NEUROVÉGÉTATIF SYSTÈME

Le système neurovégétatif de l'homme, appelé également système « autonome, viscéral ou involontaire », se définit par son rôle et par son organisation anatomo-physiologique. Ses prolongements périphériques sont distribués à tous les organes et tissus situés à l'intérieur du corps ; il innerve les viscères (cœur, vaisseaux, tube digestif, etc.), leurs muscles et les glandes. Il joue un rôle de régulation et de coordination des fonctions dites végétatives, et intervient dans la plupart des activités métaboliques. Le résultat ultime de toute l'activité du système nerveux végétatif est « le maintien de la constance du milieu intérieur » (Claude Bernard, 1878), ou encore de « l'homéostasie de l'organisme » (Cannon, 1929). Il commande aux phénomènes végétatifs qui accompagnent tout comportement, qu'il s'agisse des adaptations végétatives (cardiovasculaires, respiratoires, etc.) qui sont nécessaires à toute dépense motrice, ou des signes visibles (vasodilatation cutanée, sudation, etc.) des comportements dits « affectifs » ; enfin, il sollicite le système nerveux commandant la vie de relation lorsque les régulations végétatives sont débordées (disparition de certaines réserves, accumulation de déchets) pour mettre en jeu des comportements liés aux « besoins primaires » (recherche et ingestion d'aliments, d'eau, de sels ; fonctions excrémentielles ; recherche du partenaire sexuel).

Le système nerveux végétatif (S.N.V.) se différencie ainsi, par son rôle, de l'autre grande subdivision du système nerveux, le système somatique, encore appelé système de la vie de relation ou système cérébro-spinal, qui comprend essentiellement les systèmes de la sensibilité, les systèmes de la motricité squelettique et les centres nerveux qui intègrent la sensorimotricité. Il s'en différencie également du point de vue de l'organisation anatomo-physiologique : on étudiera cette organisation au niveau périphérique et à celui des différents étages du système nerveux central ; le centre végétatif de commande le plus important est l'hypothalamus ; ses relations neurovasculaires avec l'hypophyse en font le point de départ des régulations de toutes les réactions neuro-endocriniennes. Les mécanismes de transmission au niveau des relais variés du S.N.V. utilisent soit des «  neurotransmetteurs chimiques » (acétylcholine, noradrénaline), soit des « neurohormones » (hormones de libération hypothalamo-hypophysaires) ; les études biochimiques de la transmission ont été beaucoup plus faciles et précoces dans le cas du S.N.V. que dans celui du système somatique.

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On exposera ici de façon analytique l'organisation anatomo-chimique de la périphérie, des centres de commande et des afférences végétatives. Un second chapitre indiquera les lois de fonctionnement du S.N.V. et ses rapports avec le système de la vie de relation.

Les systèmes effecteurs périphériques

Système neurovégétatif - crédits : Encyclopædia Universalis France

Système neurovégétatif

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Deux systèmes distincts, le système orthosympathique (O.S.) et le système parasympathique (P.S.), caractérisés par leur organisation anatomique et la nature des neurotransmetteurs décelés au niveau des relais synaptiques, innervent les viscères et les glandes. On étudiera leur disposition anatomique puis leurs caractéristiques biochimiques.

Disposition anatomique

Système orthosympathique

Organisation au niveau d'un métamère

L'effecteur orthosympathique est constitué par deux neurones successifs : un premier neurone préganglionnaire myélinisé continué par un second neurone postganglionnaire amyélinisé. Ils s'articulent au niveau d'un ganglion situé en dehors de la moelle.

Les corps cellulaires (péricaryon) des neurones préganglionnaires sont situés dans la zone grise intermédio-latérale de la moelle. Leur axone se termine et s'articule avec le péricaryon du neurone postganglionnaire, soit au niveau des ganglions de la chaîne sympathique paravertébrale, soit au niveau de ganglions situés plus périphériquement (dans l'abdomen par exemple, près des viscères), les ganglions des plexus (ganglions cœliaque, hypogastriques, mésentériques).

