AMÉRIQUE (Structure et milieu) Géographie
L'ensemble du continent américain représente 41 900 000 kilomètres carrés, soit 28,2 p. 100 des terres émergées. Il est à peu près équivalent à la masse des terres asiatiques (42 300 000 km2), quatre fois plus vaste que l'Europe jusqu'à l'Oural ; l'Afrique, enfin, ne représente que les trois quarts de sa superficie totale.
La disposition territoriale permet de distinguer deux grands blocs : le triangle nord-américain, qui se termine au sud du Mexique actuel et couvre 21 312 000 kilomètres carrés (14,2 p. 100 des terres émergées), et l' Amérique du Sud, autre triangle de 17 700 000 kilomètres carrés (12 p. 100). Entre les deux, un isthme, doublé d'un chapelet d'îles, forme un double pont de chaque côté des deux mers intérieures, le golfe du Mexique et la mer Caraïbe. La surface globale de ces étroites bandes de terre, tourmentées et morcelées, atteint 2 900 000 kilomètres carrés et représente 2 p. 100 des terres émergées du globe.
Le continent
Position
Sur une représentation de la sphère terrestre, le continent américain apparaît comme une barrière continue entre l'Atlantique à l'est et le Pacifique à l'ouest, un obstacle aux relations entre les rives occidentales du Vieux Monde et les rivages orientaux où se développent les terres asiatiques. En vain les premiers explorateurs ont-ils cherché un passage tout au long de ces rivages pourtant fort découpés : au nord, les ramifications qui entourent les îles de l'archipel, entre le Canada et le Groenland, de la terre de Baffin, au sud-est, à la terre de Grant, au nord-est, sont prises par les glaces ; au sud, le passage tempétueux du cap Horn n'est pas une coupure car il est doublé à peu de distance par le détroit de Magellan (583 km de longueur) ; tous les deux sont fort peu praticables et l'homme, faute de trouver un passage naturel commode, a dû se résoudre à couper lui-même l'isthme de Panamá.
Cette barrière, si on y inclut le demi-continent nordique du Groenland, s'étire du nord au sud sur 1390 de latitude, soit sur plus de 15 450 km de longueur en suivant à vol d'oiseau le grand arc de méridien depuis 830 de latitude nord, à l'extrémité septentrionale du Groenland, jusqu'à 560 de latitude sud, au cap Horn.
Mais il ne s'agit pas d'une simple arête ou même d'un alignement continu : deux masses continentales, l'une projetée vers l'ouest, l'autre attardée vers l'est, par rapport à un mince pédoncule, font que les points extrêmes atteints en longitude sont aussi très largement répartis à la surface du globe : 1350, soit une ouverture comparable à celle de la latitude, séparent les franges de l'Alaska, 1700 de longitude ouest (sans compter l'alignement des îles Aléoutiennes qui se prolongent 200 plus à l'ouest), du cap Branco situé au nord de Recife (Brésil) par 350 de longitude ouest.
Ainsi l'Amérique du Nord rejoint presque l'Asie au nord-ouest, puisque le détroit de Béring, long de 200 kilomètres, n'est large que de 92 kilomètres et souvent profond de moins de 50 mètres, alors qu'elle est isolée du Vieux Monde par l'immensité de l'océan Atlantique septentrional (5 700 km de New York au Havre). Au contraire, grâce à cette torsion qui décale l'Amérique du Sud vers l'est, le Pacifique s'élargit démesurément quand on va vers le sud (10 000 km de San Francisco à Tōkyō ; 18 000 de Quito à Bornéo) alors que l'on ne compte que 3 000 kilomètres de l'avancée nord-est du Brésil au renflement central de l'Afrique occidentale.
Formes
Le triangle septentrional est plus ramassé (6 500 km de l'ouest de l'Alaska à la pointe sud-est de Terre-Neuve, dans sa partie la plus large, qui est aussi la plus septentrionale, et 6 000 kilomètres depuis le nord du Canada continental au sud du Mexique) mais il est plus largement pénétré par la mer : de profonds rentrants comme la baie d'Hudson, le golfe du Saint-Laurent, le golfe du Mexique ; de multiples indentations comme les grands estuaires de la côte est des États-Unis (Hudson, Delaware, Chesapeake) ; de longues péninsules plus ou moins découpées (Floride, Californie, guirlandes occidentales de l'Alaska, morcellement des archipels au nord du Canada et à l'ouest : archipels Alexandre, Prince-de-Galles, de la Reine-Charlotte, île de Vancouver...).
