se jeter la tête la première dans un chaudron d'airain bouillant ; d'autres encore sont plongés dans une rivière de feu. Les auteurs bouddhistes postérieurs ont considérablement élaboré la description des supplices. Le nombre des enfers varie : dix, treize ou deux cent cinquante-six. L'« enfer du chaudron de fer » mesure soixante lieues d'étendue, et il faut trente ans pour descendre jusqu'au fond. Dans un autre enfer, le pécheur brûle pendant 576 millions d'années. Et cependant tous ces enfers sont considérés comme « temporaires ».

Selon le Mahayana, il y a huit enfers chauds et huit enfers froids, chaque groupe étant entouré de seize enfers moindres. Parmi les huit enfers chauds, il en est un où les pécheurs s'arrachent mutuellement la chair avec des griffes de métal ; un autre où des éléphants de fer piétinent les victimes ; un troisième, dit l'« enfer de la chaleur cuisante », où les suppliciés sont réduits en cendres dans un fourneau. Dans un des enfers froids, la chair éclate et se couvre de plaies ; dans un autre, les lèvres gèlent.

Quant aux paradis, ils sont, tout comme les enfers, « temporaires », et dans le bouddhisme primitif ils ne constituaient pas le but ultime du croyant. Mais, bien que rien ne puisse se substituer à la Délivrance et au Nirvana, les cieux paradisiaques du brahmanisme ont été acceptés comme des séjours temporaires des vertueux. Les textes rédigés en pāli comportent des allusions fréquentes aux « heureux royaumes du ciel », et à des cieux spécifiques comme le « Monde de Brahmā », le ciel des trente-trois dieux dont Indra est le souverain ou le ciel Tusita, habité par le Bouddha avant de renaître sur la terre.

Mais, tout comme pour les enfers, le Mahāyāna élabora systématiquement la géographie des paradis. Les cieux sont répartis en trois régions principales, chaque région comportant un certain nombre de paradis célestes. Les six premiers, immédiatement au-dessus du monde des hommes, sont les demeures des dieux. On retrouve ici le ciel des trente-trois dieux, le ciel de Tusita, etc. Au-dessus commencent les seize cieux de Brahmā, accessibles à ceux qui ont pratiqué la méditation bouddhique. Enfin, plus haut encore, se trouvent les quatre cieux transcendantaux, où l'esprit demeure en état d'extase. Au-delà de cette région, il ne reste à atteindre que le Nirvāna.

Ce sont surtout les béatitudes des premiers paradis célestes qui ont été présentées à la dévotion populaire. Plus tard, lorsque s'est développé le culte du Bouddha Amitabha, le Bouddha de la Lumière infinie, un nouveau type de paradis a enflammé l'imagination : le « Paradis occidental », la « Terre du parfait bonheur » (Sukhavati) ou « Terre pure », située à l'ouest de notre monde, à une distance incalculable. Un texte célèbre le décrit :

 Dans ce pays, ô Sariputra, il n'y a ni peine physique ni douleur mentale. Les sources de joie y sont innombrables. C'est pourquoi ce pays est appelé Terre heureuse... Autour de lui se superposent sept voûtes emboîtées, sept rangées de rideaux précieux et sept rangées de bruyants villages. Il est orné de sept grandes terrasses, de sept rangées de palmiers, avec sept lacs couverts de lotus de toutes couleurs, aussi larges que les roues de chariot... Des oiseaux de toutes nuances y chantent la louange de la Loi. Partout y brillent les pierres précieuses et y retentit le son des cloches... Amitayus y vit entouré de ses fidèles, dont le nombre n'est pas aisé à compter...

On reconnaît pourtant dans[...]

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, professeur à l'Institut Saint-Serge de Paris
  • : professeur à l'université de Chicago

Classification

Pour citer cet article

Olivier CLÉMENT et Mircea ELIADE. ENFERS ET PARADIS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Angkor Vat: relief - crédits : H. Champollion/ AKG-images

Angkor Vat: relief

Jérusalem céleste - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Jérusalem céleste

Le Jugement universel, J. Bosch - crédits : Nimatallah/ AKG-images

Le Jugement universel, J. Bosch

Autres références

  • ACHÉRON

    • Écrit par Barbara CASSIN
    • 189 mots

    Dans la demeure d'Hadès, aux Enfers, coule l'Achéron ; par ses sonorités plus que par une stricte étymologie, il « coule » et « roule le deuil ». Circé et Homère (Odyssée, X, 512 sqq.) y font confluer le Pyriphlégéton (le fleuve « brûlant de feu ») et le Cocyte (« gémissement...

  • ÂGE D'OR

    • Écrit par Marie-Rose MAYEUX
    • 865 mots

    Moment mythique de l'humanité décrit comme étant celui de l'abondance dans une nature généreuse, où tout pousse sans travail, où les animaux domestiques et sauvages vivent en paix entre eux et avec les hommes, où la ronce distille le miel. Les Zéphirs soufflent alors une brise rafraîchissante...

  • AMIDA

    • Écrit par Vadime ELISSEEFF
    • 858 mots
    ...zen, l'amidisme eut une influence déterminante sur tous les arts qu'il teinta d'un sentiment nouveau de miséricorde et de gratitude envers le sauveur. Avec son paradis et ses enfers multiples, il offrait ample matière à des illustrations. Les plus connues sont les cortèges d'Amida (raigo), descendant...
  • CHARON

    • Écrit par Universalis
    • 145 mots

    Dans la mythologie grecque, fils de l'Érèbe et de la Nuit. Charon, le nocher des Enfers, avait pour tâche de faire traverser les marais de l'Achéron dans sa barque aux âmes des défunts qui avaient reçu une sépulture. En paiement, il prenait la pièce de monnaie placée dans la bouche...

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Voir aussi