Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

AGRICULTURE Histoire des agricultures depuis le XXe siècle

Au début du xxe siècle, après dix mille ans d'évolution et de différenciation, les agricultures du monde étaient très diversifiées. Elles avaient atteint des niveaux relativement inégaux d'équipements et de productivité du travail (production annuelle par agriculteur à temps plein) : l'écart entre les agricultures manuelles, les moins performantes du monde, et les agricultures à traction animale mécanisée, les plus performantes, allait de 1 à 10 tonnes de céréales (ou d'équivalent-céréales) par travailleur et par an. Mais cet écart s'est beaucoup creusé au xxe siècle, car certaines agricultures ont été profondément transformées par une nouvelle révolution agricole, la deuxième des Temps modernes, concomitante de la deuxième révolution industrielle, tandis que beaucoup d'autres n'ont pas progressé. Ce développement agricole inégal s'est accompagné d'une énorme croissance de la production alimentaire mondiale, qui nourrissait, bien ou mal, plus de sept milliards d'êtres humains au début des années 2010, mais il a aussi conduit à beaucoup de pauvreté et de sous-alimentation, particulièrement répandues parmi les paysanneries du monde.

Le développement agricole inégal et contradictoire au xxe siècle

Amorcée aux États-Unis dès le début du xxe siècle, cette révolution agricole a été développée et généralisée au cours de la seconde moitié de ce siècle dans les pays industrialisés développés, où les secteurs agricoles étaient très majoritairement composés d'exploitations familiales. Ce processus a été soutenu par des politiques agricoles de grande ampleur, favorables à la modernisation de ces exploitations familiales. À partir du milieu des années 1960, une variante de cette révolution, que l'on nomme habituellement révolution verte, a été étendue à certains pays en développement tropicaux : là aussi, des politiques publiques très volontaristes ont favorisé la modernisation d'une partie des exploitations familiales. Enfin, à partir du milieu des années 1970, des acteurs d'un autre genre, disposant de capitaux importants, ont tiré parti de la libéralisation pour étendre cette révolution aux pays où les coûts de la terre et du travail sont particulièrement bas.

La révolution agricole dans les pays développés

Dans les pays développés, cette révolution agricole s'est déroulée par étapes, au fur et à mesure que l'industrie et la recherche en ont produit les moyens mécaniques, chimiques et biologiques : tracteurs et machines de puissance, de capacité et de complexité croissantes, permettant de réduire la force de travail humaine et animale ; engrais minéraux pour les plantes et aliments concentrés pour les animaux, permettant d'augmenter leurs rendements ; produits de traitement phytosanitaires et zoopharmaceutiques permettant de réduire les pertes dues à leurs ennemis ; variétés de plantes et races d'animaux sélectionnées, à haut rendement potentiel, adaptées à ces nouveaux moyens et permettant de les rentabiliser ; nouveaux moyens de transport, de conservation, de transformation et de distribution permettant aux exploitations des différentes régions de se spécialiser dans la (ou les) production(s) les plus avantageuse(s) localement.

En céréaliculture, par exemple, la puissance des tracteurs et la superficie maximale cultivable par un travailleur ont considérablement augmenté, de sorte que, d'une dizaine d'hectares par travailleur dans les années 1940, cette superficie est passée à une centaine dans les années 1980 et dépasse aujourd'hui 200 hectares par travailleur. Dans le même temps, grâce aux semences sélectionnées, aux engrais minéraux et aux pesticides, les rendements ont pu augmenter de plus de 1 tonne par hectare tous les dix ans, pour atteindre actuellement 10 tonnes[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur émérite à AgroParisTech (ex. I.N.A.-P.G.)
  • : professeure en sciences de la population et du développement, spécialisée dans les questions agricoles et alimentaires à l'Université libre de Bruxelles (Belgique)

Classification

Pour citer cet article

Marcel MAZOYER et Laurence ROUDART. AGRICULTURE - Histoire des agricultures depuis le XXe siècle [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Culture de la coca - crédits : Alain Labrousse

Culture de la coca

Agriculture : inégalités de productivité - crédits : Encyclopædia Universalis France

Agriculture : inégalités de productivité

Autres références

  • AGRICULTURE BIOLOGIQUE

    • Écrit par Céline CRESSON, Claire LAMINE, Servane PENVERN
    • 7 882 mots
    • 6 médias

    L’agriculture biologique (AB) est un mode de production et de transformation ayant pour objectif de préserver l’environnement, la biodiversité, le bien-être animal et le développement rural. Elle est définie dans ses principes par la Fédération internationale des mouvements d’agriculture biologique...

  • AGRICULTURE DURABLE

    • Écrit par Jean-Paul CHARVET
    • 5 444 mots
    • 10 médias

    Dans le langage courant, l’expression « agriculture durable » fait d’abord référence à une agriculture respectueuse de l’environnement, avec, comme principaux objectifs, la limitation du recours aux intrants (engrais, produits phytosanitaires…) d’origine industrielle. S’y ajoute la diversification...

  • AGRICULTURE URBAINE

    • Écrit par Jean-Paul CHARVET, Xavier LAUREAU
    • 6 273 mots
    • 8 médias

    L’expression « agriculture urbaine », qui était devenue un oxymore dans les pays industrialisés avec la disparition progressive au cours du xxe siècle des ceintures maraîchères entourant les villes, a retrouvé du sens. En effet, dans un contexte d’étalement urbain (urbansprawl) et...

  • FRANCE - (Le territoire et les hommes) - Espace et société

    • Écrit par Magali REGHEZZA
    • 14 002 mots
    • 3 médias
    L’insertion dans la mondialisation a des conséquences sur l’ensemble des systèmes productifs. Dans le cas de l’agriculture, elles viennent s’ajouter à des évolutions plus anciennes : la révolution productiviste et l’intégration européenne.
  • ADVENTICES

    • Écrit par Marcel BOURNÉRIAS
    • 804 mots

    Étymologiquement, une plante qui s'ajoute à un peuplement végétal auquel elle est initialement étrangère est une plante adventice (lat. adventicium, supplémentaire). On distingue les adventices réellement étrangères (exotiques), spontanées dans des régions éloignées (érigéron du Canada),...

  • AFGHANISTAN

    • Écrit par Daniel BALLAND, Gilles DORRONSORO, Universalis, Mir Mohammad Sediq FARHANG, Pierre GENTELLE, Sayed Qassem RESHTIA, Olivier ROY, Francine TISSOT
    • 37 316 mots
    • 19 médias
    L'économie de l'Afghanistan est encore fondamentalement agricole : c'est le seul pays de la région où l'agriculture emploie plus de la moitié de la population active et contribue pour plus de 50 % à la formation du PNB. Rien pourtant de figé dans cette situation : l'agriculture afghane est brusquement...
  • AFRIQUE (Histoire) - Préhistoire

    • Écrit par Augustin HOLL
    • 6 326 mots
    • 3 médias
    La troisième option s'articule davantage autour des pratiques agricoles, aussi bien céréaliculture qu'horticulture, dans les sous-zones équatoriales et tropicales. La céréaliculture comporte deux volets : l'un septentrional avec la culture du blé, de l'avoine et d'autres...
  • Afficher les 205 références

Voir aussi