Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

DROIT Économie du droit

L' analyse économique du droit constitue un mouvement de l'économie vers le droit puisqu'elle se propose d'utiliser les outils de l'analyse économique afin d'étudier des questions relevant de la sphère juridique. Plus précisément, elle peut se définir comme l'application des hypothèses théoriques (rationalité, maximisation de l'utilité, mécanismes incitatifs, etc.) et des critères de jugement (équilibre, optimalité) des économistes à l'explication et à l'évaluation des règles juridiques.

Sous l'appellation générique de Law & Economics, le courant est né aux États-Unis, au début des années 1960, lorsque certains économistes (Gary Becker, Ronald Coase, Richard Posner, George Stigler...), en particulier à l'université de Chicago, ont commencé à appliquer de façon systématique leurs instruments d'analyse à des domaines jusqu'alors relativement peu explorés, comme les choix constitutionnels, les droits de propriété, les accidents ou les activités « illégales ». Non qu'il n'y eut auparavant des réflexions économiques sur des problèmes juridiques mais elles se concentraient sur des questions dont la dimension principale était manifestement économique. Par exemple, l'économie industrielle s'est développée parallèlement à l'évolution du droit de la concurrence dans la plupart des pays industrialisés. L'économie du droit propose en fait d'étendre le champ de l'interdisciplinarité droit-économie en s'intéressant également à des phénomènes considérés habituellement « hors marché ».

Jeremy Bentham - crédits : Michael Nicholson/ Corbis/ Getty Images

Jeremy Bentham

En attribuant le prix Nobel en 1991 à Ronald Coase, le Comité Nobel a beaucoup contribué à promouvoir l'approche économique du droit dans les cercles universitaires. D'autres lauréats ont aussi favorisé l'essor de ce domaine de recherches : George Stigler (1982) a étudié les sources et les effets de la réglementation publique, James Buchanan (1986) s'est intéressé aux bases contractuelles et constitutionnelles du processus de décision politique. Gary Becker a été récompensé en 1992 pour avoir étendu le domaine de l'analyse micro-économique à un grand nombre de comportements non marchands parmi lesquels les comportements criminels. À cette liste, il convient bien entendu d'ajouter Friedrich Hayek, récompensé en 1974 et dont l'œuvre suscite depuis longtemps l'intérêt des économistes et des juristes, mais aussi William Vickrey ou James Mirrlees, Prix Nobel en 1996, dont les incursions dans le champ juridique ont été significatives. Certains verront dans cette démarche interdisciplinaire une redécouverte tardive de l'intérêt des économistes « classiques » pour les liens étroits unissant les disciplines touchant l'organisation de la société (philosophie, droit, économie, histoire). Sont souvent cités à cet égard les travaux de Jeremy Bentham ou de Cesare Beccaria à la fin du xviiie siècle. Dans la tradition utilitariste, le calcul benthamien veut en effet qu'une loi soit évaluée par rapport à sa capacité de promouvoir le « bonheur » des membres de la société, à dégager un surplus de plaisir. Si l'on peut effectivement percevoir une filiation intellectuelle entre ces précurseurs et les tenants de l'analyse contemporaine, il s'avère néanmoins que la méthode relève aujourd'hui de la théorie micro-économique.

Les fondements analytiques de l'économie du droit

L'analyse micro-économique du droit est donc une discipline récente. Elle a toutefois connu une histoire mouvementée au cours des dernières décennies (Cooter et Ulen, 1996 ; Fluet, 1990 ; Hovenkamp, 1995). Durant la période des années 1960, elle a été principalement marquée par des travaux appliquant la théorie des prix aux notions de base de la common law : propriété,[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-II-Panthéon-Assas, membre de l'Institut universitaire de France

Classification

Pour citer cet article

Bruno DEFFAINS. DROIT - Économie du droit [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Jeremy Bentham - crédits : Michael Nicholson/ Corbis/ Getty Images

Jeremy Bentham

Traité de Rome - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

Traité de Rome

Autres références

  • DROIT ET CITOYENNETÉ AU DÉBUT DU XXIe SIÈCLE

    • Écrit par Renaud DEMOYEN
    • 2 552 mots
    • 1 média

    La relation de l'individu au droit est traditionnellement appréhendée par le biais de la distinction entre droit objectif (la règle qui s'impose à tous les individus, objets de droit) et droit subjectif (l'individu en tant que titulaire de droits, qu'il peut exercer). Mais la façon dont l'individu...

  • ACTE JURIDIQUE

    • Écrit par Georges ROUHETTE
    • 2 066 mots

    Sous l'appellation « acte juridique », les juristes comprennent, le plus souvent, diverses institutions qui régissent les particuliers dans leurs rapports privés : mariage et vente, testament et constitution d'hypothèque, bail et reconnaissance d'enfant naturel. On peut avoir une idée assez...

  • ADMINISTRATION - Le droit administratif

    • Écrit par Jean RIVERO
    • 11 861 mots
    • 1 média

    Il est tentant de donner du droit administratif, en partant d'une observation évidente, une définition concrète à laquelle sa simplicité même conférerait une quasi-universalité. Tous les États modernes ont des organes administratifs, dont les statuts et les compétences sont nécessairement fixés par...

  • ALIMENTATION (Aliments) - Législation

    • Écrit par Alain SOROSTE
    • 3 141 mots

    Le commerce des denrées alimentaires, comme tous les commerces de produits de grande consommation, pourrait relever simplement d'un contrat entre le client et son fournisseur. La denrée alimentaire serait dès lors définie dans le cadre d'un contrat ou d'une offre commerciale à travers des spécifications...

  • ALTHUSIUS JOHANN ALTHAUS dit JOHANNES (1557-1638)

    • Écrit par Yves SUAUDEAU
    • 1 158 mots

    Né à une époque où l'Allemagne, notamment la Westphalie où il naquit, était une succession de petits fiefs animés surtout par les communautés calvinistes, Althusius appliqua sa pensée et son activité à ce contexte, aussi original que sa conception de la souveraineté devait l'être...

  • Afficher les 87 références

Voir aussi