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EAUX TERRITORIALES

En droit international, on entend par eaux territoriales, ou mer territoriale, l'espace maritime intermédiaire entre les eaux intérieures (lacs, estuaires ou baies) et la haute mer, espace compris entre la ligne de base de la mer territoriale côté terre et une ligne idéale qui, établie à la limite de la haute mer, est définie par l'État côtier et portée à la connaissance de la communauté internationale. On définit en principe la ligne de base des eaux territoriales par le tracé côtier que découpent les ouvrages les plus avancés des ports et, lorsqu'il s'agit d'une baie, les lignes de cap à cap ou les lignes déterminables entre les points extrêmes de la baie.

La notion d'eaux territoriales s'élabore au xviie siècle avec le développement de la réflexion politique sur le droit des gens. Certains théoriciens, notamment l'Anglais Selden, veulent réserver le contrôle des mers à l'Angleterre, d'autres (notamment ceux qui appartiennent à l'école du droit naturel) préconisent la libre circulation sur les mers et le droit pour les États côtiers de contrôler la circulation dans les eaux bordières. Chez ces derniers, deux conceptions s'affrontent : pour les uns, le contrôle doit équivaloir à une portée de canon des côtes ; pour les autres, il doit couvrir une zone littorale de largeur uniforme. À la fin du xviiie siècle, les principaux États intéressés s'accordent sur une solution de compromis et fixent la limite des eaux territoriales à 3 milles des côtes (5 km environ) ; cette convention devait être admise par les États-Unis d'Amérique en 1793 et par d'autres nations au cours du xixe siècle ; cependant, la limitation à 3 milles ne sera jamais universellement reconnue et ne constituera donc pas une norme de droit international.

Réunie à Genève en 1958, une conférence des Nations unies sur le droit de la mer a mis au point une convention définissant les principes généralement admis touchant la nature juridique de la mer territoriale ; entrée en vigueur en 1964, elle a notamment établi :

– Le droit pour tout État côtier d'exercer une pleine souveraineté sur ses eaux territoriales, sur le sol et le sous-sol qu'elles recouvrent, ainsi que sur l'espace aérien qu'elles délimitent ; un droit de passage inoffensif est reconnu aux navires marchands (et de guerre à partir de 1982) des autres pays, mais non aux navires de pêche, aux aéronefs et aux sous-marins en plongée.

– Le droit pour tout État côtier de contrôler comme son territoire (autorités douanières, fiscales, sanitaires, de police) une zone bordière d'une largeur minimale de 1 lieue marine (soit 3,45 milles).

La fixation de cette largeur minimale avait été imposée par les États occidentaux attachés au principe de liberté des mers. Malgré l'avis contraire et même l'opposition de ces États, certains pays (notamment la Chine populaire, l'Égypte, l'Inde, le Mexique, le Pakistan et l'U.R.S.S.) établirent dès cette époque la limite extérieure des eaux territoriales à 12 milles ; d'autres (tels le Chili, l'Équateur et le Pérou) affirmaient leur droit de juridiction sur les eaux s'étendant jusqu'à 200 milles (370 km) au large de leurs côtes, et arraisonnaient les navires de pêche nord-américains qui ignoraient leur décision. Pour éviter que les divergences d’intérêts ne conduisent à l’anarchie, la convention internationale de Montego Bay, signée le 10 décembre 1982, a trouvé une solution de compromis en retenant la limite des 12 milles et en créant à sa suite une zone économique exclusive au profit des États d’une largeur de 188 milles. Traditionnellement fixée à 3 milles, la limite des eaux territoriales françaises était d'ailleurs portée dès 1971 à une distance de 12 milles (22 km environ) des lignes de base ; la disposition était motivée[...]

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Classification

Pour citer cet article

Alain-Philippe CRESSARD. EAUX TERRITORIALES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ARCTIQUE (géopolitique)

    • Écrit par François CARRÉ
    • 6 852 mots
    • 2 médias
    ...ratifiée, et s'applique désormais à l'ensemble de l'océan mondial. Auparavant, la souveraineté des États sur les espaces océaniques ne portait que sur les eaux territoriales, larges de 3 milles en général, dans lesquelles ils étaient tenus de garantir un droit de passage « inoffensif » aux navires étrangers....
  • DÉTROITS ET ISTHMES

    • Écrit par Nathalie FAU
    • 6 042 mots
    • 5 médias
    ...d’adopter le régime du « passage en transit » : ils ne peuvent pas nationaliser les eaux, même si la largeur du détroit est théoriquement comprise dans leur mer territoriale (normalement étendue jusqu’à douze miles marins de la rive), ils ne peuvent pas imposer unilatéralement des taxes ou entraver la circulation...
  • FRANCE - L'année politique 2020

    • Écrit par Nicolas TENZER
    • 6 759 mots
    • 4 médias
    ...le président Recep Tayyip Erdogan ne sont pas récentes, mais elles connaissent de nouveaux épisodes en 2020, notamment à propos de la question des eaux territoriales, qui oppose Ankara à la Grèce et à Chypre, et du soutien de la Turquie à l’Azerbaïdjan lors de son offensive dans le Haut-Karabakh...
  • HAUTE MER, définition juridique et réglementation

    • Écrit par Pierre Michel EISEMANN
    • 352 mots

    Partie des mers et des océans qui n'est pas soumise à la juridiction des États côtiers, la haute mer, traditionnellement vouée à la navigation et à la pêche, peut être utilisée par les navires de tous les États. La navigation comme la pêche y sont libres. Le principe de liberté est...

  • Afficher les 7 références

Voir aussi