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MOYEN ÂGE La littérature en prose

Les mises en prose

Le phénomène des mises en prose permet de se faire une idée assez précise de la continuité et des ruptures des traditions narratives. Entre La Mort d’Aude (environ 1250) et le Gérard d’Euphrate (Paris, 1549), on a répertorié 78 mises en prose de textes longs, en grande partie datées ou datables entre le xive et le xvie siècle et concentrées entre la France et l’État bourguignon. Les rapports entre source et texte final sont d’une grande variété : prosifications fidèles et même mécaniques, réécritures globales, fusion de plusieurs textes en un seul et, par conséquent, mélange des genres (épique et romanesque, chronique et histoire, etc.). Le niveau stylistique et la réussite sur le plan esthétique sont tout aussi variés, parfois conditionnés par les exigences du marché du livre. C’est le cas du Giglande Claude Platin (Lyon, environ 1525, réimprimé trois fois au cours du xvie siècle), qui réunit de manière assez approximative le roman occitan Jaufré, Le Bel Inconnu de Renaud de Beaujeu et des extraits du Roman de Laurin. En même temps, la mise en prose peut être perçue par les auteurs comme une forme littéraire à part entière. C’est le cas du Livre deseschez amoureux moralisés d’Évrard de Conty (environ 1400, adapté par Jean Miélot en 1468), qui consiste en une mise en prose et en un commentaire moralisé et encyclopédique des Eschez amoureux en vers du même auteur, un poème qui suit la tradition allégorique du Roman de la Rose. Le modèle devient ainsi une œuvre digne de commentaires et la mise en prose une œuvre indépendante qui entrelace les rapports entre vers et allégorie, et entre prose et savoir.

À la fin du Moyen Âge, les conditions de l’échange culturel, de la circulation et de la consommation de la prose se sont encore diversifiées. Outre les modèles italiens, les nouveautés du panorama littéraire incluent la diffusion de la littérature anglaise dans le nord de l’Europe (Geoffrey Chaucer, Thomas Malory) et la fortune globale des romans de chevalerie espagnols, qui reçoivent une impulsion extraordinaire grâce à l’activité internationale des imprimeurs.

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Écrit par

  • : professeur, chargé de cours de littérature française du Moyen-Âge, université de Liège (Belgique)

Classification

Médias

<em>Livre des merveilles du monde</em>, M. Polo - crédits : BnF/ AKG-images

Livre des merveilles du monde, M. Polo

<em>Lancelot-Graal</em> - crédits : BnF, cote cliché RC-B-09666

Lancelot-Graal

<em>Chroniques</em>, J. Froissart - crédits : British Library/ AKG-images

Chroniques, J. Froissart

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