GROUPES (mathématiques)Représentation linéaire des groupes
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Applications aux groupes finis
Les caractères irréductibles χ1, ..., χc d'un groupe fini G forment un outil très puissant dans l'étude de G. On considère leurs valeurs comme des invariants numériques de G, invariants qui doivent satisfaire à plusieurs conditions fortes, comme les relations d'orthogonalité, et qui sont liés à la structure algébrique de G. On combine ces conditions et ces relations pour montrer des théorèmes parfois surprenants sur G.
On utilise d'abord les caractères pour trouver des sous-groupes distingués de G. Pour i = 1, ..., c, soit Wi un G-espace ayant χi pour caractère ; on appelle noyau de χi, le sous-groupe distingué Ker(χi) formé de tous les σ de G opérant trivialement sur Wi par σw = w, pour tout w dans Wi. Il est important de noter que ce sous-groupe distingué est caractérisé par les valeurs de χi : c'est l'ensemble de tous les éléments σ de G tels que χi(σ) = χi(1).
Il n'y a qu'un seul caractère χi tel que Ker(χi) = G, le caractère trivial χ1 dont les valeurs sont χ1(σ) = 1 pour tout σ de G. Pour tout caractère non trivial χi, i ≥ 2, il existe un élément σ de G tel que χi(σ) ≠ χi(1).
On peut aussi montrer que, pour tout élément σ ≠ 1 de G, il existe au moins un caractère non trivial χi tel que χi(σ) ≠ χi(1).
Une connaissance très grossière des valeurs des caractères de G peut permettre de prouver l'existence d'un sous-groupe distingué K qui soit non trivial (K ≠ {1}, K ≠ G). Il suffit de trouver un seul élément σ ≠ 1 et un seul caractère non trivial χi tel que χi(1) = χi(σ). Le sous-groupe K = Ker(χi) est alors un sous-groupe distingué non trivial.
On s'intéresse aux relations entre la structure des sous-groupes de G et les caractères de G. Une de ces relations a trait aux ensembles à intersections triviales. Un tel ensemble S est un sous-ensemble d'un sous-groupe H, appelé normalisateur de S, dont les conjugués σ-1Sσ satisfont à :


Voici un exemple d'un tel ensemble S : pour tout σ de G, on désigne par Rac(σ) l'ensemble de tous les τ de G qui sont racines de σ (il existe n tel que τn = σ). Rac(σ) est un ensemble à intersections triviales, et le sous-groupe H est le normalisateur du sous-groupe cyclique < σ > engendré par σ. C'est le groupe formé de tous les éléments ρ de G, tels que ρ-1 < σ > ρ = < σ >.
Soit ϕ1, ..., ϕc les caractères irréductibles de H. On désigne par X(H | S) le groupe additif formé des combinaisons linéaires :


En combinant cette équation avec la loi de réciprocité (6), on trouve que l'application ψ ↦ ψG est une isométrie X(H | S) ↦ X(G), c'est-à-dire que l'on a :

Frobenius fut le premier à utiliser cette isométrie. Il considéra le cas où S est égal au sous-groupe H moins l'élément neutre 1. On désigne par K le sous-ensemble de tous les éléments τ de G qui n'appartiennent à aucun conjugué σ-1Sσ de S. Le théorème de Frobenius dit que l'ensemble K est un sous-groupe distingué de G. On appelle groupe de Frobenius tout groupe G possédant un sous-groupe H différent de {1} et de G, ayant la propriété énoncée dans le théorème de Frobenius. Le sous-groupe distingué K s'appelle le noyau de Frobenius (cf. groupes [mathématiques] - Groupes finis).
La théorie des caractères exceptionnels est basée sur l'isométrie (9). Supposons que ϕi et ϕj soient deux caractères irréductibles distincts de H tels que ϕi − ϕj appartienne à X(H | S). On a alors :


Mais les ai sont des entiers. Ils sont donc tous nuls, sauf deux d'entre eux, ai et aj, qui valent ± 1. Si ai = aj = ± 1, on a :


On dit que χi et χj sont les caractères exceptionnels de G correspondant à ϕi et ϕj. À cause de (5), ces deux caractères sont égaux en dehors des conjugués de S. Sur ces conjugués, leur différence est déterminée par (8). Ce type de résultat intervient, par exemple, dans la démonstration par Feit et Thompson de leur célèbre théorème : « Tout groupe d'ordre impair est résoluble. » Feit et Thompson utilisent la théorie des caractères exceptionnels pour des isométries [...]
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Écrit par :
- Everett DADE : professeur à l'université de l'Illinois
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Pour citer l’article
Everett DADE, « GROUPES (mathématiques) - Représentation linéaire des groupes », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 13 août 2022. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/groupes-mathematiques-representation-lineaire-des-groupes/