MONGOLIE, histoire
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L'époque gengiskhanide
L'épopée gengiskhanide marque à plus d'un titre une coupure dans l'histoire mondiale. En Asie centrale d'abord, un processus de différenciation entre peuples turcs et peuples mongols arrive à son terme. La Mongolie propre appartient désormais aux seuls Mongols – les autres groupes n'apparaissant en cette région qu'à titre de minorités intégrées – tandis que la turcisation et l'islamisation des steppes occidentales, entamées aux siècles précédents, vont s'achever bientôt, aux dépens des Gengiskhanides eux-mêmes.
L'unité de peuplement du territoire mongol, jointe à une brusque abondance des sources historiques contrastant avec une extrême pauvreté pour les époques antérieures, permet de mettre en lumière toute une série de problèmes d'un intérêt capital pour l'histoire des steppes tant prégengiskhanides que postgengiskhanides : ainsi, la spécificité et la remarquable continuité à travers les siècles d'une civilisation nomade ; une évolution indiscutable, depuis le temps auquel les matériaux permettent de remonter, des structures sociopolitiques et des méthodes de nomadisation ; les processus d'édification et de destruction des empires nomades.
Mais aussi, sous l'effet des conquêtes, l'histoire des Mongols se confond, pendant un temps, avec celle des pays sédentaires. C'est, pour un peuple nomade, le passage d'un « empire des steppes » à des dynasties de conquête et l'amorce d'une acculturation à des formes de civilisation plus évoluées et, pour les pays sédentaires, une rupture d'évolution dont la portée réelle est encore l'objet de discussions parmi les spécialistes. Car l'histoire de l'« Empire universel » des Mongols, si elle a enflammé les imaginations et fait couler des flots d'encre, est, par la multitude et la diversité des pays qu'elle concerne, d'une complexité qui a défié jusqu'à maintenant les synthèses exhaustives. Les massacres et les destructions, pour étendus et systématiques qu'ils aient été, ne semblent cependant pas – surtout en Chine – avoir atteint l'ampleur que la terreur des contemporains leur a attribuée ; et la régression culturelle, qui leur a fait immédiatement suite, paraît souvent tout autant causée par un affaiblissement et une désintégration des pays sédentaires avant le déferlement de l'invasion. Mais, en tout cas, la domination mongole a exercé sur le cours de l'histoire des pays conquis – Chine, Iran, Russie, Arménie, nord de l'Inde... – une action considérable dont il n'appartient pas de traiter ici.
Origines de Gengis-khan
Comme toutes les grandes familles turques ou mongoles de l'Asie centrale ancienne, celle de Gengis-khan se transmettait, de génération en génération, le récit mythique d'une origine supranaturelle. Le culte rendu à Gengis-khan dès sa mort permit d'en fixer le souvenir : « L'origine de Gengis-khan est le Loup gris-bleu, né avec son destin venu du Ciel supérieur, et sa femme la Biche fauve. »
Généalogie des principaux Gengiskhanides et des dynasties qui en sont issues (les noms des grands-khans mongols, composés en majuscules, sont affectés d'un numéro d'ordre à partir de Gengis-Khan ; ceux des khanats et des dynasties fondés par les fils et les petits-fils de Gengis-khan sont...
Crédits : Encyclopædia Universalis France
Plus prosaïquement, ses ancêtres appartiennent à un sous-clan mongol des Borǰigin, un de ces nombreux groupuscules qui se disputent âprement la steppe dans une alternance de prospérité et de misère. Après une longue période d'anarchie, ils ont réussi, vers la fin du xie siècle et le début du xiie, à regrouper autour d'eux un certain nombre de tribus. Qabul-khan, donné comme arrière-grand-père de Gengis-khan, avait été le chef le plus brillant de ce premier embryon de confédération mongole. Mais sous ses successeurs, son cousin Ambaqai et son fils Qutula-khan (sans doute le grand-oncle de Gengis-khan), les coups conjoints de deux ennemis redoutables – les Tatar, déjà évoqués, et les J̌ürčen ou Jin, maîtres « barbares » de la Chine du Nord – ont disloqué la petite union mongole.
Lors de la naissance de Temüǰin, le futur Gengis-khan, au milieu du xiie siècle (les sources persanes le font naître en 1155, les sources chinoises en 1162 – et c'est la date qui a été retenue par la Mongolie postcommuniste pour célébrer l'anniversaire de son grand homme ; mais l'érudit Paul Pelliot, et nombre d'autres à sa suite, ont opté pour 1167), les tribus les plus puissantes sont alors, non plus les Borǰigin, mais les Tatar, les Merkit et surtout des peuples d'une civilisation déjà évoluée, largement convertis au christianisme nestorien, les Naiman et les Kereit – ceux-ci dirigés par Togril-khan, personnage dans lequel les contemporains auraient vu le fameux « [...]
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Écrit par :
- Françoise AUBIN : directeur de recherche au C.N.R.S. et à la Fondation nationale des sciences politiques (C.E.R.I)
- Vadime ELISSEEFF : conservateur en chef du musée Guimet, directeur d'études à l'École pratique des hautes études en sciences sociales
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Pour citer l’article
Françoise AUBIN, Vadime ELISSEEFF, « MONGOLIE, histoire », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 23 janvier 2023. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/mongolie-histoire/