FANTASY

Fantasy et fantastique

Le succès de la fantasy et sa présence toujours plus forte à l'intérieur des autres genres littéraires imposent de remettre en question la distinction, héritée de Tzvetan Todorov, entre fantastique et merveilleux, qui ne connaît d'ailleurs pas d'équivalent en langue anglaise. Avec le néo-gothique, qui caractérise les héritiers de Lovecraft, et le fantastique contemporain de Stephen King, ce genre, traditionnellement défini par le doute ou l'hésitation sur ce qui est en train de se produire, tend davantage à se caractériser par un répertoire de motifs porteurs d'un effet spécifique : peur, effroi, angoisse. S'il peut y avoir du fantastique dans une œuvre de fantasy où les éléments surnaturels font cette fois office de lois naturelles, la manière dont le récit se termine peut constituer un élément discriminant efficace : le récit de fantasy serait en effet, selon l'essai On Fairy Stories de Tolkien (1939), voué à bien finir pour être fidèle à sa promesse de consolation ou même de joie religieuse. C'est ce que Tolkien appelle l'« eucatastrophe », le « bon retournement » : la fantasy laisse ainsi son lecteur sur le sentiment d'une défaite au moins provisoire du Mal. Même si la victoire est fragile, le soulagement promis n'en est pas moins décisif. Les tendances récentes à la promotion des gentils monstres et au croisement du fantastique avec le genre sentimental (la romance paranormale) accentuent son rapprochement avec le domaine de la fantasy, où le surnaturel n'est pas problématique. La peur trouve davantage place dans des genres pseudo-réalistes, comme le thriller ou le roman noir.

Entre science-fiction et roman historique

Science-fiction et fantasy sont cette fois deux genres qui relèvent du merveilleux : l'inconnu s'y explique, mais de manière très différente, par la science ou la magie. Parce qu'ils sont souvent confondus dans la perception publique, leurs théoriciens respectifs s'attachent à les distinguer : la science-fiction en particulier fait valoir sa différence, celle d'une cohérence rationnelle toujours présente à l'arrière-plan de ce qui peut paraître invraisemblable. Les deux imaginaires sont certes très éloignés dans leurs expressions extrêmes : d'un côté, une science-fiction scientifiquement rigoureuse, avec des descriptions anti-utopiques de futurs proches, de l'autre, une épée magique buveuse d'âmes (dans le Cycle d'Elric de Michael Moorcock), des elfes, des nains et des magiciens. Mais ces univers tendent à se rejoindre sur des frontières partagées, héritage commun de leurs origines dans la tradition du roman d'aventures, de la quête héroïque médiévale aux explorations exotiques du roman colonial ou du western.

La science-fiction d'aventure et d'évasion (qui privilégie les découvertes de planètes et les combats spatiaux) peut ainsi être proche du merveilleux de fantasy. Un sous-genre entier, la science-fantasy, s'est appliqué à explorer ces compatibilités dans les années 1980 (Cycles de Majipoor de Robert[...]