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SIBÉRIE

Les origines

Premier peuplement

Au moment où la calotte glaciaire maximale couvrait la moitié de l'Europe, une deuxième calotte couvrait la Sibérie occidentale et centrale et une troisième la Sibérie orientale. Sur les franges méridionales de ces blocs stériles s'étendaient des terres plus clémentes où la vie pouvait éclore. Là, quelque peu en dessous du 60e parallèle, évoluaient déjà mammouths, rhinocéros laineux et lions des cavernes, auxquels se mêlèrent bien vite des rennes, des chevaux et des bœufs sauvages, et, plus au sud, des antilopes, des moutons et des cerfs marals. Une telle faune laisserait supposer la présence de l'homme, mais, actuellement, aucun vestige ne l'indique, à cette époque lointaine où, en Europe et en Extrême-Orient, des hommes avaient élaboré les cultures du Paléolithique inférieur. Quelques sites moustériens flanquent le territoire, à l'ouest ceux d'Asie centrale près du lac Issyk-Koul (Issyk-Kul'), à l'est ceux du monde chinois sur le plateau des Ordos.

Quatre trouvailles, deux dans l'Altaï (Altaj), une près du Baïkal (Bajkal) et la dernière dans le bassin de l'Amour (Amur), restent une énigme. Il s'agit d'industries lithiques fort anciennes où se mêlent des galets et hachereaux typiques des cultures asiatiques du Paléolithique inférieur : témoins ou survivants ? Tout se présente comme si des chasseurs du Pléistocène ancien et moyen avaient attendu des conditions climatiques plus favorables pour s'avancer en Sibérie. Au Pléistocène supérieur s'ouvrent trois voies qui vont donner cet immense espace aux hommes, couvrir tout un ensemble et, par leur localisation, expliquer le contenu original du Paléolithique supérieur. L'une part d'Asie centrale et longe le Pamir et le Tianshan, apportant l'expérience des descendants de néanderthaliens installés dans les bassins de l'Amu Darya et du Syr Darya. L'autre entraîne les fils du sinanthrope de Pékin par-delà les steppes mongoles jalonnées par Ulan Bator et Tchita (Čita). La troisième, plus tardive, permet aux chasseurs de l'Europe orientale de traverser l'Oural et de porter plus à l'est le rayonnement des cultures européennes. Le point de rencontre se situe dans le bassin de l'Ienissei (Enisej), à la limite de la Sibérie des plaines et de celle des plateaux. Une zone mixte allait de l'Ienissei au Baïkal, illustrant la fusion de deux courants. Ce sont les remarquables sites de Malta (Mal'ta) et Bouret (Buret'), dont les gisements correspondent à l'Aurignaco-Solutréen d'Europe. Rien n'y manque : outillage primitif, galets et hachereaux en pointes moustériennes, nucleus de type levalloisien mêlés à des éclats et à des lames de facture plus évoluée ; enfin, de magnifiques statuettes en os qui témoignent de la communauté eurasiatique des cultes de la fécondité.

L'étape suivante, d'âge solutro-magdalénien, est présente à Krasnoïarsk (Krasnojarsk) et à Afontova gora sur l'Ienissei, plus à l'ouest à Strostki dans l'Altaï, plus à l'est à Chichkino (Šiškino) sur la Lena et à Ochourkovo (Ošurkovo) sur la Selenga.

Sur la même étendue, une troisième étape, illustrée par Verkholenskaja gora au Baïkal, couvre l'Épipaléolithique et le Mésolithique. De l'Oural à l'Amour, une grande nappe de culture homogène, avec les mêmes outils, les mêmes cabanes, se différencie des cultures de l'Europe ou de l'Extrême-Orient par le mélange plus ou moins accentué d'influences occidentales ou orientales. En cette même époque du Pléistocène supérieur se constitue un autre mélange, celui qui donne naissance au type humain mongoloïde dont les représentants joueront désormais un rôle majeur dans le développement de la Sibérie et du monde. En effet, l'hypothèse formulée en 1937 par N. C. Nelson est peu à peu[...]

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Écrit par

  • : conservateur en chef du musée Guimet, directeur d'études à l'École pratique des hautes études en sciences sociales
  • : professeur à l'université de Lyon-II, chercheur au Centre Magellan, Université de Lyon-III
  • : professeur titulaire de la faculté des sciences de l'université de Picardie

Classification

Pour citer cet article

Vadime ELISSEEFF, Pascal MARCHAND et Guy MENNESSIER. SIBÉRIE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

-4000 à -2000. Naissance de l'écriture - crédits : Encyclopædia Universalis France

-4000 à -2000. Naissance de l'écriture

-2000 à -1000. Les empires du Bronze - crédits : Encyclopædia Universalis France

-2000 à -1000. Les empires du Bronze

-600 à -200. Philosophes et conquérants - crédits : Encyclopædia Universalis France

-600 à -200. Philosophes et conquérants

Autres références

  • ALTAÏ

    • Écrit par Pierre CARRIÈRE
    • 382 mots

    La république fédérée de l'Altaï occupe, au sud de la Sibérie occidentale, une région essentiellement montagnarde de 92 600 kilomètres carrés où, en 2002, étaient recensés 202 900 habitants. Ce territoire est peuplé par les Oïrotes qui appartiennent à la famille ethnolinguistique altaïque....

  • AMÉRIQUE (Structure et milieu) - Géographie

    • Écrit par Jacqueline BEAUJEU-GARNIER, Danièle LAVALLÉE, Catherine LEFORT
    • 18 105 mots
    • 9 médias
    Dans la mesure où la plupart des préhistoriens s'accordent aujourd'hui pour faire venir du nord-ouest, c'est-à-dire de Sibérie, les premiers occupants de l'Amérique, il est alors essentiel de pouvoir reconstituer l'environnement nordique américain et de connaître l'importance et le moment des transformations...
  • AMOUR, fleuve

    • Écrit par Laurent TOUCHART
    • 2 316 mots

    Pour les Russes, l'Extrême-Orient se distingue de la Sibérie par le fait que le premier voit ses fleuves se jeter dans le Pacifique, la seconde, dans l'océan glacial Arctique. Alors que les cours d'eau sibériens, coulant du sud au nord, nécessitaient pour la colonisation russe des transbordements...

  • ANGARA

    • Écrit par Pierre CARRIÈRE
    • 382 mots

    Émissaire unique du lac Baïkal, l'Angara, après avoir traversé le lac du même nom, change d'appellation et devient la Toungouzka supérieure ; cet organisme fluvial draine un bassin de 1 045 000 kilomètres carrés et se jette, au terme d'un cours de 1 826 kilomètres, dans l'...

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Voir aussi