Innervation sympathique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Innervation sympathique

Selon le cas, le trajet de l'axone préganglionnaire est différent. Dans le premier cas (, en A), l'axone quitte la moelle par la racine rachidienne antérieure, emprunte un rameau nerveux qui le mène au ganglion paravertébral : le rameau communicant blanc (blanc parce que les axones sont myélinisés) ; il s'articule au niveau de ce ganglion avec la fibre postganglionnaire qui rejoint le nerf mixte fait de fibres afférentes et efférentes cérébro-spinales, par un rameau communicant gris (gris parce que ces axones postganglionnaires sont amyélinisés) ; ce nerf mixte renfermant maintenant des fibres orthosympathiques, fibres afférentes sensitives et fibres efférentes motrices, se dirige vers les parties périphériques du corps, les membres par exemple. Les fibres efférentes orthosympathiques, dans ce cas, vont innerver principalement les effecteurs sous-cutanés : les muscles lisses des vaisseaux, les glandes sudoripares ou sébacées de la peau. Dans le second cas (, en B) l'axone préganglionnaire emprunte encore la racine antérieure et le rameau communicant blanc, mais il traverse le ganglion paravertébral, et se rend à des ganglions situés près des viscères, les ganglions de plexus ou paraviscéraux, où il s'articule avec le neurone postganglionnaire qui dans ce cas innerve les principaux viscères.

Topographie générale
Effecteurs orthosympathiques et parasympathiques - crédits : Encyclopædia Universalis France

Effecteurs orthosympathiques et parasympathiques

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En principe, cette disposition devrait se reproduire au niveau de chaque métamère comme pour les neurones de la motricité. Des remaniements au cours de l'évolution et de l'embryogenèse, il est résulté une systématisation beaucoup plus complexe dont les traits essentiels sont schématisés dans la figure. Les neurones préganglionnaires n'existent qu'au niveau de la moelle thoracique et lombaire. La chaîne ganglionnaire paravertébrale est représentée par un ganglion pour chaque métamère depuis la moelle cervicale jusqu'à la moelle sacrée, mais au niveau cervical n'existent que trois gros ganglions : ganglion étoilé, ganglions cervicaux moyen et supérieur. Au niveau de chaque métamère peuvent exister simultanément les dispositions (A) et (B) décrites ci-dessus ; elles sont respectivement schématisées à gauche et à droite de la moelle dans le bas de la figure. Une seule fibre préganglionnaire s'articule, non pas avec une, mais avec plusieurs fibres postganglionnaires (de 10 à 30) : en effet, elle bifurque souvent, les branches remontant et descendant dans la chaîne paravertébrale pour s'articuler avec des neurones postganglionnaires de ganglions voisins ; inversement, un ganglion préviscéral de plexus reçoit de nombreuses fibres préganglionnaires (cf. par exemple l'innervation digestive). Cette disposition anatomique explique la diffusion des effets sympathiques, l'action en masse de ce système dans certaines circonstances. Ce dernier aspect est renforcé par un dispositif anatomique très spécial : un certain nombre de neurones préganglionnaires thoraco-lombaires s'articulent avec des neurones postganglionnaires qui se sont transformés en cellules chromaffines, agglomérées en une glande, la médullosurrénale, sécrétant l'adrénaline (A) et la noradrénaline (NA) ; ces hormones libérées dans le sang lors de toute excitation sympathique vont renforcer les actions locales des fibres postganglionnaires.

Cette organisation du système orthosympathique a été établie soit par des techniques histologiques dans des études de dégénérescence, après section des neurones pré- ou postganglionnaires, soit par une méticuleuse étude pharmacologique de Langley, utilisant le fait que la nicotine, appliquée en des points variés des trajets orthosympathiques décrits ici, ne bloque la transmission des messages qu'au niveau des articulations entre fibres préganglionnaires et postganglionnaires.

Système parasympathique

Le système parasympathique n'existe qu'au niveau crânien et sacré (, zones tramées et traits interrompus). Les neurones préganglionnaires quittent le tronc cérébral ou la moelle en accompagnant certains nerfs crâniens ou les racines rachidiennes antérieures sacrées, et gagnent la périphérie soit avec les nerfs mixtes de la région soit par des filets nerveux spéciaux mais toujours sans relation avec la chaîne paravertébrale orthosympathique. Leur articulation avec les neurones postganglionnaires a lieu dans des ganglions situés à proximité ou à l'intérieur des viscères ; le neurone postganglionnaire est toujours très court.

