ISLAM (Histoire) Le monde musulman contemporain
Afrique noire
À la fin du xxe siècle, cent vingt millions de musulmans vivaient au sud du Sahara, soit le huitième de la umma (communauté des croyants) mondiale. Cette Afrique noire islamisée dessine une bande transversale, du Sénégal à la Somalie, avec un prolongement le long de l'océan Indien, qui correspond aux zones touchées depuis plus d'un millénaire par le commerce musulman, vecteur essentiel de l'islamisation. Le phénomène islamique se limite donc au quart de l'Afrique noire et au tiers de sa population environ. Le reste du continent échappe à son emprise.
L'Afrique noire ne s'est jamais complètement débarrassée de l'image de terre de magie et d'esclaves portée sur elle par les Arabes, et cette image a nourri des représentations négatives sur l'orthodoxie de son islam, pourtant rattaché de longue date au sunnisme malikite. L'identité musulmane en Afrique noire représente donc un triple effort d'affirmation : face à l'Afrique non musulmane, face au monde arabe et face à la civilisation occidentale.
Le temps de la colonisation
Paradoxalement, la colonisation européenne contribue à un renforcement des positions musulmanes. Les transformations (réquisitions de main-d'œuvre, routes, chemins de fer) ébranlent alors les cultes du terroir et fraient la voie à une adhésion plus large à l'islam, vécu comme une religion d'Africains, comme une fraternité pour les déracinés et comme une foi mondiale capable de supporter la comparaison avec celle du colonisateur. Plus encore qu'à l'époque antérieure sonne l'heure des confréries, organisations regroupées autour de familles réputées saintes.
Au Sénégal, la Tijāniyya d'al-Hājj ‘Umar (env. 1797-1864), conquérant musulman, acquiert des positions majoritaires, à travers les zawiya de Tivaouane, dirigée par les Sy, et de Kaolack, plus moderniste, dirigée par les Nyass. Mais le phénomène le plus significatif est l'expansion de la confrérie mouride, au début du xxe siècle, autour d'Ahmadou Bamba (env. 1850-1927), un mystique, longtemps déporté et persécuté par les Français. Le mouridisme, qui a bâti sa fortune sur l'exploitation intensive de l'arachide, est devenu une sorte d'État dans l'État, avec lequel le pouvoir doit régulièrement négocier. Les confréries sénégalaises, cadres de substitution aux anciens États de la région, offrent un refuge aux populations qui ne sont plus exposées directement aux exigences de l'administration mais disposent, à travers elles, de médiateurs.
Dans le Nigeria du Nord, la Qādiriyya, à laquelle appartenaient les fondateurs du califat de Sokoto, créé au début du xixe siècle, est réorganisée, vers 1937, par Malam Nasiru Kabara et mise à la portée des simples fidèles par différents rituels collectifs. C'est un moyen pour elle de faire face à la compétition de la Tijāniyya, qui trouve un nouvel essor avec l'adhésion, peu avant la Première Guerre mondiale, de l'émir ‘Abbās de Kano, puis, en 1937, du nouvel émir, Abdullahi Bayero, auprès du cheik Ibrahim Nyass, de Kaolack. Ainsi naît un puissant foyer tijānī-nyassene, qui prend son essor après la Seconde Guerre mondiale et rayonne sur les pays voisins.
Au Soudan, après une première réaction « islamiste », celle du mahdisme (1881-1898), dirigée contre l'occidentalisation, les confréries deviennent la structure ordinaire de l'islam soudanais, notamment la Mirghāniyya (ou Khatmiyya), pro-égyptienne, implantée dans le nord-est du pays, tandis que les héritiers du mahdisme se transforment à leur tour en « confrérie ». Les Britanniques mènent dans le Soudan du Nord une politique favorable à l'islam, s'appuyant d'abord sur la Khatmiya, puis sur les mahdistes eux-mêmes, et renforçant ainsi le poids de ces organisations.
En Somalie, le phénomène le plus spectaculaire est marqué par le développement de la Sālihiya, dont le représentant, Muhammad ‘Abdallah Hasan, qualifié par les Britanniques de « Mad Mullah », mène de 1899 à 1920 une résistance énergique contre les Italiens et les Anglais, devenant ainsi une figure nationale de l'histoire somalienne.
