GROUPES (mathématiques)Groupes finis
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Née de l'étude des groupes de permutations des racines d'équations, la théorie des groupes finis s'est développée indépendamment depuis le Traité des substitutions et des équations algébriques (1870) de Camille Jordan. Après les travaux importants de Burnside, de Frobenius et de leurs élèves vers le commencement du xxe siècle, cette théorie connut une période de développement lent, faute de méthodes pour résoudre les nombreux problèmes posés par ces pionniers. Les efforts de mathématiciens comme P. Hall et R. Brauer pendant cette période ont engendré les nouvelles méthodes qui, après 1955, ont amené une intense activité dans ce domaine ; des progrès énormes ont été accomplis, particulièrement dans la théorie des groupes simples et la théorie des relations entre un groupe et ses sous-groupes. Mais beaucoup de questions sont restées longtemps ouvertes et sont l'objet d'une recherche acharnée.
Groupes de permutations
Historiquement la théorie des groupes finis commença avec l'étude des groupes symétriques et de leurs sous-groupes, les groupes de permutations. Soit E un ensemble fini formé des n éléments e1, ..., en, n ≥ 1. Une permutation π des éléments e1, ..., en (ou encore une permutation π sur E) est une application x ↦ π(x) de E dans E, telle que chaque élément y de E soit l'image y = π(x) d'un élément unique x de E. L'application π-1, envoyant chaque élément y sur l'élément x tel que y = π(x), est alors aussi une permutation sur E, qui s'appelle l'inverse de π. Le produit πρ de deux permutations π, ρ sur E est la permutation de e1, ..., en définie par : πρ(x) = π(ρ(x)), pour tout x dans E. Avec ces définitions de l'inversion et de la multiplication, l'ensemble des permutations sur E forme un groupe fini Σ(E), le groupe symétrique de E. Son élément neutre est la permutation identité 1 = 1E sur E, qui envoie chaque x = e1, ..., en sur lui-même : 1E(x) = x.
Le groupe symétrique Σ(E) est déterminé à un isomorphisme près par le nombre n = |E| d'éléments de E ; et on l'appelle souvent le groupe symétrique Σn de degré n, sans spécifier l'ensemble E. L'ordre | Σn | du groupe Σn, c'est-à-dire le nombre de ses éléments, est n ! = 1.2... (n − 1).n.
On peut représenter une permutation π de e1, ..., en graphiquement par un tableau formé des éléments e1, ..., en et de flèches. Chaque flèche joint un élément x = e1, ..., en à son image y = π(x). Par exemple, si π est la permutation des éléments a, b, c, d, définie par π(a) = c, π(b) = a, π(c) = d, π(d) = b, son tableau est :

Une permutation comme celle-ci, dont le tableau a la forme d'une seule boucle, s'appelle une permutation cyclique. Elle se note en donnant les éléments dans leur ordre cyclique π = (a, c, d, b). Dans cette écriture, on peut commencer avec n'importe quel élément et écrire π sous les formes équivalentes :

Toute permutation sur E s'écrit comme un produit de permutations cycliques sur certains sous-ensembles de E. Ainsi, la permutation π de 1, 2, ..., 6 définie par : π(1) = 5, π(2) = 6, π(3) = 3, π(4) = 2, π(5) = 1, π(6) = 4, a pour tableau :

Il est évident que l'ensemble {1, 2, ..., 6} se décompose en une réunion disjointe des sous-ensembles {1, 5}, {2, 6, 4} et {3}, sur lesquels π opère comme les permutations cycliques (1, 5) (2, 6, 4) et (3). Ces permutations cycliques sont les cycles de π. La longueur d'un cycle de π est le nombre d'éléments dans le sous-ensemble correspondant. Donc π a des cycles de longueur 2, 3 et 1. On écrit π comme le produit (dans n'importe quel ordre) de ses cycles : π = (1, 5)(2, 6, 4) (3) = (4, 2, 6)(3)(1, 5) = ...
On a l'habitude de supprimer les cycles de longueur 1 quand l'ensemble E est connu. On écrit ainsi (1, 5)(2, 6, 4) au lieu de (1, 5)(2, 6, 4)(3) pour la permutation considérée précédemment. Cette notation est cohérente avec la notation adoptée pour la multiplication, car la permutation (1, 5)(2, 6, 4) = (1, 5)(2, 6, 4)(3) est en fait le produit des permutations (1, 5) = (1, 5)(2)(3)(4)(6) et (2, 6, 4) = (2, 6, 4)(1)(3)(5).
Si les longueurs des cycles d'une permutation π sont l1, ..., lk alors la signature sgn(π) de π est le nombre :

Si cette signature est égale à 1, la permutation π est paire, si elle est égale à − 1, elle est impaire. La fonction sgn est une fonction multiplicative : sgn(πρ) = sgn(π)sgn(ρ), pour toutes les permutation [...]
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Écrit par :
- Everett DADE : professeur à l'université de l'Illinois
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Voir aussi
- THÉORÈME DE FEIT & THOMPSON
- GROUPES DE FROBENIUS
- GROUPE ALTERNÉ
- GROUPE LINÉAIRE GÉNÉRAL
- GROUPE NILPOTENT
- GROUPE RÉSOLUBLE
- GROUPE SIMPLE
- GROUPE SPORADIQUE mathématiques
- GROUPE SYMÉTRIQUE
- GROUPE TRANSITIF
- SUITE DE JORDAN-HÖLDER
- GROUPE DE KLEIN
- MONSTRE groupe mathématique
- NORMALISATEUR
- ORBITE mathématiques
- ORDRE D'UN GROUPE
- PERMUTATION mathématiques
- P-GROUPES
- SIGNATURE D'UNE PERMUTATION
- STABILISATEUR mathématiques
Pour citer l’article
Everett DADE, « GROUPES (mathématiques) - Groupes finis », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 20 janvier 2023. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/groupes-mathematiques-groupes-finis/