Au niveau crânien : les péricaryons pré-ganglionnaires situés au voisinage des nerfs moteurs oculaires (IIIe paire), faciaux (VIIe paire), glossopharyngiens (IXe), et pneumogastriques (Xe), vont après relais innerver les glandes salivaires et lacrymales, l'iris, le myocarde, la partie supérieure du tube digestif. Au niveau sacré : le parasympathique innerve les organes génitaux externes (nerf érecteur), les organes urinaires (paroi vésicale et sphincters), le rectum et le sphincter anal.

Innervation des viscères

La plupart des viscères ont une innervation double, comme le montre le tableau, dans lequel sont indiqués les effets des terminaisons orthosympathiques et parasympathiques au niveau de chaque organe.

Réponses des organes effecteurs à des messages végétatifs - crédits : Encyclopædia Universalis France

Réponses des organes effecteurs à des messages végétatifs

Réponses des organes effecteurs à des messages végétatifs - crédits : Encyclopædia Universalis France

Réponses des organes effecteurs à des messages végétatifs

Les transmetteurs chimiques

C'est au niveau des jonctions végétatives que l'on a découvert et réussi à élucider les mécanismes de transmission chimique. En effet, l'expérimentateur disposait, au niveau des ganglions végétatifs et des jonctions neuro-effectrices, de conditions anatomiques plus favorables qu'au niveau des relais synaptiques cérébro-spinaux : ces jonctions sont périphériques, individualisées et non enfouies dans le tissu névraxique ; il est possible de les perfuser et de rechercher dans le perfusat l'apparition de substances libérées au moment de la transmission nerveuse. On connaissait d'autre part depuis longtemps, de façon pragmatique, toute une série de drogues susceptibles d'affecter les réponses végétatives, et certaines de ces substances (ou des parents chimiques) pouvaient être soupçonnées d'être des transmetteurs. Il y a donc lieu, après avoir indiqué très schématiquement le résultat final de toutes ces recherches, de rappeler succinctement l'historique de ces découvertes qui ont ouvert un grand chapitre de la neurophysiologie, celui de la transmission chimique, pour exposer enfin les mécanismes de la transmission adrénergique et cholinergique.

Historique

Expérience de Loewi - crédits : Encyclopædia Universalis France

Expérience de Loewi

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La suggestion d'une transmission de nature chimique au niveau des synapses nerveuses a été émise la première fois par Elliot en 1905. Une démonstration expérimentale de cette hypothèse a été donnée par les expériences de O. Loewi (1921) et par W. B. Cannon et Uridil (1921). Loewi utilisait un dispositif, schématisé sur la figure, qui lui permettait de perfuser un premier cœur d'amphibien isolé mais muni de son innervation, puis de faire passer le perfusat sortant de ce cœur dans un second cœur isolé afin d'observer les effets de la stimulation des nerfs du premier cœur sur celui-ci d'abord et sur le second ensuite. Les deux cœurs battent spontanément en raison de l'automatisme cardiaque ; la stimulation des nerfs vagues (parasympathiques) du premier provoque son ralentissement et même son arrêt ; bientôt, le second se ralentit également. La stimulation des nerfs sympathiques du premier cœur entraîne son accélération, et bientôt le second cœur s'accélère également. L'unique explication possible était de postuler la sécrétion de substances ralentissantes (Vagusstoff) dans le premier cas, de substances accélératrices  

(Acceleranzstoff) dans le second cas, substances libérées aux terminaisons nerveuses et passant dans le perfusat. L'expérience de Cannon et Uridil, bien que plus complexe puisqu'elle fut pratiquée sur un mammifère, obligeait à des conclusions semblables : la stimulation des nerfs du foie entraîne une accélération du cœur in situ mais totalement énervé ; la substance responsable, libérée aux terminaisons sympathiques stimulées, fut appelée la « sympathine ».

L'identification des substances impliquées fut aidée par les connaissances déjà acquises auparavant sur les effets soit parasympathiques soit sympathiques de diverses drogues ou composés biologiques.

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En ce qui concerne le parasympathique, H. H. Dale avait, dès 1914, conduit une étude détaillée des effets pharmacologiques de l' acétylcholine ; il avait été frappé par la similitude des actions de cette drogue et des stimulations des nerfs parasympathiques, ce qui l'avait amené à introduire le terme d'effets parasympathomimétiques. Dès 1926, Loewi et Navratil, grâce à des méthodes de dosage biologique, apportaient des arguments en faveur d'une identification de la substance « ralentissante » à l'acétylcholine (ACh).

