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RHODES

Île principale de l'archipel du Dodécanèse, qui ferme la mer Égée entre la Crète et l'Asie Mineure, Rhodes est, à l'échelle grecque, une très grande île (1 404 km2) : longue de 77 kilomètres du nord-est au sud-ouest et large de 35 kilomètres, elle culmine à 1 250 mètres au mont Atabyros (ou Atabyrion). Composée surtout de collines et de plateaux calcaires, bien arrosés par des sources et des cours d'eau qui expliquent la variété exceptionnelle de sa flore, en dépit du déboisement qu'elle a subi depuis l'Antiquité, Rhodes jouit d'un climat particulièrement doux, où les températures extrêmes sont rares, aussi bien en été (moyenne de juillet-août : 25 0C) qu'en hiver (moyenne de janvier-février : 12 0C). Propice à l'agriculture en terrasses et disposée au commerce par sa situation, qui en fait une escale obligée sur la grande voie maritime qui relie la Grèce continentale aux ports du Levant et à l'Égypte, Rhodes sera, durant l'Antiquité et le Moyen Âge, une île prospère et convoitée, tantôt acteur et tantôt enjeu dans la lutte des puissances pour le contrôle de la Méditerranée orientale.

Rhodes, île ouverte

Si les traces de la présence humaine à l'époque préhistorique restent encore peu significatives (grottes d'Archangelos et de Callithiès), la fouille de Trianda, près de Ialysos, a révélé un habitat minoen des xvie et xve siècles avant J.-C., qui confirme les dires de Diodore de Sicile (V, 55, 1), pour qui les premiers habitants de l'île furent les Telchines, « fils de la mer », c'est-à-dire les Préhellènes de Crète, également établis dans l'île voisine de Théra. À partir du xve siècle, ils se firent peu à peu supplanter par l'arrivée de populations proto-grecques, celles qui développent sur le continent la civilisation mycénienne. L'abondance et la richesse des tombes attestent l'importance de ce premier essor, qui semble avoir été compromis au xiie siècle par l'effondrement des principautés mycéniennes : les témoignages archéologiques manquent entre 1150 et 950 avant J.-C. La tradition grecque, cependant, escamote élégamment ce hiatus de deux siècles en attribuant au légendaire roi Tlèpolémos, fils d'Héraclès, le partage de l'île entre trois cités : Ialysos au nord, Camiros à l'ouest, Lindos au sud. Le dialecte dorien qu'on y parlera jusqu'à l'époque hellénistique manifeste l'appartenance des cités de Rhodes et de l'angle sud-ouest de l'Asie Mineure à une composante du peuple grec différente de celle des cités ioniennes situées plus au nord.

C'est pourtant d'Athènes, cité ionienne par excellence, que provient le style géométrique qu'imitent les céramistes rhodiens à partir de la fin du xe siècle avant J.-C. – témoignage indirect d'une activité maritime qui va peu à peu devenir le trait dominant de la personnalité rhodienne, alors même que la prospérité agricole de l'île aurait permis à ses habitants de s'en dispenser. Dans un monde grec où les Doriens passent non sans quelque raison pour des paysans enclins à l'autarcie, les cités de Rhodes vont en effet présenter le paradoxe d'une ouverture résultant non pas d'une nécessité, mais d'un choix, stimulé peut-être par l'exemple des Phéniciens qui ne pouvaient manquer d'y relâcher. Ces échanges amèneront au viie siècle, durant la phase dite orientalisante de la civilisation grecque, un premier apogée des cités rhodiennes, plus sensible dans le matériel des tombes (nécropole de Camiros) que dans les fouilles faites sur le site des trois villes.

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Écrit par

  • : ancien membre de l'École française d'Athènes, professeur émérite d'archéologie grecque à l'université de Paris-X-Nanterre

Classification

Pour citer cet article

Bernard HOLTZMANN. RHODES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Rhodes, plan de la ville antique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Rhodes, plan de la ville antique

Victoire de Samothrace - crédits : Peter Willi/  Bridgeman Images

Victoire de Samothrace

Laocoon - crédits :  Bridgeman Images

Laocoon

Autres références

  • CHARÈS DE LINDOS (2e moitié IVe s. av. J.-C.)

    • Écrit par Alain MAHUZIER
    • 238 mots

    Sculpteur rhodien de l'école de Lysippe, Charès de Lindos est l'auteur du célèbre Colosse de Rhodes, gigantesque statue d'Hélios, protecteur de l'île de Rhodes. Exécutée en bronze, haute de soixante-dix coudées, ou cent cinq pieds (31 à 35 m) selon les textes, elle était...

  • COLOSSAL, art et architecture

    • Écrit par Martine VASSELIN
    • 3 262 mots
    • 17 médias
    ...aussi révélateurs que les réalisations concrètes, évidemment moins nombreuses. Les relations des historiens antiques (Strabon, Philon de Byzance) sur Rhodes, l'île aux mille statues colossales, toutes légendaires qu'elles aient pu être, ont eu autant de résonance pour les esprits que s'il en avait existé...
  • MAUSOLE (mort en 353 av. J.-C.)

    • Écrit par Valentin NIKIPROWETZKY
    • 514 mots

    Fils du satrape de Carie Hécatomnos qui exerce son pouvoir au milieu du ~ ive siècle, Mausole succède à son père en ~ 377-~ 376. Pratiquement indépendant du Grand Roi, il entretient tout d'abord d'excellentes relations avec le pouvoir central et il coopère en ~ 365 avec le karanos...

  • SANCTUAIRE, Grèce hellénistique et Rome antique

    • Écrit par Pierre GROS, John SCHEID
    • 8 293 mots
    • 4 médias
    Les mêmes moyens, mais utilisés à d'autres fins, se décèlent dans les grands ensembles de Cos ou de Lindos de Rhodes. Ces sanctuaires dits à terrasses ont été longtemps considérés comme les créations les plus représentatives de la période hellénistique ; elles ont été remises récemment à leur place,...

Voir aussi