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STOÏCISME

Logique des stoïciens et logique moderne

À l'époque hellénistique, la logique des stoïciens était plus importante que celle d'Aristote. Mais, dans la seconde moitié du ier siècle avant J.-C., on assiste à une renaissance de l'aristotélisme. À la fin de l'Antiquité, Simplikios (né vers 500 apr. J.-C.) dit que les œuvres des stoïciens étaient perdues. Dans les Temps modernes, on a longtemps estimé que l'enseignement des stoïciens, pédant et stérile, ne valait rien. En 1935, Jan Łukasiewicz montre qu'en réalité la logique des stoïciens est originale et s'apparente à la logique moderne. La syllogistique des stoïciens est une logique des propositions, tandis que celle d'Aristote est une logique des termes. Depuis lors, la logique des stoïciens a été étudiée du point de vue logique et du point de vue philologique. La réhabilitation entreprise par Łukasiewicz en a été pleinement justifiée.

La logique comme théorie du langage

La logique des stoïciens comporte deux parties : la dialectique, qu'on peut traduire par théorie du langage, et la rhétorique. Cette théorie du langage contient une logique au sens moderne. Trois choses y sont étroitement liées : le signifiant, le signifié ou sémantème (lekton), et le corrélat de ceux-ci dans la réalité. Dans la théorie stoïcienne du signifiant apparaît une sorte de double articulation : le signifiant peut être conçu comme suite de phonèmes (lexis) où comme suite de mots (logos). La suite de mots est soit grammaticale, soit agrammaticale. La syntaxe du signifiant est une théorie des parties du discours et de la composition de phrases grammaticales à partir des mots, théorie reprise par les alexandrins. La théorie du signifiant traite également de la définition et de la subdivision des termes.

Les sémantèmes

Les sémantèmes sont désignés par des expressions empruntées à un grec normalisé. Aussi les stoïciens peuvent-ils à bon droit parler d'une syntaxe des sémantèmes. Si l'on compare leurs sémantèmes aux expressions d'un système logique moderne, on peut traduire « syntaxe des sémantèmes » par « règles de formation ». Voici un exemple de règle : un sujet au nominatif et un prédicat forment une proposition. Les stoïciens proposent une subdivision minutieuse des sémantèmes : on a, d'une part, les sémantèmes incomplets, les termes, et, d'autre part, les sémantèmes complets, dont les plus importants sont les propositions (déclaratives), les questions et les ordres. Les propositions déclaratives sont elles-mêmes divisées en simples et complexes et en positives et négatives.

Toute proposition déclarative (nommée dès maintenant « proposition ») peut être vraie ou fausse. Cette bivalence est la loi fondamentale de toute la logique des stoïciens. Les propositions sont de plus classées selon leur modalité. Ainsi, le dominateur de Diodore (kurieuon) est discuté dans la théorie de la modalité.

Les stoïciens connaissent trois classifications indépendantes de la proposition simple : celle-ci est soit positive ou négative, soit à prédicat positif ou négatif (steretikon), soit encore définie, ou catégorique (on dit aussi : intermédiaire), ou indéfinie. Il y a donc quatre espèces de propositions catégoriques et de propositions indéfinies : les positives à prédicat positif (1) ; les négatives à prédicat positif (2) ; les négatives à prédicat positif et négatif (3 et 4) :

Les propositions de la première colonne sont les quatre types de propositions aristotéliciennes, mais la quatrième n'implique pas la première. Celles de la seconde colonne correspondent aux quatre propositions à quantificateur de Frege. Les propositions définies sont formulées à l'aide d'un pronom démonstratif : « celui-ci [est juste] ».

Les principales sortes de propositions complexes sont les implications,[...]

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Écrit par

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Pour citer cet article

Jacques BRUNSCHWIG et Urs EGLI. STOÏCISME [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Zénon de Cittium - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Zénon de Cittium

Syllogismes de base de Chrysippe - crédits : Encyclopædia Universalis France

Syllogismes de base de Chrysippe

Autres références

  • AFFECTIVITÉ

    • Écrit par Marc RICHIR
    • 12 228 mots
    ...apparentes contradictions de la doctrine – nous ne disposons que de fragments plus ou moins épars –, il semble bien qu'il y ait eu, dans l'ancien stoïcisme, une conception double du pathos comme « passion » et comme « affect ». D'une part, en effet, les stoïciens soutiennent que « la passion (...
  • ÂGE DE LA TERRE

    • Écrit par Pascal RICHET
    • 5 143 mots
    • 5 médias
    ...il lui attribua comme auteur un démiurge ayant ordonné la khôra, un « réceptacle » qui fut peu après considéré comme une matière informe. En dépit de leurs désaccords fondamentaux, les atomistes et les stoïciens partagèrent l’idée que le monde passait continuellement par des cycles de formation...
  • ALEXANDRIE ÉCOLE PHILOSOPHIQUE D'

    • Écrit par Jean PÉPIN
    • 2 186 mots
    ...principal témoignage est un petit traité, Du monde, longtemps attribué à Aristote lui-même, et issu probablement d'un milieu alexandrin. Quant au stoïcisme, il est représenté à Alexandrie par un Égyptien du nom de Chaerémon, chef de l'école des grammairiens de la ville et directeur du Musée ; il...
  • ÂME

    • Écrit par Pierre CLAIR, Henri Dominique SAFFREY
    • 6 020 mots
    Le stoïcisme fut essentiellement la philosophie d'un homme placé dans un monde considérablement agrandi : philosophie du cosmos (κόσμος) conçu comme un gigantesque vivant, philosophie de la « sympathie » ou des harmonies préétablies et des correspondances secrètes entre les parties du monde....
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Voir aussi