- 1. Perception, représentation et production de la couleur dans les civilisations antiques
- 2. Les couleurs dans les religions monothéistes
- 3. Techniques et traités au Moyen Âge
- 4. Couleurs et lumière
- 5. La couleur industrielle
- 6. Symbolique des couleurs et société industrielle
- 7. Les couleurs de la ville moderne
- 8. Bibliographie
COULEURS, histoire de l'art
Il n'existe pas aujourd'hui de théorie définitive de la couleur. L'approche du phénomène de la vision chromatique hésite entre des systèmes physiques et des systèmes psychologiques ; elle en appelle aujourd'hui à l'optique, science qu'elle avait pendant des siècles tenue à l'écart de cette recherche. La couleur tient de l'art et de la science, de la physique et de la psychologie, elle est à la limite de deux cultures.
Dans les Optical Lectures (1669-1671), Isaac Newton maîtrisa la perception de la couleur par « une théorie solide et cohérente [...] fondée sur des expériences sûres, et qui résolvait tous les problèmes » (phénomène de la réfraction de la lumière, classification des couleurs du spectre). Une telle théorie semble rendre inconsistante une histoire de la couleur qui ne serait pas celle des progrès de la science de l'optique et de la vision et de ses discours strictement « physiques » ou « psychologiques ».
Longtemps, d'Aristote à Descartes et aux philosophes des Lumières, la couleur a été au centre du discours philosophique. Aujourd'hui, au-delà du champ relativement clos de la pratique scientifique et au-delà du domaine stimulant de l'art moderne, la réflexion sur la couleur apparaît comme un dépôt archéologique où s'entassent des approches scientifiques diverses. L'analyse de la perception et de la production de la couleur a distingué quelques points particuliers, tout en les isolant de la « structure culturelle » qui les a produits.
L'analyse ethnologique préfère parler de couleurs primitives, réduites à trois – blanc, noir et ocre –, sans cependant perdre de vue un inaccessible corpus des couleurs primitives (discours prélinguistique) qui comprend par exemple une centaine de rouges pour les tribus maori de Nouvelle-Zélande ou sept types de blancs pour les Esquimaux.
Enfin, des analyses récentes de patrimoines linguistiques variés ont mis en valeur des constantes dans le langage chromatique ; elles montrent comment, dans de nombreuses cultures, à partir du blanc et du noir, qui évoluent généralement en opposition au rouge, s'élabore un développement de la perception des couleurs qui engendre une prolifération des noms les désignant.
Eugène Chevreul a proposé en 1864, avec un répertoire de 14 400 tonalités chromatiques, un catalogue universel de la couleur, à l'époque même de la prolifération des colorants industriels et synthétiques (aniline, mauvéine, fuchsine, méthylène). Il entendait ainsi définir les couleurs, rendre compte des mélanges et indiquer les effets de leurs contrastes pour discipliner « l'assortiment des objets colorés » dans l'industrie de la couleur. Dans la seconde moitié du xixe siècle, la chimie bouleverse la perception et l'univers culturel des couleurs obtenues par manipulations tinctoriales à base de plantes et d'insectes. Perception et signification des couleurs sont liées en effet aux moyens et aux techniques de leur production ; des gammes chromatiques d'une époque donnée sont difficilement comparables à d'autres gammes chromatiques d'époques et d'origines différentes. La connaissance de la couleur ne peut être réduite aux approches dites scientifiques, elle ne peut être détachée du contexte qui permet son existence.
Les catégories proposées en 1810 par Goethe (couleurs physiologiques, physiques, chimiques), complétées par celles de l'harmonie, du contraste et de la différence chromatique, font du discours sur la couleur un discours issu de l'observation des « objets-dans-la-lumière » en même temps qu'une réflexion sur la nature respective de la couleur et de la lumière.
Perception, représentation et production de la couleur dans les civilisations antiques
Chez les Égyptiens, la notion des couleurs et de leur représentation est[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Manlio BRUSATIN : professeur à l'université de Venise, département d'histoire et de critique de l'art
Classification
Médias
Autres références
-
ABSTRAIT ART
- Écrit par Denys RIOUT
- 6 718 mots
- 2 médias
...d'éloigner le spectre d'une dégradation de la peinture en simple objet ornemental, l'artiste projette de fixer dans la forme un contenu spirituel et émotionnel. La couleur joue ici un rôle décisif. Kandinsky l'étudie en détail, et il consacre un chapitre à son action : « En règle générale, la couleur est donc... -
ALBERS JOSEF (1888-1976)
- Écrit par Yve-Alain BOIS et Encyclopædia Universalis
- 1 916 mots
...les exigences des nazis, ferme ses portes. Albers est invité par cette autre pépinière artistique qu'est le Black Mountain College en Caroline du Nord. C'est là qu'il se lancera dans ce qu'il considère comme « sa contribution », l'exploitation des richesses de l'interaction de la couleur : l'ouverture... -
ALTDORFER ALBRECHT (1480 env.-1538)
- Écrit par Pierre VAISSE
- 2 746 mots
- 7 médias
Comme coloriste, Altdorfer atteint le sommet de son art entre environ 1511 et 1518 avec les panneaux, consacrés à la Passion du Christ et à la légende de saint Sébastien, d'un retable (aujourd'hui démembré) commandé par le prieur de l'abbaye de Saint-Florian, près de Linz. Contemporain de... -
ANGLAIS (ART ET CULTURE) - Peinture
- Écrit par Jacques CARRÉ et Barthélémy JOBERT
- 8 178 mots
- 12 médias
...cet art jusqu'alors dédaigné. Il a laissé des vues des Alpes, de la campagne romaine et du pays de Galles, qui sont remarquables par leur recours à de grandes plages de couleur uniforme puissamment architecturées. John Robert Cozens (1752-1797) donne de l'Italie une vision mélancolique, avec de vastes... - Afficher les 89 références