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JUSTINIEN Ier (482-565)

L'empire assailli et défendu

Ayant les mains libres du côté de la Perse, Justinien commença méthodiquement par reprendre l'Afrique aux Vandales, dont les flottes auraient pu compromettre la sécurité de ses communications maritimes (533-534). Puis, sous prétexte de venger l'assassinat de la régente Amalasonthe (535), il s'attaqua au royaume ostrogoth d'Italie. En 540, Bélisaire ramenait le roi ostrogoth Vitigès prisonnier à Constantinople.

L'année 540 marque le tournant du règne. Alors que Justinien semblait avoir réussi dans son entreprise, tout fut remis en question par l'offensive du roi de Perse Chosroès Ier, contre la Syrie et le Caucase. Dans les années suivantes, il fallut faire face à la fois aux Perses, aux Goths qui, regroupés par Totila, chassaient les Grecs de presque toute l'Italie, aux Berbères soulevés en Afrique, sans compter les Barbares, Huns, Slaves et Avars, qui franchissaient périodiquement la frontière trop dégarnie du Danube et ravageaient l'Illyricum. Justinien avait bien établi, pour les contenir, un gigantesque ensemble de fortifications échelonnées en profondeur, mais l'ampleur même du système le rendait inefficace, faute de ressources suffisantes pour entretenir les places fortes et les garnir de troupes. L'Italie fut reconquise par Narsès, au prix de la ruine complète de la Péninsule (553-554), et l'Occident récupéré : les Grecs réussirent même à s'établir dans le sud de l'Espagne (554). La paix avec les Perses, qui laissait à Byzance une importante zone d'influence en Arménie et dans le Caucase, ne fut signée qu'en 562.

Ces luttes difficiles, qui provoquèrent une crise financière, coïncident avec une crise religieuse causée par les efforts de Justinien pour rallier les monophysites à l'Église officielle, en faisant condamner, sous couleur d'origénisme, la mémoire de trois théologiens qu'ils détestaient particulièrement : Théodore de Mopsueste, Théodoret et Ibas d'Édesse. Ce fut l'affaire des Trois Chapitres, où l'empereur se heurta à la résistance inattendue du pape Vigile. Les décrets du Ve  Concile œcuménique (553), très mal accueillis en Occident, contribuèrent à aggraver les griefs de l'Église romaine contre Byzance, sans pour cela provoquer un rapprochement avec les monophysites, plus que jamais obstinés dans leur séparatisme que, un demi-siècle plus tard, l'invasion perse allait rendre définitif.

Les dernières années, après la mort de Théodora (548), furent difficiles. Les guerres, qui n'avaient pratiquement pas cessé de 527 à 555, et les grandes constructions avaient épuisé les finances ; les signes avant-coureurs de la troisième vague des grandes invasions (Lombards, Slaves, Avars), qui, coïncidant avec l'expansion sassanide, allait emporter en majeure partie l'œuvre de Justinien, étaient si visibles pour les contemporains que certains annonçaient la fin du monde imminente ; épidémies et tremblements de terre paraissent d'ailleurs avoir particulièrement abondé à cette époque. Cependant, il ne faudrait pas trop noircir le tableau et présenter le marasme comme universel dans l'Empire.

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Pour citer cet article

José GROSDIDIER DE MATONS. JUSTINIEN Ier (482-565) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

500 à 600. Reconquêtes - crédits : Encyclopædia Universalis France

500 à 600. Reconquêtes

Autres références

  • JUSTINIEN Ier (482-565), en bref

    • Écrit par Vincent GOURDON
    • 214 mots
    • 1 média

    Succédant en 527 à son oncle Justin Ier un demi-siècle après la disparition de l'Empire d'Occident (476), Justinien, aidé de son épouse Théodora, est le dernier empereur byzantin à avoir réellement caressé l'espoir d'une reconstitution de l'unité politique impériale romaine autour...

  • ANTHÉMIOS DE TRALLES (2e moitié Ve s.-env. 534)

    • Écrit par Jean-Pierre SODINI
    • 794 mots
    • 1 média

    Architecte lydien né à Tralles dans la seconde moitié du ve siècle, Anthémios appartenait à une famille extrêmement cultivée. L'historien Agathias nous apprend que son père était un médecin réputé et que ses frères furent respectivement maître de rhétorique (Métrodore, qui s'installa à...

  • BÉLISAIRE (500 env.-565)

    • Écrit par Joël SCHMIDT
    • 733 mots
    • 1 média

    À la veille du vie siècle, l'Empire romain morcelé par les royaumes barbares semble appartenir à une histoire définitivement révolue. Cependant, à Constantinople, l'empereur Justinien Ier cherche à retrouver l'unité de l'ancienne puissance romaine et à reconquérir à l'Occident...

  • BYZANCE - L'Empire byzantin

    • Écrit par Universalis, José GROSDIDIER DE MATONS
    • 13 315 mots
    • 17 médias
    ...Théodose II, en 438, fut promulgué aussi au nom de Valentinien III), explique l'énergie avec laquelle les empereurs orientaux de cette période, Justinien le tout premier, s'accrochèrent au passé, rêvèrent de reconstituer l'Empire universel. Ils ne portaient pas encore le titre grec de ...
  • CÉSAROPAPISME

    • Écrit par Jean GOUILLARD, Michel MESLIN
    • 5 400 mots
    • 2 médias
    Le règne de Justinien (527-565) est animé par la même volonté unitaire : il veut non seulement reconstituer l'unité politique du monde romain en Orient et en Occident, mais imposer l'unité de foi et intégrer l'Église à cet État unifié. Faire en un mot coïncider à nouveau les frontières de la Cité de...
  • Afficher les 17 références

Voir aussi