ZÊTA FONCTION
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Issues d'un calcul formel d'Euler, la « fonction zêta » de Riemann et les « fonctions L » de Dirichlet ont été jusqu'ici les outils analytiques les plus puissants pour étudier la répartition et les propriétés des nombres premiers (cf. théorie desnombres - Théorie analytique des nombres). Mais ces fonctions sont elles-mêmes devenues l'objet d'études analytiques poussées, en raison de leurs propriétés très particulières qui semblent être liées aux comportements les plus cachés de la théorie des nombres et sont encore loin d'être bien comprises.
Le mouvement d'idées qui tend, depuis 1920, à l'unification de la théorie des nombres et de la géométrie algébrique a conduit à définir, dans cette dernière théorie, des « fonctions zêta » et des « fonctions L » analogues aux fonctions classiques et présentant un comportement semblable. Il y a lieu de penser qu'on se trouve en présence de fragments encore mal reliés d'une vaste théorie générale, participant de l'analyse, de la théorie des groupes et de la géométrie algébrique, qui nous fera un jour pénétrer dans les recoins les plus mystérieux de la « reine des mathématiques » (C. F. Gauss), l'étude des nombres entiers.
La fonction zêta de Riemann
La série :




Une des démonstrations de Riemann lie la fonction zêta à une fonction thêta de Jacobi, grâce à l'expression de Γ(s) par l'intégrale eulérienne qui donne :




Vu la décroissance exponentielle de θ(it ) − 1/2 à l'infini, l'intégrale dans cette formule converge pour toutes les valeurs complexes de s et ne change pas quand on remplace s par − s + 1/2, d'où l'équation (3).
On voit aussitôt que s = 1 est le seul pôle de ζ(s) ; il est simple et de résidu 1 ; les points − 2, − 4, ... sont des zéros simples de ζ(s), dits « triviaux ». Les seuls autres zéros de ζ(s) sont tels que 0≤ σ ≤ 1 et Riemann a émis l'hypothèse, non encore démontrée, que tous ces zéros sont sur la droite σ = 1/2. On a en outre, pour le nombre N(T) des zéros contenus dans le rectangle 0 ≤ σ ≤ 1, 0 ≤ t ≤ T, l'expression asymptotique :

Riemann avait annoncé sans démonstration qu'il y a en fait une infinité de zéros sur la droite σ = 1/2 ; ce résultat fut prouvé par G. H. Hardy en 1914 et A. Selberg a établi en 1942 qu'il y a une constante A > 0 telle que le nombre de zéros pour lesquels on a σ = 1/2 et 0 ≤ t ≤ T est supérieur ou égal à AT Log T. On a calculé numériquement plus de trois millions de zéros de ζ(s) et on les a tous trouvés sur la droite σ = 1/2. Il faut noter toutefois qu'on connaît des exemples de séries de Dirichlet vérifiant des équations fonctionnelles du type (3) et ayant cependant une infinité de zéros où σ > 1.
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Écrit par :
- Jean DIEUDONNÉ : membre de l'Académie des sciences
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Pour citer l’article
Jean DIEUDONNÉ, « ZÊTA FONCTION », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 20 mai 2022. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/fonction-zeta/