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TITIEN (1488 env.-1576)

Lorsqu'en 1590 Paolo Lomazzo déclarait : « Comme l'éclat du Soleil l'emporte sur la lumière des étoiles, Titien resplendit plus que tous les autres peintres non seulement d'Italie mais du monde entier », l'écrivain consacrait une renommée qui reposait sur un vaste consensus et sur le sentiment d'acheteurs faisant autorité, ainsi que de maisons princières et royales. Titien représente un des sommets de la peinture de la Renaissance ; il élève le langage de la tradition picturale de Venise, fondé sur la couleur, à une capacité expressive très haute, qui portera ses fruits, à travers l'œuvre des grands peintres du xviie siècle, Rubens et Velázquez, et jusqu'à l'impressionnisme, sur l'évolution de la peinture européenne.

<it>Portrait de Caterina Cornaro</it>, Titien - crédits : Nimatallah/ AKG-images

Portrait de Caterina Cornaro, Titien

Sa longue activité, qui se déploie durant les trois premiers quarts du xvie siècle, est inspirée par le souci de retrouver les modèles antiques, qui lui permettent d'exalter l'homme en tant que protagoniste de l'histoire et d'en arriver à la constatation de la fragilité de l'homme aux prises avec les forces obscures de l'âme et du cosmos ; aussi a-t-on – à juste titre – comparé Titien à Shakespeare.

Le peintre des princes

Titien (Tiziano Vecellio) naquit à Pieve di Cadore vers 1488-1490, ainsi que permettent de le préciser les reconstructions ; en effet, on le trouve, en 1508, occupé à la décoration du Fondaco dei Tedeschi à Venise, alors que, selon le témoignage de ses contemporains Dolce (1557) et Vasari (1568), il n'a pas encore vingt ans. Il acquit les premiers rudiments du métier dans l'atelier de Gentile Bellini et de Sebastiano Zuccato ; mais l'esprit du jeune homme se tourna vers les exemples les plus hauts et les plus riches du renouveau contemporain, les œuvres de Giovanni Bellini et de Giorgione. La mort prématurée de celui-ci fit de Titien son héritier spirituel, appelé ainsi à compléter les œuvres que le maître avait laissées inachevées ; cette situation devait entraîner de graves problèmes pour la discrimination de ce qui revient à chacun des deux peintres.

Portrait de l'Arétin, Titien - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Portrait de l'Arétin, Titien

La renommée de Titien attira l'attention d'acheteurs appartenant à la noblesse, ce qui lui fournit l'occasion de fréquenter les cours de Ferrare et de Mantoue. D'une certaine Cecilia, qu'il épousa en 1525 et qui mourut en 1530, il eut trois enfants, Pomponio et Orazio, qui devinrent peintres, et Lavinia. En 1527, il se lia d'une profonde amitié avec l'Arétin et Sansovino, qui s'étaient réfugiés à Venise à la suite du sac de Rome. En 1530 et 1533, il se rendit à Bologne pour faire le portrait de Charles Quint, ce qui marqua le début de ses rapports avec la cour d'Espagne, pour laquelle il devait beaucoup travailler, laissant notamment de nombreux portraits de l'empereur. Après un bref séjour à Urbin, il gagna Rome en 1545, où il reçut un accueil chaleureux. La protection de Charles Quint, qui le nomma comte et chevalier, puis le fit venir à Augsbourg en 1548 pour y peindre les portraits de princes et d'électeurs convoqués à la Diète, consacra alors la réputation de l'artiste. À peine dix années plus tard, dans son dialogue sur la peinture intitulé l'Aretino, Dolce opposait au mythe de Raphaël et de Michel-Ange le génie de Titien. Après un second voyage à Augsbourg, le maître s'installa en 1551 à Venise, où il travailla intensément, luttant avec ténacité, même auprès de princes et de rois, pour obtenir la rémunération de ses commandes. Il mourut dans sa maison des Birri, tandis que la peste dévastait la région.

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Écrit par

  • : directeur au Centre international d'éducation artistique, U.N.E.S.C.O.

Classification

Pour citer cet article

Anna PALLUCCHINI. TITIEN (1488 env.-1576) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

<it>Portrait de Caterina Cornaro</it>, Titien - crédits : Nimatallah/ AKG-images

Portrait de Caterina Cornaro, Titien

Portrait de l'Arétin, Titien - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Portrait de l'Arétin, Titien

<it>Vénus endormie</it>, Giorgione - crédits :  Bridgeman Images

Vénus endormie, Giorgione

Autres références

  • AMOUR

    • Écrit par Georges BRUNEL, Baldine SAINT GIRONS
    • 10 182 mots
    • 5 médias
    ...artistes de la Renaissance et de l'époque classique n'avaient qu'à suivre les modèles et les traditions de l'Antiquité. En 1518-1519, Titien peignit pour Alphonse d'Este un tableau, La Fête de Vénus, aujourd'hui au Prado : une effigie de la déesse se dresse à droite de la scène...
  • ANATOMIE ARTISTIQUE

    • Écrit par Jacques GUILLERME
    • 8 926 mots
    • 7 médias
    ...de onze grandes planches d'études anatomiques et de dessin gravées sur cuivre... ce qui n'éclaire pas la question ! On a récemment avancé que le grand Titien lui-même avait pu participer à l'ouvrage. Il a effectivement pratiqué la gravure sur bois de 1508 à 1568. A. Caro évoque au xvie siècle...
  • ARÉTIN L' (1492-1556)

    • Écrit par Paul LARIVAILLE
    • 3 064 mots
    • 1 média
    ...sainte, simplifiée et traduite en une succession de fresques hautes en couleur présentant des affinités certaines avec les compositions picturales de Titien. L'oubli dans lequel elles ont sombré par la suite s'explique non seulement par les interprétations souvent peu orthodoxes qu'on y trouve des Écritures...
  • BIOGRAPHIES D'ARTISTES

    • Écrit par Martine VASSELIN
    • 2 389 mots

    La vie d'artiste est un genre littéraire d'une grande ancienneté, abondamment illustré depuis la Renaissance. On en fait remonter l'origine aux commentateurs de Dante qui ont élucidé et développé la mention lapidaire des noms de Cimabue et de Giotto insérée dans la Divine...

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Voir aussi