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DÉMOCRATIES POPULAIRES

Le terme démocratie populaire a été utilisé par les partis communistes pour qualifier les nouveaux régimes politiques apparus, après la Seconde Guerre mondiale, soit en Europe centrale et orientale (Pologne, Tchécoslovaquie, Yougoslavie, Albanie, puis Bulgarie, Roumanie, Hongrie, Allemagne de l'Est), soit en Asie (Corée, Vietnam du Nord, Chine). Mais c'est surtout à propos des pays européens que le terme est entré dans le langage courant.

Les démocraties populaires européennes sont nées sous l'influence des mouvements de résistance à l'occupation nazie animés par les partis communistes et, dans la plupart de ces pays, avec le concours de l'armée soviétique. Les régimes économiques et politiques mis en place après la guerre présentaient avec celui de l'U.R.S.S. une double ressemblance : sur le plan économique, la nationalisation des grandes entreprises, la remise des terres aux paysans et la direction de l'économie par l'État ; sur le plan politique, le rôle du Parti communiste dans la fixation de la politique du gouvernement.

Mais ressemblance ne signifie pas identité. Les nationalisations laissaient subsister certaines catégories sociales : petits commerçants, artisans, professions libérales. Au départ, le Parti communiste n'était d'ailleurs pas seul : il collaborait encore, au sein d'un Front national, avec d'autres formations politiques. Lors de la constitution du Kominform (1947), Andreï Jdanov définissait la démocratie populaire comme un nouveau type d'État « où le pouvoir appartient au peuple, où la grande industrie, les transports et les banques appartiennent à l'État, et où la force dirigeante est constituée par le bloc des classes laborieuses de la population, ayant à sa tête la classe ouvrière ». À cette époque, la démocratie populaire était présentée comme une forme intermédiaire entre le système capitaliste et le système socialiste de type soviétique.

Les régimes politiques ont changé en 1948-1949, et le terme démocratie populaire a continué d'être employé, mais cette fois avec un nouveau contenu. Au Ve congrès du Parti communiste bulgare, en décembre 1948, Georges Dimitrov explique que la démocratie populaire est, comme le régime soviétique, une forme de la dictature du prolétariat. Le terme de démocratie populaire est ensuite progressivement abandonné pour celui d'État socialiste. La plupart des « républiques populaires » deviennent des « républiques socialistes ». L' Albanie, avec la Constitution du 26 décembre 1976, devient la république populaire socialiste d'Albanie. Cette évolution dans la terminologie reflète d'ailleurs celle qui s'est produite dans le fonctionnement du régime politique.

La caractéristique fondamentale de ces régimes politiques était que le parti communiste y dirigeait la société. Mais les méthodes de direction du parti, et en particulier le rôle joué par les organes collégiaux, par les assemblées élues, par les administrations économiques, par la police, ont varié dans le temps en fonction de la situation politique intérieure et de l'influence exercée par les autres États communistes, surtout par l'Union soviétique.

La thèse de Lénine, formulée en 1920, proclamait que « l'unité de tactique internationale du mouvement ouvrier communiste de tous les pays veut, non pas l'effacement de toute diversité, non pas la suppression des distinctions nationales [...], mais une application des principes fondamentaux du communisme (pouvoir des soviets et dictature du prolétariat) qui modifie correctement ces principes dans les questions de détail, les adapte et les ajuste comme il convient aux particularités nationales et politiques » ; cette thèse est restée celle des dirigeants communistes. Le problème a donc toujours été, dans les relations entre les partis communistes,[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-I, directeur de l'Institut de recherches comparatives sur les institutions et le droit du C.N.R.S.
  • : professeur à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle

Classification

Pour citer cet article

Michel LESAGE et Henri MÉNUDIER. DÉMOCRATIES POPULAIRES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Boris Eltsine au moment du putsch de 1991 - crédits : S. Anipchenko/ Slava Katamidze Collection/ Getty Images

Boris Eltsine au moment du putsch de 1991

Imre Nagy, 1954 - crédits : Keystone-France/ Gamma-Keystone/ Getty Images

Imre Nagy, 1954

Arpad Szakasits et Mátyas Rákosi , 1948 - crédits : Charles Falus/ Getty Images

Arpad Szakasits et Mátyas Rákosi , 1948

Autres références

  • ALBANIE

    • Écrit par Anne-Marie AUTISSIER, Odile DANIEL, Universalis, Christian GUT
    • 22 072 mots
    • 9 médias
    ...Issu de la fusion de plusieurs tendances, le Parti du travail albanais a dominé la vie politique depuis les élections du 2 décembre 1945, jusqu'en 1992. Une nouvelle Constitution était adoptée en 1976, confirmant la suprématie de ce dernier et faisant de l'Albanie une « république populaire socialiste »....
  • ALIA RAMIZ (1925-2011)

    • Écrit par Universalis
    • 549 mots

    Homme d'État albanais né le 18 octobre 1925 à Shkodër, Ramiz Alia fut président de la République albanaise (1982-1992) et dirigeant du Parti communiste albanais (1985-1991).

    Né de parents musulmans originaires de la région albanophone du Kosovo (alors en Yougoslavie), Ramiz Alia fait ses...

  • ALLEMAGNE (Politique et économie depuis 1949) - République démocratique allemande

    • Écrit par Georges CASTELLAN, Rita THALMANN
    • 19 516 mots
    • 6 médias

    La Deutsche DemokratischeRepublik (D.D.R., en français R.D.A.) s'est comportée, de sa création en 1949 à la chute du Mur de Berlin en 1989, comme la démocratie populaire la plus fidèle à Moscou et comme l'une des plus réticentes à faire place aux aspirations libérales qui se manifestaient...

  • BULGARIE

    • Écrit par Roger BERNARD, André BLANC, Christophe CHICLET, Nadia CHRISTOPHOROV, Universalis, Jack FEUILLET, Vladimir KOSTOV, Edith LHOMEL, Robert PHILIPPOT
    • 26 995 mots
    • 12 médias
    À partir de septembre 1944, des changements profonds s'opèrent dans la société bulgare. L'ancienne structure sociale, fondée sur la propriété privée, la monarchie constitutionnelle et les élites traditionnelles, est détruite. Un nouvel ordre social commence à s'établir sous la couverture...
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Voir aussi