En ce qui concerne l'orthosympathique, l'identification de la « sympathine » passa par plusieurs étapes. On connaissait depuis le début du siècle les effets d'extraits de la médullo-surrénale et on en avait isolé l'adrénaline (Oliver et Schaeffer, 1895 ; Takamine, 1901). Pendant toute une période, la « sympathine » fut identifiée avec l'adrénaline bien que l'on sache que certaines substances voisines du groupe catéchol, la noradrénaline en particulier, imitent plus exactement tous les effets de la stimulation orthosympathique que l'adrénaline (Barger et Dale, 1910). Différentes théories adjuvantes furent proposées, en particulier celles des deux sympathines E et I, excitatrice et inhibitrice (Cannon et Rosenblueth, 1933 ; Bacq, 1934). La preuve définitive que la substance libérée au niveau des terminaisons sympathiques est la noradrénaline fut donnée par Euler (1946, 1959) qui reçut en 1970 le prix Nobel pour ses travaux sur la transmission chimique. Enfin, plus récemment, une technique d'histofluorescence, introduite par Falck (1962), permit de visualiser les neurones et les terminaisons noradrénergiques du système orthosympathique, comme d'ailleurs les neurones de même type mis en évidence au niveau du système nerveux central.

La transmission ganglionnaire et neuro-effectrice

Voies parasympathiques et orthosympathiques - crédits : Encyclopædia Universalis France

Voies parasympathiques et orthosympathiques

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La figure schématise la disposition anatomique de l'innervation orthosympathique et parasympathique d'une même cellule. Alors que la jonction entre neurone préganglionnaire et postganglionnaire sympathique (ganglions latéro-vertébraux et ganglions des plexus) est située en dehors et souvent loin du tissu à innerver, la jonction pré-postganglionnaire parasympathique est située dans le tissu même, et le neurone postganglionnaire est très court.

Le transmetteur chimique de la transmission ganglionnaire (qu'il s'agisse du système orthosympathique ou du système parasympathique) est l'acétylcholine ACh. Ainsi toutes les fibres préganglionnaires, libérant de l'acétylcholine à leur terminaison, ont été dites cholinergiques.

Le transmetteur chimique à la jonction neuro-effectrice, c'est-à-dire la jonction entre la fibre postganglionnaire et le tissu à innerver, est la noradrénaline pour le système orthosympathique, et ces fibres sont dites noradrénergiques. Par contre, à la jonction neuro-effectrice du système parasympathique, les fibres postganglionnaires libèrent de l'acétylcholine, et ces fibres sont elles aussi cholinergiques.

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Il y a peu d'exceptions à cette règle générale. Mentionnons cependant que les fibres orthosympathiques allant à certaines glandes sudoripares sont cholinergiques et que les vaisseaux musculaires sont également mis en état de vasodilatation lors du travail musculaire par des fibres orthosympathiques cholinergiques.

Les transmissions adrénergiques

Transmission adrénergique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Transmission adrénergique

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Nos connaissances actuelles, schématisées dans la figure, sont le résultat d'études convergentes utilisant des techniques aussi variées que la microscopie électronique, l'histochimie, les dosages biochimiques et l'utilisation de traceurs radioactifs, la neurophysiologie et surtout la neuropharmacologie. On suivra, étape par étape, la synthèse, le stockage, la libération et la destruction de la noradrénaline, en indiquant pour chaque étape les agents pharmacologiques susceptibles de l'affecter.

Tyrosine : synthèse de la noradrénaline - crédits : Encyclopædia Universalis France

Tyrosine : synthèse de la noradrénaline

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La synthèse se fait à partir d'un acide aminé, retrouvé dans le sang et les tissus, la tyrosine, suivant le schéma

L 'équipement enzymatique nécessaire est présent dans les axones postganglionnaires. Cet ensemble de réactions a comme facteur limitant de sa vitesse de synthèse la première réaction tyrosine → Dopa. Lors de la libération de NA à partir des terminaisons, cette réaction est accélérée par un mécanisme de feed-back encore mal élucidé. Des « faux transmetteurs adrénergiques » peuvent être synthétisés si l'on met à la disposition des neurones non pas de la tyrosine mais de l'α-méthyl m-tyrosine (, en 2) ou encore de l'α-méthyl-Dopa à la place de la Dopa (, en 5). Les « faux transmetteurs » synthétisés sont incapables d'affecter l'effecteur sympathique. La réaction limitante de la synthèse de la noradrénaline peut être bloquée par des substances inhibitrices de la tyrosine hydroxylase comme l'α-méthyl-p-tyrosine ou la 3-iodotyrosine.

