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MÉTRIQUE

Textes à double métrique

Une grande source de confusion entre les métriques syllabiques et de durée réside en ce qu'un texte peut être mesuré de plusieurs manières indépendantes qui en font autant d'objets métriques. Il arrive souvent, en particulier, qu'un texte soit, d'une part, mis en musique et, d'autre part, sur le papier, mis en vers. Le risque de confusion est alors d'autant plus grand que la correspondance entre la structure métrique du chant et celle du poème est étroite.

Un exemple d'ambivalence clair mais méconnu est fourni par l'hymne national français. Les paroles de La Marseillaise sont généralement imprimées, de nos jours, de telle façon qu'elles présentent un contraste singulier entre les couplets, qui seraient des huitains de versification parfaitement classique, et le refrain, qui ressemblerait plutôt à des vers libres, anachroniques sous la plume de Rouget de Lisle : « Aux armes, citoyens ! / Formez vos bataillons ! / Marchons, marchons ! / Qu'un sang impur / Abreuve nos sillons ! » (structure syllabique variable, rimes lacunaires et n'alternant pas en genre). Or il suffit de réduire la répétition du mot « marchons », considéré comme un bis, pour déterrer, sous ces vers libres, ce distique classique d'alexandrins correctement rimés :

Aux armes, citoyens ! formez vos bataillons ! Marchons ! qu'un sang impur abreuve nos sillons !

Il y a donc deux Marseillaises, non simultanément perceptibles, dans « la » Marseillaise : d'une part, un chant (texte doté d'une métrique de durée et d'une structure mélodique), d'autre part, un poème conforme aux conventions graphiques traditionnelles, à métrique syllabique simple et superstructures rimiques classiques (dizains de 8-syllabes conclus par une paire d'alexandrins, comme les strophes de l'Ode à la Reine de Gilbert). C'est une des difficultés de l'analyse métrique que de dissocier, le cas échéant, les diverses structures métriques, plus ou moins étroitement convergentes, auxquelles peut se soumettre un seul et même objet.

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Pour citer cet article

Benoît de CORNULIER. MÉTRIQUE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Superstructure métrique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Superstructure métrique

Autres références

  • INDE (Arts et culture) - Les sciences

    • Écrit par Francis ZIMMERMANN
    • 14 198 mots
    • 2 médias
    ...triangle arithmétique, le triangle de Pascal, qui donne la solution d'un problème de mathématiques appliquées dans le domaine de la prosodie et de la métrique. Comment produire dans un poème la plus grande variété possible de mètres en jouant seulement sur les permutations entre syllabes longues [a]...
  • LYRISME

    • Écrit par Jamel Eddine BENCHEIKH, Jean-Pierre DIÉNY, Jean-Michel MAULPOIX, Vincent MONTEIL, René SIEFFERT
    • 10 725 mots
    • 2 médias
    ...ensuite à l'attention des lettrés, habiles à en exploiter les possibilités : soit qu'ils consacrent la primauté, parmi la diversité des rythmes populaires, des grands mètres classiques, le mètre quadrisyllabique, le plus ancien de tous, puis, à partir des Han, les mètres pentasyllabique et heptasyllabique,...
  • MOYEN ÂGE - La littérature en prose

    • Écrit par Nicola MORATO
    • 6 740 mots
    • 3 médias
    ...souvent, en outre, une certaine oscillation de la terminologie dans l’emploi de versus et de prosaen relation avec l’opposition de metrum (dans la métrique quantitative, qui distingue les syllabes selon leur quantité longue ou brève) et de rhythmus (dans la métrique accentuelle, qui distingue syllabes...
  • POÉSIE

    • Écrit par Michel COLLOT, Dominique VIART
    • 9 394 mots
    • 2 médias
    ...poétique. Dans la plupart des traditions, ce principe d'équivalence commande plusieurs niveaux d'organisation formelle du poème, au premier rang desquels : le mètre (reprise d'un nombre égal de pieds ou de syllabes), la rime ( répétition de sonorités identiques en fin de vers), la strophe, où mètres...
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Voir aussi