Le temps des indépendances
Les indépendances, dominées par des idéologies sécularisatrices et conduites par des élites formées à l'occidentale, représentent une période de basses eaux islamiques. L'islam apparaît alors comme une tradition archaïsante et féodale.
La seule exception majeure est la tentative menée par de jeunes arabisants « réformistes », qui essaient de promouvoir à leur retour d'al-Azhar, dans les années 1950, un enseignement islamique rénové dans plusieurs régions du Mali, de la Côte d'Ivoire et de la Guinée. Au Sénégal, un intellectuel formé à l'école des oulémas réformistes d'Algérie, Cheikh Touré, remet lui aussi en question l'islam traditionnel. Ces initiatives convergent dans une Union culturelle musulmane (1953), dont la tonalité principale est anticolonialiste. Mais la radicalisation du courant azharite, qui débouche sur des conflits ouverts pour le contrôle des mosquées, entraîne la répression de l'administration et la réaction des milieux traditionnels. Les plus militants évoluent vers des positions wahhabites, sous l'influence des pèlerins revenus de La Mecque : hostilité à l'égard des confréries et des marabouts, constitution de communautés séparées, refus de l'occidentalisation. Ces manifestations ne pèsent guère sur le champ politique.
Au Soudan, pays africain à dominante musulmane et arabophone, les conditions sont différentes. En février 1945, les mahdistes créent le parti Umma, tandis que la Khatmiya donne naissance, en juin 1956, au People's Democratic Party. Ces formations constituent deux pôles majeurs dans la vie politique agitée du pays.
Le temps de la fierté islamique
La crise des indépendances entraîne, sur fond de sécheresse aggravée, des retrouvailles entre pays arabes et africains, que la colonisation européenne avait cherché à séparer. Le choc pétrolier (1971-1974) et la guerre du Kippour (1973) confèrent au monde arabe une audience internationale nouvelle. Par solidarité, les pays d'Afrique noire rompent massivement leurs relations diplomatiques avec Israël, dans l'espoir non dissimulé de bénéficier de la manne pétrolière. Les pays musulmans adhèrent à l' Organisation de la Conférence islamique (sommet de Lahore, 1974). L'Afrique noire est ainsi exposée à l'action concurrente des différents pays arabes, qui utilisent l'islam comme un vecteur de leur politique internationale. Cette présence arabe, principalement saoudienne, qui se révèle décevante sur le plan économique, entraîne, en revanche, une forte réactivation de l'islam africain. Bourses d'étudiants, constructions de mosquées et d'écoles contribuent à lui donner une plus grande visibilité. La révolution islamique iranienne de 1979 constitue un second temps d'accélération. L'engouement pour l'« utopie islamique » devient alors l'un des faits dominants.
Au Sénégal, ce n'est pas la question du pouvoir d'État qui est posée, mais celle d'une « socialisation islamique », diffusée par un réseau dense d'associations, d'écoles et de journaux. Les militants les plus radicaux s'en prennent au principe de la laïcité. Le Code de la famille (notamment l'égalité juridique de la femme) constitue un autre terrain d'affrontement.
Au Nigeria, la Muslim Students' Society et le mouvement wahhabite Izala, apparu en 1978, sont les principaux viviers de l'activisme islamique, animé surtout par des élèves et des étudiants. Dans ce pays, géant démographique (plus de 130 millions d'habitants dans les années 2000, dont la moitié de musulmans), les militants islamiques réclament l'application de la charia, la rupture des relations diplomatiques avec le Vatican et Israël... Les musulmans hausa du Nord, héritiers du califat de Sokoto, plus dogmatiques, cherchent à préserver ce qu'ils appellent le « saint Nord » et s'opposent au prosélytisme des nouvelles missions chrétiennes. Les musulmans yoruba de l'Ouest représentent une sensibilité plus moderniste. Les confréries restent en tout cas très présentes sur la scène islamique locale face aux différents groupes islamistes. Un courant pro-iranien, qualifié de « Shia » (allégeance plus politique que doctrinale), représente une forme plus récente de radicalisme dans le paysage complexe de l'activisme islamique nigérian.
Au Soudan, la référence islamique, maniée dès 1983 par le général Nimayri (lois sur la charia), a ouvert la voie à une minorité islamiste urbaine et instruite, le Front national islamique, qui a pris le pouvoir en juillet 1989 au moyen d'un putsch mené avec l'aide des militaires.
