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ESPRIT, philosophie

Le concept d'« esprit », dont la spécificité a sans cesse fluctué à travers les différentes cultures et tout au long de l'histoire des idées, semble de nos jours être pris à nouveau comme référence majeure, notamment par des biologistes, qui y voient « un mot au sens suffisamment large pour pouvoir englober toutes les réactions, des plus élémentaires aux plus évoluées, c'est-à-dire depuis les tropismes des êtres unicellulaires et les réflexes des organismes pluricellulaires aux facultés mentales les plus élaborées » (G. Lazorthes, Le Cerveau et l'Esprit, Flammarion, Paris, 1982). On évoquera ici, à travers l'histoire de la pensée, depuis l'Orient ancien et le νο̃υς grec ainsi que la mens ou l'ingenium des Latins, les moments les plus marquants de l'héritage d'un tel concept.

La philosophie orientale

Dans l'Inde ancienne, le Lankāvatārasūtra évoque un esprit correspondant à une construction mentale qui mène à la connaissance objective. Pour les Chinois de l'Antiquité, l'esprit, c'est Xin. Chez Zhuang Zhou, il se situe, en marge de la connaissance, entre l'intellect (discursif) et l'âme. On connaît mieux grâce à l'intuition qui survient après la concentration de l'attention-cœur-esprit, cette concentration produisant un vide illuminant de l'âme. Dati distingue de facto le cœur et l'esprit, tout en les disant complémentaires, en tant que formant la nature humaine et constituant une faculté supérieure par opposition à l'infériorité des sensations. Sous le vocable de pensée, on peut trouver, avec l'école meïtiste (iiie av. J.-C.), d'une part, la connaissance (rencontre entre le sujet et l'objet : la pensée et les sens), ensuite, la compréhension par l'esprit éclairant, enfin, la cogitation (la pensée sur elle-même). En général, le problème des rapports entre l'esprit et le corps a donné lieu, en Chine, à une controverse qui s'est étendue sur plusieurs siècles et qui a insisté tour à tour sur différentes conceptions de l'esprit : une illumination obtenue par un organe opérant dans la spontanéité et par jaillissement (Huineng) ; une énergie spirituelle anti-intellectualiste (école de dhyāna) ; un contenant extensible, que l'homme peut agrandir afin que la pensée ne reste pas dans les limites des sensations (Zhang Zai) ; un principe naturel actif qui n'est en liaison qu'avec la matière (Zhu Xi) ; notre conscience, qui comprend l'univers, avec un pouvoir existentialisant (Wang Shouren), etc.

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Écrit par

  • : docteur ès lettres
  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Pour citer cet article

Pierre CLAIR et Universalis. ESPRIT, philosophie [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • MATIÈRE/ESPRIT (notions de base)

    • Écrit par Philippe GRANAROLO
    • 3 374 mots

    Alors que les sagesses orientales étaient toutes « monistes » (du grec monos, « unique »), autrement dit convaincues que le réel se réduisait à une unique dimension, les premières philosophies grecques ont choisi la voie du dualisme, opposant chacune à leur manière la matière à l’esprit,...

  • ALCHIMIE

    • Écrit par René ALLEAU, Universalis
    • 13 642 mots
    • 2 médias
    ...notion d'alchimie « spirituelle » ou purement « psychologique » est aberrante, car elle méconnaît la fonction principale de l'alchimie : délivrer l'esprit par la matière en délivrant la matière elle-même par l'esprit. Cette mutuelle délivrance ne peut être accomplie que par l'art suprême,...
  • ÂME

    • Écrit par Pierre CLAIR, Henri Dominique SAFFREY
    • 6 020 mots
    ...Gassendi n'est pas loin de ces opinions ; il pense – peut-être, car l'interprétation de sa philosophie appelle nuances et prudence – à une forme animant l'esprit et le corps. Cependant, où se situerait exactement ce et ? En tout cas, Descartes, lui, sépare nettement les deux, l'union âme-corps posant...
  • ANAXAGORE (env. 500-428 av. J.-C.)

    • Écrit par Fernando GIL, Pierre-Maxime SCHUHL
    • 1 859 mots
    • 1 média
    C'est ici qu'apparaît un principe nouveau, celui qu'Anaxagore appelle le Noûs, c'est-à-dire l'Esprit, principe spontané de mouvement, de pensée, de connaissance, de vie. Subtil, mais non immatériel, il est transcendant au mélangé, infini, autarcique, et ne se mêle à rien, bien qu'il soit présent...
  • ATTENTION

    • Écrit par Éric SIÉROFF
    • 1 928 mots
    Dès l’Antiquité, les philosophes ont noté que l’esprit permet de voir les choses plus clairement ou au contraire de ne plus les remarquer. De même, Descartes note qu’une idée apparaît plus claire et distincte quand l’attention se dirige vers elle. Au xixe siècle, David Ferrier, un neurophysiologiste...
  • Afficher les 39 références

Voir aussi