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HERMÉNEUTIQUE

La fécondité herméneutique de la distance temporelle (H.-G. Gadamer)

Emboîtant le pas de Heidegger, dont il avait suivi les premiers enseignements, Hans Georg Gadamer (1900-2002) publie en 1960 son œuvre majeure Vérité et méthode, qui donne un nouvel élan aux travaux herméneutiques. Le titre du livre indique l'orientation principale de cette herméneutique : soustraire les sciences de l'esprit à l'impérialisme méthodologique hérité de Descartes, et renouer avec les textes fondateurs de la tradition humaniste dans la ligne de Giambattista Vico. Entérinant le virage ontologique que Heidegger a imprimé au concept de compréhension, H. G. Gadamer se donne pour tâche d'en vérifier la pertinence pour les sciences de l'esprit. Une herméneutique philosophique digne de ce nom ne peut pas se contenter d'être une simple méthodologie générale à l'instar de la Teoria generale dell'interpretazione d'Emilio Betti. En reprenant la question de la vérité de l'art, puis celle de la conscience historique qui, d'après lui, engage le concept de « conscience de l'efficience historique » (wirkungsgeschichtliches Bewußtsein), Gadamer débouche finalement sur la thèse que le langage, milieu universel de toute compréhension, fonde l'universalité de l'herméneutique.

« Histoire de l'efficience », fusion des horizons, réhabilitation des préjugés, de l'autorité et de la tradition sont les concepts porteurs d'une élaboration de l'herméneutique qui fait de l'application le cœur de la compréhension et qui table sur une logique de la question et de la réponse, dans laquelle l'initiative n'appartient pas au sujet interrogateur, mais au texte qui le met en question.

Persuadé de la fécondité herméneutique inépuisable de la distance temporelle, H. G. Gadamer estime que les textes fondateurs de la tradition culturelle ne cesseront jamais de nous interpeller et de nous révéler, dans des situations historiques nouvelles, la part encore cachée de vérité qu'ils recèlent.

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Écrit par

  • : docteur en philosophie, professeur émérite de la faculté de philosophie de l'Institut catholique de Paris, titulaire de la chaire "Romano Guardini" à l'université Humboldt de Berlin (2009-2012)

Classification

Pour citer cet article

Jean GREISCH. HERMÉNEUTIQUE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Paul Ricœur - crédits : AGIP/ Bridgeman Images

Paul Ricœur

Wilhelm Dilthey - crédits : AKG-images

Wilhelm Dilthey

Martin Heidegger - crédits : G. Schütz/ AKG-images

Martin Heidegger

Autres références

  • AU DÉTOUR DU SENS. PERSPECTIVES D'UNE PHILOSOPHIE HERMÉNEUTIQUE (C. Berner) - Fiche de lecture

    • Écrit par Jean GREISCH
    • 971 mots

    Au cours du xxe siècle, la philosophieherméneutique s'est développée selon deux axes distincts : le premier se laisse guider par le concept de compréhension qui, tant chez Heidegger que chez Gadamer, ne désigne plus un mode de connaître, mais une manière d'être ; le second, suivi en France...

  • ALLÉGORIE

    • Écrit par Frédéric ELSIG, Jean-François GROULIER, Jacqueline LICHTENSTEIN, Daniel POIRION, Daniel RUSSO, Gilles SAURON
    • 11 594 mots
    • 5 médias

    On définit généralement l'allégorie en la comparant au symbole, dont elle est le développement logique, systématique et détaillé. Ainsi, dans la poésie lyrique, l'image de la rose apparaît souvent comme le symbole de la beauté, de la pureté ou de l'amour ; Guillaume de Lorris en...

  • ARISTOTE (env. 385-322 av. J.-C.)

    • Écrit par Pierre AUBENQUE
    • 23 786 mots
    • 2 médias
    Dans les interprétations les plus récentes de l'œuvre aristotélicienne, deux courants s'affrontent : le courant herméneutique et le courant analytique. Le premier, dominant chez les interprètes d'Europe continentale, s'intéresse au contexte linguistique et historique, à l'architecture...
  • BĀṬIN & BĀṬINIYYA

    • Écrit par Joseph CUOQ
    • 356 mots

    Le mot arabe bāṭin signifie « caché », « ésotérique », par opposition à ẓāhir qui est traduit par « explicite », « obvie », « littéral ». La distinction entre bāṭin et ẓāhir intervient dans l'interprétation du Coran, lequel, au-dessus du sens explicite...

  • BIBLE - L'inspiration biblique

    • Écrit par André PAUL
    • 4 564 mots
    • 1 média
    L'Égypte ancienne, déjà, attribuait ses « saintes écritures » au dieu écrivain ou scribe Thot, le précurseur d'Hermès. Proche de cette figure égyptienne, il y avait aussi, et surtout, le dieu babylonien Nabû, fils de Marduk : considéré comme le scribe par excellence, on l'appelait le « scribe des dieux...
  • Afficher les 42 références

Voir aussi