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LIBÉRALISME

Le libéralisme est une doctrine économique : celle qui se donne le marché pour seul fondement, avec pour alliées naturelles l'initiative privée et la libre concurrence. Le libéralisme est aussi une philosophie politique : sa vision du monde lui commande d'aménager et de garantir la liberté de ceux qui vivent dans la cité. Enfin, le libéralisme est une disposition d'esprit : plus qu'une doctrine relative à l'agencement institutionnel de la société politique ou de la société économique, moins qu'une véritable éthique permettant à chacun de s'accommoder de sa condition, il constitue une interprétation simultanée de l'homme et de la société qui fait de la liberté le point d'aboutissement d'une création continue, et non une espèce d'état de nature qu'il conviendrait de préserver intact.

Doctrine économique et philosophie politique, vision du monde social et politique en même temps que justification a posteriori d'un ordre existant : entendu dans son sens courant et non dans ce que la raison est en droit d'y trouver, le libéralisme est à la fois l'une et l'autre, ce qui ajoute à la difficulté d'en donner une définition dépourvue de toute ambiguïté. Difficulté réelle, car non seulement les sources du libéralisme sont multiples, mais elles n'appartiennent pas toutes, tant s'en faut, à la même époque. En outre, les mots du libéralisme se sont universalisés et chacun en fait un usage pour ainsi dire tactique. Bien plus, le libéralisme exprime pour les uns une revendication proprement politique, tandis que d'autres estiment au contraire que l'économie de marché est la condition nécessaire du libéralisme politique. Ironie de l'histoire enfin : la référence au libéralisme est d'autant moins ostentatoire que celui-ci s'incarne davantage par la force apparente des choses et des idées.

Les origines du libéralisme

Le libéralisme n'est pas la réalisation historique d'un schéma conçu préalablement par l'esprit. Il n'est pas davantage cet ensemble de principes seuls capables de justifier a posteriori un ordre social ou politique résultant de l'action désordonnée des hommes. Ni guide exclusif pour l'action, ni idéologie légitimatrice d'un ordre existant, le libéralisme exprime seulement une interprétation de l'univers social, interprétation qui s'élabore et se modifie progressivement sous la double épreuve des faits et des idées. Les faits, ce sont les événements d'une histoire que les hommes font sans le savoir, ou en le sachant. Les idées, ce sont les éléments de cet ordre juste auquel les hommes aspirent et au regard duquel ils considèrent immanquablement leur présent et leur passé.

Ainsi, le libéralisme n'étant pas unique ou uniforme, chacune de ses versions trouve son fondement originel dans un événement historique ou chez un penseur qui n'appartient qu'à elle. Là réside sans doute l'ultime singularité de ce que l'on nomme libéralisme : dans son incapacité, en tant que schéma d'intelligibilité aussi bien que comme image de la société « bonne » à se donner un élément fondateur unique, que celui-ci soit un événement historique ou la pensée d'un philosophe prophète.

Si l'on consent néanmoins, par pure convention, à donner un acte de naissance au libéralisme, celui-ci n'est autre que la Déclaration des droits de l'homme de 1789. La Révolution française consacre en même temps qu'elle achève le siècle des Lumières. C'est sous la forme du principe de la « souveraineté nationale » que la démocratie est instaurée en France. La souveraineté n'appartient pas au roi ; elle n'est pas divisée entre les différents ordres ; elle réside dans la volonté générale de la Nation : « Le principe[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-II-Panthéon-Assas

Classification

Pour citer cet article

Francis BALLE. LIBÉRALISME [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

John Stuart Mill - crédits : London Stereoscopic Company/ Hulton Archive/ Getty Images

John Stuart Mill

Autres références

  • AFRIQUE DU SUD RÉPUBLIQUE D' ou AFRIQUE DU SUD

    • Écrit par Ivan CROUZEL, Dominique DARBON, Benoît DUPIN, Universalis, Philippe GERVAIS-LAMBONY, Philippe-Joseph SALAZAR, Jean SÉVRY, Ernst VAN HEERDEN
    • 29 784 mots
    • 28 médias
    ...Les premières orientations économiques du gouvernement d'unité nationale et de ses successeurs confirmèrent une volonté d'ouverture internationale, de gestion libérale de l'économie et d'inscription dans une économie de marché (affiliation au GATT en 1993, abandon des nationalisations, indépendance...
  • ALGÉRIE

    • Écrit par Charles-Robert AGERON, Universalis, Sid-Ahmed SOUIAH, Benjamin STORA, Pierre VERMEREN
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    • 25 médias
    ...autre programme dit de concessions agricoles qui, tout en encourageant l'entrepreneuriat agricole, favorise l'ouverture du secteur au capital étranger. L'État s'oriente vers une politique libérale même si, dans certains cas, les bénéficiaires étaient des chômeurs recrutés pour mettre en valeur les terres....
  • ALLEMAGNE (Histoire) - Allemagne moderne et contemporaine

    • Écrit par Michel EUDE, Alfred GROSSER
    • 26 883 mots
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    ...davantage ceux que l'on qualifie, dès cette époque, de « libéraux » et de « nationaux ». N'y voyons pas deux écoles, deux directions de pensée distinctes. Libéraux, ils s'inspirent des exemples de la France et de l'Angleterre pour réclamer des constitutions comportant des assemblées représentatives élues...
  • ARON RAYMOND (1905-1983)

    • Écrit par Bernard GUILLEMAIN
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    Le problème consiste à saisir dans quelle mesure la multiplicité référentielle dérive du libéralisme affirmé par Raymond Aron ou lui sert de fondement. Dans un article intéressant, Alain Bloom écrit : « Le libéralisme d'Aron était celui de Locke, Montesquieu, John Stuart Mill et, dans...
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