Le stockage se fait dans des vésicules de diamètre de l'ordre de 80 nm accumulées au niveau des terminaisons adrénergiques selon les images obtenues en microscopie électronique. Il s'agit vraisemblablement d'un complexe constitué par de l'ATP, un métal divalent et une protéine à laquelle la noradrénaline est fixée par l'intermédiaire de son groupe catéchol. Ce stockage est empêché par une drogue, telle la réserpine (, en 6) ; un traitement prolongé entraîne une déplétion en NA des vésicules.

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La libération de la NA se fait lors de l'arrivée d'un message nerveux (potentiel d'action) à la terminaison des neurones postganglionnaires ; elle se répand dans l'espace fonctionnel et peut affecter le tissu effecteur. Les ions calcium interviennent dans cette libération. La propagation de l'influx nerveux dans les terminaisons peut être empêchée par des drogues comme le brétylium et la guanéthidine (, en 1). La libération de quantités adéquates de NA dans l'espace fonctionnel dépend évidemment des quantités disponibles à l'intérieur des terminaisons ; si des « faux transmetteurs » (métaraminol, octopamine, α-méthyl-noradrénaline) ont remplacé la NA ou si des substances capables de déplacer la NA de ses vésicules de stockage ont été introduites dans le neurone, la NA libérée sera déficiente (, en 8).

Deux mécanismes de destruction différant par leur lieu d'action, leur réaction chimique et l'équipement enzymatique nécessaire sont connus. À l'intérieur des terminaisons, la substitution d'un hydroxyle au groupement amine de la NA est catalysée par la monoamine-oxydase (MAO) des groupes de mitochondries visibles dans les images de microscopie électronique. Cette réaction est bloquée (, en 4) par toute une série d'inhibiteurs de la MAO, les IMAO, comme la nialamide et l'iproniazide ; à l'extérieur des terminaisons, dans l'espace fonctionnel, et sous l'action d'une enzyme appelée catéchol O-méthyl-transférase (COMT), peut se former, par 3-O-méthylation, un composé méthylé, la métanéphrine. Cette réaction peut également être bloquée par le pyrogallol et les tropolones (, en 9).

Enfin, en plus des mécanismes de destruction, il existe une réabsorption de la NA de l'espace fonctionnel par les terminaisons axoniques (, en 7) ; cette réabsorption, due à des processus de transport à travers la membrane, peut être inhibée par de nombreuses drogues telles la cocaïne, la désipramine et différentes amines sympathicomimétiques. Il en résulte une augmentation de la NA disponible dans l'espace fonctionnel et donc une intensification des effets adrénergiques.

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Les récepteurs du tissu effecteur. Une fois libérées, la noradrénaline et, dans certains cas, l'adrénaline (A), dérivé méthylé de NA, agissent sur l'effecteur, par exemple un muscle lisse. L'effet produit peut être soit une excitation soit une inhibition, ce qui dépend de la place du muscle lisse dans l'économie générale, et à un moindre degré de la quantité de transmetteur libéré. De façon générale, NA est un excitant puissant et a peu d'effets inhibiteurs ; l'adrénaline est aussi bien un excitateur qu'un inhibiteur. Ces observations ont mené à postuler l'existence au niveau des effecteurs adrénoceptifs de deux types de récepteurs α et β. Dans de nombreux cas, les deux types de récepteurs peuvent coexister au niveau du même tissu effecteur. De très nombreuses études neuropharmacologiques ont précisé les effets de substances (, en 10) bloquant la réception α ou β (phénoxy-benzamines, phentolamine, etc.) ou encore capables d'agir sur ces récepteurs en mimant l'action de la NA ou de l'A (amines sympathomimétiques telles que la synéphrine, l'isoprotérinol, l'éphédrine, etc.).