La recherche d'une nouvelle identité
La vague islamiste a donc atteint un sommet. L'islam est devenu une référence indispensable dans le discours de légitimation des pouvoirs. Cependant, les développements sont fort inégaux, entre les « révolutions démocratiques » du Mali ou du Niger, qui ne « parlent pas islamique », et la « révolution islamiste », de type « frère musulman », du Soudan.
L'émergence d'une contre-élite arabisante, formée dans les universités arabes ou africaines, tend à faire de l'éducation un enjeu. La langue arabe devient l'outil idéologique d'une catégorie sociale qui marque ainsi sa distinction radicale par rapport à l'ancienne culture des colonisateurs. Cependant, l'idéal de nombre d'arabisants reste l'obtention d'un « savoir certifié » dans le système occidental : diplômés d'arabe, originaires d'Afrique francophone, qui viennent compléter leurs études dans les universités françaises, ou universitaires nigérians qui ont souvent reçu sur place leur légitimité académique.
Plus que l'émergence encore précaire d'un islam politique, c'est une « révolution culturelle » qui s'opère, et qui, par une multitude de brochures et de cassettes, tend à affirmer une nouvelle identité africaine-islamique, par-delà les frontières d'États à la légitimité incertaine. L'affirmation de cette identité souffre cependant, au tournant du siècle, des menées violentes de petits groupes extrémistes qui ternissent l'image d'un islam africain désireux de se montrer pacifique et rassembleur au sein de jeunes nations fragiles. Ainsi, au Mali, en 1994, l'armée doit affronter des factions touarègues, notamment le Front islamique armé de l'Azawad ; les accrochages font un millier de morts et deux cent mille exilés. Dans le nord du Nigeria, des musulmans fondamentalistes s'attaquent, en 1991, à des chrétiens (plusieurs centaines de victimes) ; de semblables heurts se renouvellent dans la même région, au début des années 2000, sous prétexte de blasphème contre l'islam dans la presse ou d'injuste répartition des terres. À Addis-Abeba, capitale de l'Éthiopie, un attentat perpétré en 1995 contre le président égyptien Hosni Moubarak est attribué à un commando islamiste venu du Soudan voisin, pays déchiré de 1983 à 2005 par une guerre civile entre le Nord musulman et le Sud chrétien et animiste. Le 7 août 1998, deux attentats frappent simultanément les ambassades américaines de Nairobi (Kenya) et de Dar es-Salam (Tanzanie) : les enquêteurs pensent reconnaître dans ce coup double la main d'Oussama ben Laden. De même, à Mombasa, port kenyan sur l'océan Indien, deux attentats anti-israéliens perpétrés en 2002 sont revendiqués par l'Armée de Palestine, organisation inconnue derrière laquelle se cacherait le réseau terroriste Al-Qaida. Ces actions criminelles font du tort à un islam d'Afrique noire soucieux de consolider la fraternité de l'umma en tenant compte des enjeux nationaux, continentaux et planétaires.
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Écrit par
- Françoise AUBIN : directeur de recherche au C.N.R.S. et à la Fondation nationale des sciences politiques (C.E.R.I)
- Olivier CARRÉ : docteur ès lettres et sciences sociales, directeur de recherche à la Fondation nationale des sciences politiques
- Nathalie CLAYER : chargée de recherche au C.N.R.S.
- Andrée FEILLARD : chercheur au C.N.R.S.
- Marc GABORIEAU : directeur de recherche au C.N.R.S., directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales
- Altan GOKALP : chargé de recherche de première classe au C.N.R.S., responsable de l'équipe cultures populaires, Islam périphérique, migrations au laboratoire d'ethnologie de l'université de Paris-X-Nanterre, expert consultant auprès de la C.E.E. D.G.V.-Bruxelles
- Denys LOMBARD : directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales
- Robert MANTRAN : membre de l'Institut, professeur émérite à l'université de Provence-Aix-Marseille-I
- Alexandre POPOVIC : directeur de recherche émérite au C.N.R.S.
- Catherine POUJOL : docteur en histoire orientale, maître de conférences à l'Institut national des langues et civilisations orientales
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