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ALLEMAGNE (Histoire) Allemagne moderne et contemporaine

La partition (1945-1949)

Pour beaucoup de pays, 1945 ne représente pas seulement la fin de la guerre, mais un changement interne. Parfois un simple renversement de majorité, comme en Grande-Bretagne ; parfois le retour à la légitimité antérieure, comme en Norvège ou en Autriche ; plus souvent la naissance d'un nouveau régime, comme en France, au Japon et en Europe de l'Est. Mais ces changements sont peu de chose par rapport à la discontinuité profonde et multiple que vit l'Allemagne. On a le choix entre les dates symboliques : le 20 avril, l'Union soviétique remet à l'administration de la Pologne un cinquième du territoire allemand d'avant les conquêtes hitlériennes, dont la population est expulsée au-delà de la ligne Oder-Neisse ; le 8 mai, la capitulation sans condition marque l'aboutissement du grand massacre voulu et déclenché par Hitler ; le 5 juin, une proclamation des vainqueurs annonce que ceux-ci prennent en main la souveraineté de l'Allemagne ; le 30 juillet, le système d'occupation quadripartite dont naîtront la division de l'Allemagne et celle de Berlin commence à fonctionner. Ainsi, peu de semaines après avoir dominé l'Europe, l'Allemagne devient un simple objet de la politique internationale. Le retour à l'état de sujet agissant se fera lentement, de façon incomplète, en fonction du conflit qui va opposer les vainqueurs. Le traumatisme éprouvé par les esprits, les bouleversements subis par la société et le système politique, les changements introduits par les occupants laisseront des marques définitives qui, malgré des continuités économiques et sociologiques peu à peu révélées, font de 1945 une date charnière de l'histoire allemande.

Incident à la frontière entre les deux Allemagnes, vers 1950 - crédits : Jung/ Hulton Archive/ Getty Images

Incident à la frontière entre les deux Allemagnes, vers 1950

1945 à 1962. La décolonisation - crédits : Encyclopædia Universalis France

1945 à 1962. La décolonisation

Le procès de l'Allemagne en ruine

À l'époque, livres et films s'intitulent volontiers « Allemagne, année zéro ». Parce que le pays vaincu apparaît si détruit, si désemparé que tout semble à reconstruire, depuis les maisons jusqu'aux esprits. Mais aussi parce que, pour beaucoup, Hitler a été l'aboutissement fatal du « germanisme ». L'hitlérisme défait, il n'y a en quelque sorte plus d'histoire allemande possible, puisque ce serait une histoire d'après la fin des temps. Aujourd'hui encore, il faut veiller à ne pas examiner le comportement des Allemands de 1933-1945 à partir d'une sorte de racisme, à ne pas appliquer un mode d'explication déterministe à l'évolution de l'Allemagne jusqu'en 1933. On aboutit d'ailleurs vite à un cercle vicieux : les Allemands auraient été de tout temps disposés à la barbarie, ce qui expliquerait l'ascension de Hitler, et la preuve de cette disposition résiderait précisément dans cette ascension. « Des formes psychiques remontant à la préhistoire », « l'erreur de traiter les Allemands comme s'ils étaient des hommes semblables aux autres » : les charniers et les fours crématoires permettent assurément de comprendre certaines affirmations de 1945, ils ne les justifient pas, d'autant moins qu'on aurait pu se demander de quoi des hommes d'autres nationalités étaient capables et qu'on aurait dû voir que les camps de concentration hitlériens avaient été organisés pour recevoir et faire souffrir des Allemands.

Réfugiés allemands à Sarrebruck, en 1945 - crédits : Horace Abrahams/ Hulton Archive/ Getty Images

Réfugiés allemands à Sarrebruck, en 1945

Bombardements de Dresde - crédits : Evening Standard/ Getty Images

Bombardements de Dresde

La population allemande, de son côté, fut loin de se poser dans son ensemble la question qui, aujourd'hui encore, hante une élite en Allemagne : Wie konnte es geschehen ? « Comment cela a-t-il pu arriver ? » Beaucoup d'Allemands ne voulaient pas savoir quelle avait été la vraie nature du régime hitlérien. Souvent il s'est agi d'une réaction de crainte. Connaître la vérité eût conduit à s'avouer qu'au fond on l'avait soupçonnée de tout temps et qu'on avait refusé d'y réfléchir sérieusement, parce qu'on eût ainsi été amené soit à agir dangereusement, soit à[...]

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Écrit par

  • : maître assistant à la faculté des lettres et sciences humaines de Rouen
  • : professeur émérite des Universités, Institut d'études politiques de Paris

Classification

Pour citer cet article

Michel EUDE et Alfred GROSSER. ALLEMAGNE (Histoire) - Allemagne moderne et contemporaine [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Allemagne, 1648 - crédits : Encyclopædia Universalis France

Allemagne, 1648

Sedan - crédits : Henry Guttmann/ Hulton Archive/ Getty Images

Sedan

Paris assiégé - crédits : Nadar/ Hulton Archive/ Getty Images

Paris assiégé

Autres références

  • ALLEMAGNE - Les institutions

    • Écrit par Stéphane SCHOTT
    • 4 249 mots

    Les institutions de la république fédérale d’Allemagne sont définies par la Loi fondamentale (L.F.), ou Grundgesetz, du 23 mai 1949. Pensé à l’origine comme une Constitution provisoire pour l’Allemagne de l’Ouest, le Grundgesetz s’applique à toute l’Allemagne depuis le 3 octobre 1990....

Voir aussi