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PÉCHÉ, religion

Les expériences et les notions ayant trait à l'ordre du mal sont très diverses : depuis les sentiments plus ou moins conscients de honte, d'impureté ou de culpabilité, jusqu'au jugement moral le plus élaboré de la conscience, en passant par la transgression d'une loi (loi d'un groupe social, loi de la raison ou de la nature) ou par la conviction qu'un acte entraîne quelque désordre ou cause un tort à une personne, à un groupe, ou même à l'ordre des choses ou du monde. L'expérience du péché aussi bien que la notion de péché sont spécifiquement religieuses ; elles peuvent coïncider avec toutes ces autres expériences ou notions, mais elles désignent alors leur référence à un principe divin ou à un dieu, et font passer au premier plan la signification que revêtent ces actes, dès lors que cette référence devient la plus importante de toutes celles pouvant servir à qualifier leur valeur morale.

On peut donc dire qu'il n'y a pas de place pour l'expérience ni pour la notion de péché là où il n'y a pas référence à un principe divin, que leur contenu varie d'une religion à l'autre selon la conception qu'on a de la divinité et de la situation de chaque homme et de l'humanité en général par rapport à la divinité, et que tout changement dans ces conceptions entraîne un changement de ce qu'on met sous le mot péché.

Cette extrême diversité, identique à celle des représentations de la divinité et de ses rapports avec les hommes, rend impossible de présenter ici l'ensemble des conceptions religieuses du péché : même en se limitant aux conceptions chrétiennes ayant imprégné la culture occidentale, il est tout aussi impossible de présenter les différentes conceptions du péché qu'on peut actuellement rencontrer dans le catholicisme et dans les Églises orthodoxes ou protestantes, ou celles qu'on peut distinguer au cours des différents âges du christianisme. On se contentera donc de présenter la conception du péché qui se dégage du consensus actuel des différentes confessions chrétiennes, puis de signaler quelques questions que posent inévitablement certaines mutations culturelles contemporaines affectant les représentations de l'homme et de Dieu qui sous-tendent cette conception.

La conception chrétienne du péché

Péché et révélation

La qualification de péché désigne le fait qu'un acte est nuisible à la vie dont Dieu veut faire vivre les hommes au sein de l' Alliance selon laquelle il désire les rassembler en communion avec lui et entre eux. C'est donc le dessein de salut de Dieu qui est mis à mal par le péché et, en ce sens, il serait légitime de dire que Dieu est la principale et la première victime du péché. En tout cas, cela explique que dans le christianisme le péché soit l'objet d'une révélation par Dieu et ne puisse être connu que par elle : de même que l'Alliance ne peut être connue de l'homme que si Dieu la lui révèle, de même le péché, qui met à mal l'Alliance, ne peut être connu que si Dieu le révèle. Plus même, puisque c'est Dieu qui a l'initiative de l'Alliance et qui sait ce qu'elle représente pour lui et pour ce qu'il désire faire vivre à l'homme, c'est lui, et lui seul, qui peut juger qu'un acte est nuisible à la vie selon l'Alliance. C'est pourquoi, dans le Nouveau comme dans l' Ancien Testament, il n'y a jamais révélation par Dieu de l'Alliance sans qu'il y ait également révélation par lui de ce qui permet à l'Alliance de porter ses fruits ou de ce qui peut au contraire l'entraver. Et de même que, par la foi, l'homme donne son assentiment à ce que Dieu lui révèle de l'Alliance, de même est-ce par la foi que l'homme donne son assentiment à ce que Dieu lui révèle de l'Alliance, à ce que[...]

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Écrit par

  • : dominicain, théologien, ancien doyen de la faculté de théologie du Saulchoir

Classification

Pour citer cet article

Jacques POHIER. PÉCHÉ, religion [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ANGELUS SILESIUS JOHANNES SCHEFFLER dit (1624-1677)

    • Écrit par Eugène SUSINI
    • 2 059 mots
    ...Silesius aucune trace de prédestination, pas l'ombre d'un quelconque pessimisme. La grâce est ouverte à tous et même aux démons, car le seul péché est celui de l'« égoïté » et Narcisse est dans ce sens le symbole du pêcheur. Les démons pourraient être sauvés s'ils renonçaient à se vouloir...
  • ANGOISSE EXISTENTIELLE

    • Écrit par Jean BRUN
    • 2 552 mots
    • 1 média
    ...au point où elle s'évanouit ; la chute constitue un saut qualitatif que la psychologie ne peut expliquer et où la liberté tombe en syncope. Mais le péché ne supprime pas pour autant l'angoisse, car celle-ci entre désormais en relation avec ce qui a été posé et avec l'avenir puisque, avec le saut...
  • AUGUSTIN saint (354-430)

    • Écrit par Michel MESLIN
    • 8 969 mots
    • 2 médias
    Toute l'expérience personnelle d'Augustin s'inscrivait en faux contre cette théorie : l'homme seul est pécheur, il ne peut rien. De plus, la créature n'existe que par Dieu, seul Être au sens plénier du terme ; c'est de lui seul que l'homme doit attendre la sagesse et le bonheur. L'analyse psychologique...
  • BAÏUS MICHEL DE BAY dit (1513-1589)

    • Écrit par Raoul VANEIGEM
    • 703 mots

    Né à Meslin, dans le Hainaut, Michel de Bay, dit Baïus, doit sa célébrité à la polémique qu'il engagea sur la question de la grâce et de la prédestination. La controverse allait, après sa mort, connaître un éclatant rebondissement avec la querelle du jansénisme.

    Étudiant à l'université...

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Voir aussi