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ALTHUSIUS JOHANN ALTHAUS dit JOHANNES (1557-1638)

Né à une époque où l'Allemagne, notamment la Westphalie où il naquit, était une succession de petits fiefs animés surtout par les communautés calvinistes, Althusius appliqua sa pensée et son activité à ce contexte, aussi original que sa conception de la souveraineté devait l'être pour l'époque. Il étudie Aristote à Cologne, puis, à Bâle, la théologie, l'histoire et le droit ; en 1586, il est reçu docteur in utroque jure. Ses premiers écrits juridiques lui valent un poste de professeur au collège de Herborn où il enseigne les « institutes » et les « pandectes ». En 1597, il va suivre des cours de théologie à Heidelberg, mais il est rappelé à Herborn en 1602 pour y être recteur. Dans ce poste, comme dans toutes les charges qu'il occupe par la suite, il défend contre la noblesse les libertés et les privilèges universitaires, ainsi que, contre le clergé, le libre examen des Écritures, droit qu'il réclame pour lui-même. En 1603, il publie son principal ouvrage, la Politica methodice digesta. La ville d'Emden, située en Frise orientale à la frontière des Pays-Bas et de l'Allemagne, demande alors à ce juriste calviniste très en vue d'accepter l'importante charge de syndic ; il devient en même temps citoyen de la ville. Élu « ancien », puis membre du consistoire, il intervient dans les conflits entre la cité et l'État, défendant notamment la thèse de la prédestination contre les arminiens et les remontrants libéraux.

La Politica répond au dessein d'analyser, par-delà les envahissements des philosophes et des théologiens, « les conditions nécessaires, essentielles et homogènes de la vie sociale ». Ainsi en vient-il à définir la politique comme un « art d'établir, de cultiver et de conserver entre les hommes ce qui est organiquement nécessaire à la vie sociale ». Appliquant pour sa « politique systématique » la méthode de Pierre de La Ramée (1515-1571) qui, à partir d'un concept, procédait par dichotomies successives, Althusius prend pour objet de première réflexion la communauté « symbiotique », soit le groupement corporatif d'êtres humains tel qu'il peut l'observer à son époque. La politique correspond ainsi à un champ plus large que celui qui est défini traditionnellement depuis Aristote ; dans sa Politique, ce dernier en faisait une science de la Cité, qui excluait l'économie familiale, traitée à part, car le principe de suffisance (autarcie), constitutif des véritables communautés politiques, ne semblait pas appartenir à cette dernière. Partant, à la différence d'Aristote, de la communauté symbiotique et du lien organique qui unit tous les hommes au niveau même de la simple famille, Althusius situe à un niveau plus primitif le ciment de toute vie sociale : l'individu se lie à une communauté non pas d'abord par un libre choix, mais par une nécessité absolue que d'autres éprouvent comme lui et qui leur fait chercher une vie en commun. Le besoin est donc le principe qui fait de l'homme un animal politique : « Aussi longtemps, écrit Althusius, qu'il vit isolé, [l'individu] ne peut du tout vivre honnêtement et commodément, dans un dénuement si complet. Et comme le remède apparaît manifestement dans la vie symbiotique, il est conduit et presque poussé à l'embrasser [...] ; s'il veut simplement vivre, c'est elle qui l'invitera à mettre en œuvre ses vertus, forcément inactives hors de cette union. » Pour Althusius, le besoin conduit à un mode de vie sociale quasi organique qui fait, par sa nature même, naître la réflexion sur les meilleures conditions et les meilleures formes de la vie politique.

La communauté est, par nature, un lieu de communication : communicatio rerum ou répartition des choses considérées comme des biens ; communicatio operum [...]

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Pour citer cet article

Yves SUAUDEAU. ALTHUSIUS JOHANN ALTHAUS dit JOHANNES (1557-1638) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • FÉDÉRALISME

    • Écrit par Universalis, Carl Joachim FRIEDRICH
    • 5 376 mots
    • 1 média
    ...leurs disciples. Au Moyen Âge se constituèrent des ligues fédérales, notamment de villes, mais le concept fut formulé pour la première fois par Johannes Althusius (1562-1638) ; à la lumière des expériences suisse, hollandaise ou germanique (Saint Empire romain germanique), il considérait la formation d'unions...

Voir aussi