C'est au centre que l'interpénétration de la terre et de la mer est la plus considérable : sur plus de 2 000 kilomètres, depuis l'isthme de Tehuantepec (210 km de largeur) dans le sud du Mexique, et exception faite de la péninsule du Yucatán, le lien de terre ferme n'excède jamais 500 kilomètres de largeur. Il se double de l'arc des guirlandes insulaires des Grandes et des Petites Antilles et des Bahamas.
Au sud, le triangle sud-américain est à la fois beaucoup plus effilé et beaucoup plus massif : 7 600 kilomètres du nord au sud, des côtes du Venezuela et de la Colombie à la pointe de la Terre de Feu. 6 000 kilomètres d'est en ouest, de Recife à Guayaquil. Mais les côtes ont peu d'ouvertures : à l'est, les bouches de l'Amazone, l'estuaire de la Plata, la baie de Tous-les-Saints à Bahia ou la baie de Rio de Janeiro ne sont que des échancrures, et la côte ouest est encore plus rectiligne, ne s'ouvrant guère qu'en Équateur, au golfe de Guayaquil. Il faut atteindre le sud du Chili pour retrouver une imbrication de la terre et de la mer dans les alignements d'îles qui s'égrènent au sud de Puerto Montt.
Le caractère massif de la côte orientale de l'Amérique du Sud et son dessin triangulaire donnent l'impression de pouvoir s'ajuster à celui du golfe de Guinée, large indentation dans la côte occidentale africaine, d'autant que des parentés structurales et géologiques existent sur les rives de ces deux continents. Ces données ont permis à Wegener de lancer sa fameuse hypothèse sur la dérive des continents : c'est à partir d'une déchirure initiale que l'Afrique et l'Amérique du Sud se sont éloignées l'une de l'autre et forment maintenant deux masses continentales là où n'existait, en des ères géologiques reculées, qu'un seul ensemble de terres.
La double dissymétrie
La première est une dissymétrie nord-sud. Alors que le demi-continent nord-américain est situé entièrement au nord du 14e degré de latitude nord, avec un développement des surfaces surtout entre les 30e et 55e parallèles, c'est-à-dire dans les zones subtropicale, tempérée et froide, le demi-continent sud est traversé par l'équateur presque dans sa partie la plus large, et les terres les plus étendues et les plus massives se situent entre l'équateur et le tropique du Capricorne : c'est donc un continent essentiellement intertropical et seule sa pointe méridionale atteint les latitudes tempérées. L'Amérique du Sud se termine au nord du 56e parallèle, latitude au-delà de laquelle s'étend plus du quart de l'Amérique du Nord, y compris le Groenland. Il faut, en outre, ajouter les effets dus aux inégalités climatiques entre l'hémisphère Nord et l'hémisphère Sud pour apprécier toute l'importance de ce décalage, vers le nord, des Amériques par rapport à l'équateur.
À côté de cette dissymétrie, une autre, tout aussi importante, est constituée par la disposition du relief : de la pointe nord-ouest de l'Alaska à l'extrémité sud-est de la Terre de Feu, une suite ininterrompue de montagnes toujours vigoureuses, parfois grandioses, touchent les rives occidentales du continent et forment vers l'ouest une puissante barrière, quelquefois étroite et précise comme en Équateur ou en Bolivie méridionale (150 km de largeur), mais le plus souvent multiple, large, ramifiée, composite, comme aux États-Unis (1 700 km) ou dans la région frontalière du Pérou et de la Bolivie (700 km). En Amérique centrale, l'ossature de l'isthme et, plus au nord, le Mexique septentrional sont formés par ces cordillères. Vers l'est, au contraire, au nord et au sud, on plonge vers les plaines, les plateaux, les vieilles montagnes ou parfois les golfes marins. La façade orientale de l'Amérique s'ouvre sur l'Atlantique, et partant vers l'Europe et l'Afrique ; elle est incomparablement plus accueillante et plus propice aux vastes établissements humains que sa façade ouest.
Tous ces traits physiques fondamentaux : allongement nord-sud, barrière à la fois éloignée du Vieux Monde et opposée à la recherche directe de l'Asie par les Européens, structure extrêmement massive, déséquilibre par rapport à l'équateur, dissymétrie de la disposition du relief expliquent, à des titres divers, la physionomie de l'Amérique, aussi bien le cadre physique du milieu que sa pénétration et sa mise en valeur par l'homme.
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Écrit par
- Jacqueline BEAUJEU-GARNIER : professeure à la faculté des lettres et sciences humaines de l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
- Danièle LAVALLÉE : directeur de recherche émérite au C.N.R.S.
- Catherine LEFORT : docteure en géographie
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