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CARTHAGE

L'apport des fouilles depuis 1973

Carthage est la seule grande ville antique du monde méditerranéen dont la connaissance a été profondément renouvelée. De 1973 à 1989, la grande campagne internationale de Carthage patronnée par l'U.N.E.S.C.O. a fait participer des dizaines de missions venant de nombreux pays à l'étude des vestiges carthaginois à travers toutes les périodes.

La ville punique

Grâce aux fouilles, la ville punique, jusque-là mystérieuse, est réapparue, et son évolution est mieux connue. Malgré de grandes lacunes, les lignes générales de l'histoire de l'antique cité peuvent être esquissées. Surtout parce que la plus marquante, la dernière phase qui précède la destruction de 146 avant J.-C., a été mise au jour. Un quartier a été découvert, dégagé et restauré sur le flanc sud de l'acropole de Byrsa. Ce quartier, miraculeusement préservé, doit sa survivance aux énormes travaux entrepris par le constructeur romain : pour établir une immense plate-forme sur la colline, on a écrêté le sommet et comblé les versants sous d'énormes quantités de remblais maintenus à mi-pente par des murs de soutènement. Ce sont ces remblais qui ont enfoui et préservé les vestiges.

C'est un quartier d'habitation édifié à flanc de colline selon un plan régulier, suivant une orientation nord-est - sud-ouest ; chaque îlot rectangulaire (30 m × 15 m environ), entouré par de larges rues orthogonales, s'étage par paliers successifs suivant la pente et comprend plusieurs habitations de plan allongé comportant différentes variantes : donnant sur la façade, une grande salle longée d'un couloir d'accès conduit vers une courette centrale à ciel ouvert et débouche au fond sur un ensemble de petites pièces. Au sous-sol de chaque unité, une citerne très profonde était approvisionnée par les eaux de pluie provenant des terrasses. Le sol est pavé d'un tuileau de poterie concassée parsemé de petits cubes de marbre blanc. Les murs sont couverts d'un stuc blanc, parfois peint. Nul doute que cette architecture comportait plusieurs étages.

Ce lotissement a été daté de la fin du iiie siècle – début du iie siècle, c'est-à-dire de la seconde guerre punique. Après sa défaite à Zama en 203, Hannibal, devenu suffète de sa patrie, aurait été le promoteur de cet ensemble qui révèle une organisation urbanistique et architecturale remarquable.

Ce quartier aura la vie courte, puisque, en 146, il sera détruit par les soldats de Scipion, puis enfoui sous les remblais des terrassements de la ville romaine. Ce sont les fouilles récentes menées par l'équipe française dans le cadre de la campagne internationale qui le remettront au jour.

Un autre secteur essentiel de Carthage a fait l'objet de travaux de fouilles et de recherches : ce sont les ports puniques. L'identification des anciens ports de Carthage avec les deux lagunes actuelles n'était pas assurée et certains la contestaient. L'équipe britannique a pu, malgré l'état fangeux actuel des lagunes, les remaniements opérés à l'époque romaine et l'abandon ultérieur, reconstituer l'état et l'aspect des prestigieux ports de Carthage et plus particulièrement le port militaire circulaire. L'archéologie a confirmé la description qu'en avait faite Polybe, reprise par Appien : « Les ports de Carthage étaient disposés de telle sorte que les navires passaient de l'un dans l'autre ; de la mer, on pénétrait par une entrée large de 70 pieds [20,72 m] qui se fermait avec des chaînes de fer. Le premier port, réservé aux marchands, était pourvu d'amarres nombreuses et variées. Au milieu du port intérieur était une île. L'île et le port étaient bordés de grands quais. Tout le long de ces quais, il y avait des loges, faites pour contenir 220 vaisseaux, et, au-dessus des loges, des magasins pour[...]

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Écrit par

  • : maître de recherches à l'Institut national d'archéologie et d'art de Tunisie, conservateur du musée et du site de Carthage
  • : chargée de recherche au C.N.R.S.
  • : professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne
  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Pour citer cet article

Abdel Majid ENNABLI, Liliane ENNABLI, Universalis et Gilbert-Charles PICARD. CARTHAGE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

-600 à -200. Philosophes et conquérants - crédits : Encyclopædia Universalis France

-600 à -200. Philosophes et conquérants

Tablette d'or de Pyrgi - crédits :  Bridgeman Images

Tablette d'or de Pyrgi

Bataille de Zama - crédits : AKG-images

Bataille de Zama

Autres références

  • FONDATION DE CARTHAGE

    • Écrit par Bernard HOLTZMANN
    • 196 mots

    La civilisation phénicienne s'est épanouie au IIe millénaire avant notre ère sur la côte de la Syrie antique (Canaan dans la Bible) en villes-États (Byblos, Bérytos, Sidon, Tyr, etc.) où le commerce maritime jouait un rôle essentiel. Cette longue et intense pratique du bassin méditerranéen...

  • AFRIQUE (Histoire) - Préhistoire

    • Écrit par Augustin HOLL
    • 6 326 mots
    • 3 médias
    ...territoires. L'installation des Phéniciens en Méditerranée occidentale, au tout début du Ier millénaire avant J.-C., crée des conditions nouvelles. La fondation de Carthage autour de 800-700 avant J.-C. ouvre le chapitre de l'urbanisation de l'Afrique du Nord. Les Grecs créent des colonies en Cyrénaïque....
  • AFRIQUE ROMAINE

    • Écrit par Noureddine HARRAZI, Claude NICOLET
    • 9 564 mots
    • 10 médias

    La domination administrative et politique de Rome sur les diverses régions de l'Afrique du Nord (mis à part la Cyrénaïque et l'Égypte) s'étend sur près de six siècles : depuis la prise et la destruction de Carthage par Scipion Émilien (146 av. J.-C.) jusqu'au siège et à la...

  • AGATHOCLE (env. 359-289 av. J.-C.)

    • Écrit par Joël SCHMIDT
    • 431 mots

    Fils d'un potier de Rhêgion (auj. Reggio di Calabria) Agathocle, né à Thermae près d'Himère, fait partie d'une faction populaire qui dispute le pouvoir à l'aristocratie grecque de Sicile. Un coup d'État lui permet de devenir, à Syracuse, un de ces tyrans progressistes...

  • ATLANTIQUE HISTOIRE DE L'OCÉAN

    • Écrit par Jacques GODECHOT, Clément THIBAUD
    • 13 670 mots
    • 12 médias
    ...possédaient au demeurant de meilleures embarcations que les Égyptiens, ont franchi le détroit de Gibraltar. En 465 avant notre ère, Hannon, magistrat de Carthage, reçut l'ordre d'aller établir des colonies au-delà des colonnes d'Hercule. Il partit avec trente mille personnes, sur soixante navires. Il fonda...
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Voir aussi