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PÉLAGIANISME

Doctrine qui, professée au ive siècle par Pélage et ses partisans, accentue au détriment de la grâce divine la puissance du libre arbitre de l'homme, le pélagianisme est la première en date des hérésies de l'Occident chrétien ; il constitue en fait l'amplification d'une des tendances fondamentales du christianisme, s'inspirant à la fois de toute une tradition grecque prônant une certaine autonomie de la personne humaine jugée indispensable à son épanouissement, mais aussi d'une conception romaine de la personne et du contrat qui la lie à Dieu en toute liberté.

Histoire de la controverse

Pélage, originaire d'Irlande, est en 410 établi à Rome depuis un long moment ; il y mène, comme laïque, une vie d'ascèse et groupe autour de lui d'assez nombreux disciples, venus du milieu ecclésiastique romain et de la haute aristocratie. Il professait des idées sur la liberté et la grâce qu'alors nul ne suspectait. Fuyant l'invasion d'Alaric en 410, il se réfugie en Afrique, puis, très vite, gagne la Palestine où il trouve le meilleur accueil auprès des évêques et dans les monastères fondés et financés par ses nobles protecteurs romains. Mais, en 415, il est dénoncé comme responsable d'une hérésie qu'entre-temps son disciple Caelestius avait divulguée en Afrique et qu'un concile, réuni à Carthage en 411, avait solennellement condamnée. Se désolidarisant d'avec son malencontreux disciple, Pélage est absous par le Concile de Diospolis (415) et, s'estimant à l'abri, il déploie une intense activité épistolaire. L'épiscopat africain, animé par Augustin, évêque d'Hippone, refuse cependant d'admettre la décision des Orientaux et obtient de l'évêque de Rome Innocent une double condamnation de Pélage et de Caelestius (27 janvier 417). Pélage fait agir ses amis romains et, en septembre, le successeur d'Innocent, Zosime, le réhabilite. Cela provoque de nouveau une réaction violente de l'épiscopat africain, qui multiplie les démarches auprès de l'évêque de Rome et surtout auprès de la Cour impériale. Entre-temps, Caelestius était venu à Rome se faire blanchir par Zosime ; ce dernier hésite et suggère un supplément d'information. Mais, le 30 avril 418, l'empereur Honorius frappe de proscription Pélage en même temps que Caelestius ; le lendemain, un concile de Carthage condamne radicalement les deux hérétiques, décision à laquelle se rallie le pape Zosime dans le courant de l'été. En vain Caelestius tente-t-il les années suivantes de faire agir les Orientaux en faveur de Pélage, qui est expulsé de Constantinople, où il s'était réfugié auprès de Nestorius, par ordre de la police impériale. On ignore ce qu'il devint par la suite. Mais un groupe d'évêques italiens, partisans de Pélage, protestent contre la condamnation de 418, sous la conduite de Julien, évêque d'Eclane, en Campanie. Ce dernier, dans l'hiver 419-420, organise une campagne auprès de l'opinion publique et de la cour impériale et accuse formellement l'épiscopat africain d'avoir acheté par de somptueux cadeaux la décision de l'empereur. Il est naturellement banni à son tour et se réfugie en Orient où il rédige de violents réquisitoires contre la doctrine augustinienne de la grâce. Comme Caelestius, il tente d'intéresser Nestorius au sort des pélagiens. Il est à son tour condamné en 431 et, malgré une tentative en 439, ne pourra jamais réintégrer son diocèse.

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Écrit par

  • : professeur émérite à l'université de Paris-Sorbonne, directeur de l'Institut de recherches pour l'étude des religions

Classification

Pour citer cet article

Michel MESLIN. PÉLAGIANISME [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AUGUSTIN saint (354-430)

    • Écrit par Michel MESLIN
    • 8 969 mots
    • 2 médias
    ...était-il en voie de solution qu'un autre problème grave sollicitait l'attention de l'évêque d'Hippone. Un concile réuni à Carthage condamnait, en 411, la doctrine d'un moine, Celestius, qui se réclamait de l'enseignement de Pélage, moine breton très influent dans une certaine société aristocratique romaine....
  • CARTHAGE CONCILES DE

    • Écrit par Pierre Thomas CAMELOT
    • 403 mots

    Métropole de l'Afrique proconsulaire, étendant son autorité jusqu'à la Numidie et la Maurétanie, Carthage vit se réunir autour de ses évêques de nombreux conciles. Vers 220, Agrippinus réunit soixante-dix évêques qui refusent de reconnaître le baptême conféré par des hérétiques....

  • CÉLESTIUS (Ve s.)

    • Écrit par Pierre Thomas CAMELOT
    • 282 mots

    Disciple de Pélage. Originaire sans doute d'Italie, Célestius rencontra celui-ci à Rome vers 405 et se mit à son école. Il le suivit en Afrique vers 410. Condamné par le concile de Carthage (411) à cause de sa position sur la baptême des enfants, il passe d'abord en Sicile, puis en Orient : à Éphèse,...

  • OROSE (1re moitié Ve s.)

    • Écrit par Hervé SAVON
    • 1 600 mots
    ...erreurs d'Origène. D'autre part, ce jeune homme, endurant et tout dévoué à Augustin, serait un excellent messager. Orose trouva la Palestine agitée par une controverse qu'il avait déjà rencontrée à Carthage : la querelle pélagienne. Jérôme, qui avait pris sur ce point le même parti qu'Augustin, accusait...

Voir aussi