Les transmissions cholinergiques

L' acétylcholine (ACh) assure la transmission de l'influx nerveux dans deux types de jonctions : celle du neurone postganglionnaire avec l'organe effecteur du système parasympathique et celle du neurone préganglionnaire avec le neurone postganglionnaire tant dans le système parasympathique que dans le système orthosympathique. Après avoir résumé les notions actuelles sur la synthèse et la destruction de l'ACh, il y aura lieu d'examiner plus spécialement les mécanismes de transmission au niveau des relais ganglionnaires.

Synthèse et destruction de l'ACh

La synthèse de l'ACh s'opère à partir de la choline du sang sous l'action d'une enzyme, la choline-acétyltransférase ; l'énergie nécessaire est fournie par le glucose ; la choline-acétyltransférase, synthétisée dans le corps cellulaire neuronique, est transportée vers les terminaisons par le flux axoplasmatique. Est présente également, synthétisée de même par les corps cellulaires et transportée vers les terminaisons, une seconde enzyme, la cholinestérase responsable de la destruction de l'ACh. Cette ACh semble répartie entre trois compartiments différents. Le premier renferme l'ACh « stationnaire », localisée dans la partie préterminale de l'axone, non accessible à la cholinestérase. Le second est constitué par l'ACh de dépôt, compartiment principal, très vraisemblablement contenue dans les vésicules synaptiques ; elle est également protégée de la cholinestérase ; c'est à partir de ce compartiment qu'est détachée facilement une fraction qui est libérée dans l'espace fonctionnel ; cette libération se fait par petites quantités (« quanta »), soit « spontanément » lors de fluctuations de la polarisation des terminaisons axonales, soit surtout lors de leur dépolarisation à l'arrivée d'un potentiel d'action nerveux. Enfin, l'ACh « de surplus » correspond à un troisième stock, extra-vésiculaire ; elle est exposée à l'action de la cholinestérase, et sa choline est réutilisée pour la synthèse de l'ACh vésiculaire. L'ACh, libérée dans l'espace fonctionnel, est détruite par la cholinestérase.

Transmission au niveau des relais ganglionnaires

Les jonctions entre fibres préganglionnaires et fibres postganglionnaires orthosympathiques se sont révélées particulièrement favorables pour une étude simultanée des phénomènes électriques et des phénomènes chimiques de la transmission, donc pour la recherche de leurs corrélations ; le « modèle » de la transmission que l'on a pu déduire explique les nombreux effets neuropharmacologiques, souvent connus depuis fort longtemps, qui affectent la transmission au niveau des ganglions sympathiques.

Mécanismes de transmission cholinergique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Mécanismes de transmission cholinergique

Si l'on stimule la fibre préganglionnaire et si l'on analyse les phénomènes électriques accompagnant la transmission au niveau de la jonction synaptique, soit par des enregistrements à partir d'électrodes de surface, soit à partir de microélectrodes empalant le corps cellulaire du neurone postganglionnaire (enregistrement intracellulaire), on observe une série d'accidents électriques étalés dans le temps. L'analyse de ces accidents, d'abord par l'utilisation judicieuse de drogues, connues pour intervenir au niveau des jonctions ganglionnaires et permettant de supprimer sélectivement l'un ou l'autre de ces accidents, ensuite grâce à d'autres manœuvres classiques en neurophysiologie (mesure de la résistance membranaire, injection de courants, effet des changements dans la concentration de divers ions), a permis d'établir un modèle tenant compte de toutes les observations connues (cf. B. Libet, 1970). La libération d'ACh à partir des terminaisons présynaptiques provoque :

1. L'apparition au niveau de la cellule postganglionnaire d'un potentiel postsynaptique excitateur précoce (PPSE). Cette composante est susceptible d'être bloquée par la nicotine (également par d'autres drogues : l'hexaméthonium, la d-tubocurarine, la gallamine) ; ce premier type de transmission permet de postuler l'existence, au niveau de la membrane postsynaptique limitant le péricaryon du neurone postganglionnaire, d'un premier type de récepteur acétylcholinique du type dit nicotinique.

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2. L'apparition beaucoup plus tardive d'un autre potentiel postsynaptique excitateur à décours « lent » (PPSE-L). Celui-ci est également dû à l'action d'ACh sur la membrane postsynaptique ; un second type de récepteur est cependant impliqué puisque cette transmission tardive et lente (200-300 ms) n'est pas supprimée par la nicotine mais est bloquée par l'atropine et d'autres substances. Ce second type de transmission fait admettre l'existence d'autres récepteurs acétylcholiniques de type dit atropinique (ou « muscarinique » dans les recherches plus anciennes).

