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ALCALOÏDES

Les alcaloïdes représentent un ensemble de molécules d'origine naturelle, renfermant du carbone, de l'hydrogène et, plus spécialement, de l'azote. La plupart possèdent une activité biologique marquée qui a suscité de longue date un intérêt thérapeutique. Leur dénomination – de l'arabe al kali (qui a donné « alcali ») et du grec ἐ͂ιδος (forme) – fait référence à leur caractère « alcalin » ou « basique ».

En fait, les alcaloïdes forment un groupe hétérogène, du point de vue tant de la structure et des propriétés chimiques que des effets biologiques qu'ils manifestent, et dont il est impossible de donner une définition satisfaisante. Représentant les principes actifs de nombreuses plantes médicinales ou toxiques connues parfois depuis l'Antiquité, ils ont joué un rôle important dans la découverte des médicaments chimiques (morphine, quinine, cocaïne, atropine...) et dans le développement de l'industrie pharmaceutique en France à la fin du xixe siècle. Cela ne les empêche pas d'être encore d'actualité en thérapeutique et de constituer d'importants réactifs biologiques.

On admet selon M.-M. Janot que, pour être rangée parmi les alcaloïdes, une substance doit répondre à cinq critères : rattachement aux molécules organiques, présence d'azote, formation de sels, activité physiologique, obtention de dérivés insolubles avec certains réactifs dits « réactifs généraux des alcaloïdes ». La formation de sels n'est pas rigoureusement respectée : ainsi la caféine et la colchicine, non salifiables, sont cependant assimilées aux alcaloïdes par la plupart des chimistes.

Leur domaine, longtemps limité au règne végétal, s'est élargi aux animaux terrestres ou marins et à divers micro-organismes, grâce aux progrès de la chimie des substances naturelles. On tend également à y rattacher leurs dérivés possédant des propriétés comparables.

Les noms usuels attribués aux alcaloïdes évoquent le plus souvent l'organisme d'origine (atropine, d'Atropa belladona), parfois leur activité (émétine vomitive). Ils se terminent par le suffixe -ine comme presque tous les produits naturels.

Historique

C'est au début du xixe siècle que les chimistes se sont aperçus que les plantes renferment des substances à réaction alcaline (jusque-là, seuls des produits acides ou neutres avaient été caractérisés), mises en évidence à l'aide de colorants naturels (tournesol, sirop de violette). Le premier « alcali végétal » isolé à l'état défini fut la morphine de l'opium, décrite en 1817 par F. W. Sertürner sous le nom primitif de « morphium » après avoir été entrevue en 1804 par A. Seguin. La même année apparurent la narcotine ou noscapine (opium), l'émétine (ipéca) et la strychnine (noix vomique), ce qui conduisit W. Meissner, en 1819, à forger le mot « alcaloïde » pour désigner ce nouveau type de produits. Les découvertes stimulèrent beaucoup les chimistes, et, en 1833, on en connaissait déjà une quinzaine. Le fait est remarquable si on considère les moyens et les connaissances de l'époque, mais il l'est aussi dans la mesure où étaient ainsi mis en évidence les premiers « principes actifs » des plantes utilisées en médecine, ouvrant la voie à un emploi plus rationnel des médicaments. On ne peut passer ici sous silence le nom de deux pharmaciens français, P. J.  Pelletier et J. B.  Caventou, qui sont à l'origine de la découverte de la quinine en 1820.

Bien que le terme « alcaloïde », aujourd'hui classique, ait été assez peu utilisé au xixe siècle au profit d'« alcali végétal », « base végétale », puis « alcali organique », de nombreuses substances s'y rapportant ont été isolées, surtout dans la seconde moitié du xxe siècle, grâce aux[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-Sud, Centre d'études pharmaceutiques de Châtenay-Malabry

Classification

Pour citer cet article

Jacques E. POISSON. ALCALOÏDES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Dicotylédones produisant des alcaloïdes - crédits : Encyclopædia Universalis France

Dicotylédones produisant des alcaloïdes

Alcaloïdes d'origine animale - crédits : Encyclopædia Universalis France

Alcaloïdes d'origine animale

Alcaloïdes d'origine végétale - crédits : Encyclopædia Universalis France

Alcaloïdes d'origine végétale

Autres références

  • ACONITINE

    • Écrit par Philippe COURRIÈRE
    • 374 mots

    L'aconit, renonculacée, se récolte, en France notamment, dans les régions marécageuses et en montagne. Pour extraire l'aconitine, la racine séchée et pulvérisée est épuisée par une solution alcoolique d'acide tartrique ; on élimine l'alcool par distillation, on met le tartrate d'aconitine en solution...

  • ANESTHÉSIE

    • Écrit par Francis BONNET, François CHAST
    • 4 117 mots
    • 2 médias
    En 1860, à Göttingen, Albert Niemann (1834-1861) isola, à partir d'un extrait de feuilles de coca, un alcaloïde qu'il baptisa cocaïne et qui fut considéré comme un simple stimulant, voisin de la caféine. À Vienne, Carl Koller et Sigmund Freud avaient constaté que les cristaux de cocaïne...
  • ATROPINE

    • Écrit par Universalis
    • 415 mots

    Substance cristalline, toxique, appartenant à la classe des alcaloïdes. On l'obtient à partir de la L-hyociamine qui est un composant de plantes de la famille des Solanaceae telles que la belladone (Atropa), la jusquiame et le datura. Elle est très soluble dans l'eau. Elle forme une série...

  • BELLADONE

    • Écrit par Philippe COURRIÈRE
    • 377 mots

    De la famille des solanacées, la belladone (Atropa belladona) est une plante annuelle, vivace, pouvant atteindre un mètre de hauteur. On en utilise les feuilles, cueillies au moment de la floraison car la teneur en principes actifs y est la plus forte, ainsi que la racine, ramassée en automne...

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Voir aussi