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AZTÈQUES

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Tenochtitlán, la grande cité lacustre du Nouveau Monde

L’aventure de Tenochtitlán débute au xive siècle au milieu des marécages inhospitaliers du lac de Texcoco. Fondée sur un îlot naturel qu’aurait désigné le dieu tribal Huitzilopochtli, elle devient en l’espace de deux cents ans le centre de l’empire aztèque. La construction de la plus grande cité lacustre du Nouveau Monde exigea des travaux d’aménagements colossaux et beaucoup d’imagination doublée d’une ingéniosité sans pareil. La puissance de cette mythique « nouvelle Venise », aujourd’hui ensevelie sous l’actuelle mégalopole qu’est la ville de Mexico, est peu à peu mise au jour par les nombreuses découvertes archéologiques qui conduisent à une nouvelle lecture du monde aztèque.

Au cours de l’année 2015, dans le cadre de la construction d’un nouvel aéroport de Mexico (projet finalement abandonné en 2018), l’équipe de la Direction du « sauvetage archéologique » de l’Institut national d’anthropologie et d’histoire mexicain (INAH) dirigée par l’archéologue Raúl Barrera Rodríguez découvre et explore une zone située à proximité immédiate du centre historique de la ville et composée de trente « jardins flottants » nommés chinampas et utilisés à l’époque aztèque. Il s’agit d’une découverte inédite et fondamentale qui, pour la première fois, marque une transition entre l’étude des descriptions historiques et celle, in situ, d’aménagements archéologiques liés à la vie lacustre de l’ancienne Tenochtitlán. Situé dans l’une de ses anciennes zones marécageuses, ce site à ciel ouvert de 4,5 hectares se localise dans l’actuel quartier (colonia) Transito, à deux kilomètres au sud du site archéologique du Templo Mayor. Dans les sources historiques datées principalement du xvie siècle, ce site aujourd’hui identifié comme celui d’Ateponazco appartenait au quartier de l’extrême sud-ouest de l’ancienne Mexico-Tenochtitlán, décrit comme une zone de culture composée de nombreuses chinampas. Les archéologues ont relevé une trentaine de ces parcelles artificielles d’approximativement 30 mètres de longueur sur 2 à 8 mètres de largeur. Il semblerait qu’elles aient toutes servi, à l’exception d’une seule comprenant un mur d’habitation, à une production visant l’autosuffisance des habitants du voisinage. Ces chinampas étaient délimitées en partie par l’une des grandes voies navigables qui reliaient le sud du bassin à la métropole, jusqu’aux abords de l’enceinte sacrée (recintosagrado). Elles étaient séparées les unes des autres par de petits canaux principalement utilisés pour l’irrigation. À cette découverte exceptionnelle s’ajoute la mise au jour de seize offrandes consacrées à des divinités agraires, le dieu du vent, Ehecatl-Quetzalcoatl, et celui du maïs, Chicomecoatl. Là, plus de six cents objets entiers, tels que figurines et céramique aztèque, parfaitement conservés, ont été trouvés. Cette pratique de rituels domestiques est à associer à la bénédiction des chinampas avant leur mise en culture, dans le but de s’assurer la protection des dieux. Toutefois, il semblerait que ce site ait connu un abandon assez rapide, moins d’une cinquantaine d’années après la chute de Tenochtitlán, principalement en raison du remaniement urbain imposé par les conquistadors.

Au commencement, l’eau et la boue

Le bassin de Mexico, situé à plus de 2 000 mètres d’altitude, est ceinturé par de hautes chaînes de montagnes volcaniques, ponctuées de sommets qui dominent le paysage, tels le Popocatépetl (5 452 m) et l’Iztaccíhuatl (5 230 m), amoureux maudits de la « légende des volcans » de l’époque préhispanique. De ces montagnes ruissellent de nombreux cours d’eau et rivières qui alimentaient, au rythme des saisons, cinq lacs de faible profondeur, établis à différentes altitudes : au nord,[...]

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Écrit par

  • : docteure en archéologie à l'université Paris I-Panthéon Sorbonne, chercheuse associée Universidad de Guadalajara (Mexique)
  • : docteure en archéologie des Amériques, chercheuse associée au laboratoire Archéologie des Amériques - UMR 8096 - CNRS
  • : assistante au musée de l'Homme

Classification

Pour citer cet article

Rosario ACOSTA NIEVA, Alexandra BIAR et Mireille SIMONI. AZTÈQUES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 21/03/2024

Médias

1300 à 1400. Tamerlan - crédits : Encyclopædia Universalis France

1300 à 1400. Tamerlan

Civilisations précolombiennes, Méso-Amérique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Civilisations précolombiennes, Méso-Amérique

Tripode, Teotihuacán - crédits : AKG-images

Tripode, Teotihuacán

Autres références

  • LES AZTÈQUES (exposition)

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    À de nombreux titres, l'exposition présentée à Londres, à la Royal Academy of Arts, du 16 novembre 2002 au 11 avril 2003, constitua un événement majeur pour la perception européenne des arts précolombiens. Tout d'abord, la qualité et la diversité des œuvres exposées, 359 au total dont beaucoup pour...

  • AZTÈQUES (notions de base)

    • Écrit par
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    • 13 médias

    Lorsque les conquistadores débarquent en 1519 sur les côtes du Mexique, la jeune civilisation aztèque est en pleine expansion. Installés depuis moins de deux siècles sur les rives du lac Texcoco, les Aztèques se sont imposés à leurs voisins en moins de cent ans. Leur société guerrière hérite d’une...

  • ALIMENTATION (Comportement et pratiques alimentaires) - Anthropologie de l'alimentation

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    C'est le cas des commentaires sur laconsommation du pulque d'agave au Mexique depuis l'époque précolombienne jusqu'à nos jours. On a répété à l'envi que les Aztèques n'autorisaient cette boisson fermentée faiblement alcoolisée qu'aux anciens, et dans des circonstances exceptionnelles ; que...
  • AMÉRINDIENS - Amérique centrale

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    L'empire aztèque s'est écroulé le 13 août 1521, jour de la prise de Mexico-Tenochtitlán par l'armée d'Hernán Cortés, armée composée en majeure partie d'Indiens désireux de secouer le joug aztèque. Au cours des années suivantes, l'occupation espagnole s'étendit aux autres...

  • AMÉRIQUE (Histoire) - Amérique espagnole

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    ...utilisé les divisions qu'ils avaient su discerner au sein du monde indigène : Cortés exploite les rancœurs des peuples tributaires de la confédération Aztèque, s'appuie sur Tlaxcala contre Tenochtitlan ; Pizarro profite de la querelle entre Huascar et Atahualpa pour la succession de l'empire inca. Ils...
  • NOUVEAU MONDE CHRONIQUES DU

    • Écrit par et
    • 3 656 mots
    • 8 médias
    ...indigène mexicain. Son œuvre est fondamentale tant pour l'étude de la religion et des mythes, que pour celle de l'histoire, des coutumes et des codex des Aztèques. Fray Diego de Landa, franciscain également, se livra à une semblable recherche sur la civilisation maya dans sa Relation des choses du Yucatán...
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