3. L'apparition, tardive également, d'un potentiel postsynaptique inhibiteur à décours lent (PPSI-L). Divers résultats pharmacologiques plus anciens, l'observation d'images histologiques suggérant l'existence dans les ganglions de cellules chromaffines (comme dans la médullo-surrénale), et la visualisation, par les techniques récentes d'histofluorescence, de neurones de la série catécholaminique (NA, A ou dopaminergiques) à ce niveau ont été autant d'arguments pour suggérer l'implication d'un interneurone adrénergique dans cette transmission d'abord considérée comme purement cholinergique. L'ACh libérée active un neurone doté de récepteurs acétylcholiniques de la série atropinique ; ce neurone libère à ses terminaisons soit de la noradrénaline, soit de la dopamine (ce point est encore controversé) qui agit sur une troisième série de récepteurs de la membrane du neurone postganglionnaire, des récepteurs adrénergiques α, cette transmission étant effectivement bloquée par la phénoxy-benzamine par exemple.

Ainsi, la libération d'ACh par les terminaisons préganglionnaires agit sur une cellule postganglionnaire équipée d'au moins trois types de récepteurs différents : des récepteurs à l'ACh blocables par la nicotine, des récepteurs d'ACh blocables par l'atropine, des récepteurs de catécholamines (noradrénaline, adrénaline ou dopamine). La signification physiologique de ces trois types de transmissions au niveau d'un même relais est encore mal connue ; la transmission liée au PPSE précoce est le mode de transmission usuel et fondamental ; le PPSE-L, plus tardif et prolongé, ajoute ses effets d'excitation à la transmission précoce ; il prend de l'importance lors de décharges répétitives de la voie préganglionnaire et l'on sait que ceci est précisément le cas lors d'un fonctionnement physiologique normal du système ; enfin, le PPSI-L, traduisant un effet inhibiteur sur le neurone postganglionnaire, pose des problèmes nouveaux ; il est possible, comme semblent le montrer des expériences qui ont révélé une action inhibitrice des catécholamines circulantes sur la transmission, que le niveau d'activité du système orthosympathique règle grâce à ce mécanisme la transmission des influx dans le système, et il y aurait là un mécanisme de rétroaction négative.

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Écrit par

  • : ancien directeur de recherche au C.N.R.S., Institut de neurophysiologie et de psychophysiologie, Marseille

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Système neurovégétatif - crédits : Encyclopædia Universalis France

Système neurovégétatif

Innervation sympathique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Innervation sympathique

Effecteurs orthosympathiques et parasympathiques - crédits : Encyclopædia Universalis France

Effecteurs orthosympathiques et parasympathiques

Autres références

  • BULBE RACHIDIEN

    • Écrit par
    • 4 097 mots
    • 5 médias
    Ilest connu que le bulbe rachidien constitue une région d'importance vitale et que sa destruction ou une lésion même légère sont fatales (nœud vital de Flourens). Cela tient à la présence, au sein de la réticulée bulbaire, de centres de première importance pour le contrôle et la régulation respiratoire...
  • CERVEAU HUMAIN

    • Écrit par , , , et
    • 12 789 mots
    • 9 médias
    Sous le thalamus se trouve l'hypothalamus qui rassemble toutes les régulations viscérales participant à l'homéostasie du milieu intérieur. Véritable centrale végétative, il joue un rôle fondamental dans l'intégration des fonctions somatiques, autonomes et endocriniennes car il reçoit des informations...
  • COMA

    • Écrit par , , , et
    • 3 199 mots
    • 3 médias
    ...artérielle, favoriser secondairement la défaillance circulatoire, ou collapsus, et l'élévation thermique. Dans cette forme de coma, la réactivité aux stimuli se traduit par des réponses neurovégétatives (bouffées vasomotrices, troubles respiratoires et cardio-vasculaires, dilatation pupillaire).
  • HOMÉOSTASIE

    • Écrit par
    • 4 843 mots
    • 2 médias
    De la même manière, les divers étages du système nerveux végétatif sont coiffés par un système diencéphalo- limbique dont l'activité apparaît de manière évidente après ablation du manteau cortical (Goltz, W. B. Cannon), ou par excitation directe de certaines zones (J. P. Karplus et A. Kreidl ; W. R....
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Voir aussi