Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

TYPOGRAPHIE

Du romain du Roi aux Didot

Au xviie siècle, pour suppléer à la disparition dans le royaume des meilleurs types issus de l'atelier d'Estienne, l'Imprimerie royale créée par Richelieu réquisitionne le « romain de l'Université », caractère originellement conçu par le graveur Jean Jannon (1580-1658) pour l'Académie calviniste de Sedan, puis met en œuvre un caractère propre au règne de Louis XIV, le « romain du Roi ». Pour la réalisation de ce dernier, le graveur de poinçon Philippe Grandjean (1666-1714) s'inspire des modèles de dessin de lettres établis par un groupe de lettrés et de scientifiques, dit commission Jaugeon, dépendant de l'Académie des sciences. Le romain du Roi, destiné exclusivement à l'Imprimerie royale, incarne l'absolutisme, alors que les types conçus en Angleterre par William Caslon (1692-1766) et John Baskerville (1706-1775) sont emblématiques du renouveau politique auquel les élites européennes aspirent. Le Baskerville, notamment, est largement employé dans les textes en français dénonçant l'arbitraire monarchique, dont l'édition des œuvres de Voltaire par Beaumarchais.

Au xviiie siècle, les principes de clarté et de logique impulsés par les Lumières, l'établissement d'un savoir encyclopédique et normatif s'avèrent propices à la rationalisation de la discipline. Pierre-Simon Fournier le Jeune propose un système de mesure fondé sur une unité typographique, que les Didot perfectionneront. Il grave également un romain dont la nouveauté réside dans sa déclinaison homogène dans tous les corps et largeurs possibles, première typographie complète destinée au livre comme aux « travaux de ville » dont la demande ne cesse alors de croître.

Fils de l'imprimeur et éditeur François Didot (vers 1689-1757), François-Ambroise (1730-1804) et Pierre-François (1732-1795) inventent la « presse à un coup » en 1777, plus précise et permettant l'emploi de caractères plus fins. Ils organisent une fonderie typographique et conçoivent un premier « romain moderne », rigoureux et dépouillé, aux forts contrastes entre les pleins et les déliés, qui connaît un large succès et influence Giambattista Bodoni (1740-1813) à Parme, ou Justus Walbaum (1768-1839) à Weimar.

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : historien du graphisme et de la typographie, diplômé en histoire de l'École des hautes études en sciences sociales, Paris

Classification

Pour citer cet article

Michel WLASSIKOFF. TYPOGRAPHIE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Matrice de l'appareil typographique Garamond - crédits : Connaissances des Arts/ St-Genès/ AKG-images

Matrice de l'appareil typographique Garamond

Autres références

  • ABSTRAITS DE HANOVRE

    • Écrit par Isabelle EWIG
    • 2 598 mots
    • 1 média
    ...– cartes de membre, cartons d'invitation, papier à lettres, enveloppes, etc. –, tout en mettant leur savoir-faire au service de diverses entreprises. Schwitters invita les deux membres les plus actifs dans ce domaine, Domela et Vordemberge-Gildewart, à prendre part à la fondation, en 1928, du Ring neuer...
  • AFFICHE

    • Écrit par Michel WLASSIKOFF
    • 6 817 mots
    • 12 médias
    ...Le nombre d'ateliers, à Paris, passe de trente-six à la veille de la Révolution à deux cents en 1790, qui réalisent périodiques, pamphlets et affiches. Ces dernières, composées pour la plupart en alphabets Baskerville ou Didot, dont la rigueur s'accorde aux principes du temps, véhiculent devises et slogans,...
  • AICHER OTL (1922-1991)

    • Écrit par Axelle FARIAT
    • 649 mots

    Otl Aicher est une figure emblématique du design allemand qui naît au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, notamment dans le cadre de l’école d’Ulm.

    Né en 1922 à Ulm, Otto Aicher dit Otl, rejette la doctrine nazie. Il se lie avec la famille Scholl (Hans et Sophie Scholl vont fonder le groupe...

  • APELOIG PHILIPPE (1962- )

    • Écrit par Michel WLASSIKOFF
    • 1 040 mots

    Philippe Apeloig, né en 1962 à Paris, est un des auteurs les plus remarquables dans le domaine du graphisme en France. C'est également un typographe de premier plan : ses caractères qui contribuent à singulariser ses créations – affiches ou identités visuelles – sont désormais diffusés à l’échelle...

  • Afficher les 33 références

Voir aussi