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CANCER Cancer et santé publique

La thérapeutique en cancérologie

Stratégies thérapeutiques

En dehors des métastases suffisamment volumineuses pour être décelables, il peut en exister de petites, non encore détectables mais dont l'existence éventuelle changerait le pronostic. Cette éventualité peut justifier un traitement général systématique par chimiothérapie que l'on qualifie dans ce cas d'adjuvante. On s'attache donc à estimer la probabilité de métastases occultes. La taille de la tumeur et l'envahissement ganglionnaire sont des éléments importants, mais qui ne suffisent pas. Selon les cas, les caractéristiques histologiques (grade) ou biochimiques de la tumeur ainsi que l'état général du malade (âge, sexe, état général) aideront à prescrire (ou non) une chimiothérapie adjuvante qui peut être pénible (voire dangereuse), mais dont l'utilisation améliore considérablement le pronostic dans certains cas (sein, colon, etc.).

Le choix du traitement doit encore tenir compte des souhaits du malade et de son état psychologique. Dans une proportion croissante de cancers, on évite les mutilations que comportent certaines interventions et on conserve l'organe ou la fonction. Par exemple, dans les cancers du larynx de taille importante deux attitudes sont possibles : soit une exérèse chirurgicale qui, en enlevant largement la tumeur et les tissus voisins, donne les plus grandes chances de guérison définitive mais qui, en supprimant le larynx, empêche, ou gêne considérablement, la phonation, ce qui, dans certaines professions, a des conséquences extrêmement graves ; soit une association de la chimiothérapie et de la radiothérapie avec conservation de la voix, mais le risque de récidive locale peut être un peu plus élevé si les cas ont été mal sélectionnés. Cependant, dans cette éventualité, le malade peut être guéri par une grande intervention chirurgicale pratiquée lors de la récidive. Au total, le pourcentage de survie à long terme est semblable dans les deux hypothèses, mais le traitement conservateur permet, dans deux tiers des cas, la conservation d'une voix normale. Le malade peut donc choisir le schéma thérapeutique qui lui convient le mieux (en fonction de sa profession, de son désir de conserver une phonation et de son acceptation des souffrances et des angoisses que causent une récidive). Les indications des traitements conservateurs ont été depuis deux décennies considérablement élargies (par exemple dans les traitements conservateurs radio-chirurgicaux du cancer du sein), par association chimio-chirurgicale (pour les ostéosarcomes) ou par chimiothérapie-radiothérapie (pour les cancers de l'anus). Ces associations ont réduit la fréquence des grandes mutilations et des séquelles causées par les traitements classiques, tout en augmentant, pour certains cancers, le taux de guérison.

Quelle que soit la méthode thérapeutique utilisée, la guérison n'est obtenue que si toutes les cellules tumorales capables de se multiplier indéfiniment ont été tuées ou rendues incapables de se diviser. Dans une tumeur de 1 gramme il y a un milliard de cellules et la taille moyenne des tumeurs lors du diagnostic est d'environ 100 grammes. Dans les tumeurs humaines, la proportion de cellules tumorales capables de se multiplier indéfiniment (cellules clonogènes ou cellules souches) est de l'ordre de 1 p. 100 à 1 p. 1 000. La dose (de radiothérapie ou chimiothérapie) capable de faire régresser considérablement la tumeur (en tuant 80 p. 100 des cellules) est très inférieure à celle qui est nécessaire pour obtenir une guérison. On ne peut donc déterminer la dose optimale que par tâtonnements ou mieux, par des essais cliniques. En effet, un reliquat tumoral d'une masse inférieure à 100 milligrammes est impossible à déceler cliniquement ou radiologiquement. La disparition complète de la tumeur est déjà un résultat appréciable puisqu'elle correspond à la mort[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite de la faculté de médecine de Paris-Sud

Classification

Pour citer cet article

Maurice TUBIANA. CANCER - Cancer et santé publique [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Cancers : incidence annuelle - crédits : Encyclopædia Universalis France

Cancers : incidence annuelle

Cancers : nombre de nouveaux cas et de décès en France - crédits : Encyclopædia Universalis France

Cancers : nombre de nouveaux cas et de décès en France

Angiographie cérébrale par l'artère carotide (rouge) - crédits : M. Laval-Jeantet

Angiographie cérébrale par l'artère carotide (rouge)

Autres références

  • CANCER ET ENVIRONNEMENT

    • Écrit par Dominique BELPOMME
    • 1 542 mots
    • 2 médias

    Jusqu'à récemment prévalait l'idée que la plupart des cancers sont causés par notre mode de vie. Depuis la Seconde Guerre mondiale, notre environnement s'est profondément modifié et, simultanément, de nouvelles maladies sont apparues, tandis que d'autres, tels les cancers, sont devenues beaucoup plus...

  • GÉNOMIQUE - Génomique et cancérologie

    • Écrit par Daniel LOUVARD, François SIGAUX
    • 4 785 mots
    • 1 média

    Le décryptage du génome humain, au début du xxie siècle, a facilité l'analyse du fonctionnement cellulaire sous l'influence des gènes. D'où l'entrée en scène d'une génomique fonctionnelle cancérologique qui s'attache notamment à comprendre, afin de les contrôler, les mécanismes de l'...

  • MÉTASTASES, médecine

    • Écrit par Brigitte BOYER
    • 7 561 mots
    • 4 médias

    Le terme « métastase » fut proposé en 1829 par Joseph Claude Récamier qui fut le premier, dans son traité Recherches du cancer, à montrer, par des observations anatomiques, que les métastases provenaient de l'émigration des cellules cancéreuses hors de la tumeur primaire et de leur greffe...

  • ADÉNOGRAMME

    • Écrit par Laurent DEGOS
    • 626 mots

    L'adénogramme correspond à l'examen du frottis du suc ganglionnaire après ponction d'un ganglion. La ponction de ganglion est une technique simple et sans danger. Le ganglion est piqué avec une aiguille, et le suc ganglionnaire est éjecté sur une lame grâce à une seringue. Ce suc est ensuite...

  • ADN (acide désoxyribonucléique) ou DNA (deoxyribonucleic acid)

    • Écrit par Michel DUGUET, Universalis, David MONCHAUD, Michel MORANGE
    • 10 074 mots
    • 10 médias
    ...télomérase. Il se trouve qu’on sait depuis 1994 que la télomérase est une enzyme clé de la cancérisation puisqu’elle est surexprimée dans près de 85 p. 100 des cancers tout en étant inactive dans les tissus sains. Ainsi, la télomérase est un marqueur de cancers dont l’activité peut être modulée par la structure...
  • AGNOTOLOGIE

    • Écrit par Mathias GIREL
    • 4 992 mots
    • 2 médias
    ...fin du xxe siècle. Proctor, qui avait auparavant travaillé sur la médecine raciale dans l’Allemagne nazie, introduit l’expression en 1995 dans Cancer Wars, ouvrage dont le sous-titre –  « Comment les politiques publiques façonnent ce que nous savons et ce que nous ne savons pas sur le cancer...
  • AMIANTE ou ASBESTE

    • Écrit par Universalis, Laurence FOLLÉA, Henri PÉZERAT
    • 3 488 mots
    L'exposition à l'amiante entraîne, par ordre de fréquence décroissante, des cancers broncho-pulmonaires, des mésothéliomes et d'autres tumeurs primitives de la plèvre et, avec une moins grande certitude, des cancers gastro-intestinaux, en particulier des cancers de l'estomac.
  • Afficher les 90 références

Voir aussi