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FORTIFICATIONS

Le mot « fortification » apparaît au xive siècle. C'est un latinisme, emprunté au bas latin fortificare, fortificatio, dont la racine est fortis et qui signifie, d'une part, action de fortifier et, de l'autre, ouvrage défensif.

Il n'y a, pour une cité, de meilleurs remparts que la poitrine de ses défenseurs, a affirmé Lycurgue (ive siècle av. J.-C.). Pourtant, avant et après Lycurgue, et même sur son ordre, on a construit des remparts. En effet, si la fortification est l'ensemble des travaux qui permettent d'accroître les possibilités de combat et de résistance des défenseurs, puisque la guerre apparaît comme un phénomène régulier, sinon permanent, le besoin de dissuader un éventuel agresseur ou de se protéger contre ses attaques s'est toujours fait sentir. La fortification est, pour un groupe humain, ce qu'est le bouclier ou la cuirasse pour un individu.

À l'inverse de la fortification de campagne – organisation défensive du terrain qui naît au rythme des opérations –, la fortification permanente construite en temps de paix est, par définition, conçue pour durer. Une rapide chronologie prouve que si elle a pu, pendant des siècles, satisfaire à ce besoin de longévité sans connaître de mutations brutales, imposées par l'évolution de l'art de la guerre et de l'armement, elle s'adapte très difficilement – toujours par définition – à l'accélération du progrès technique. Nécessitant de longs et coûteux travaux, elle a été, depuis cent ans, souvent déclassée techniquement dès son achèvement ou n'a pas répondu aux conceptions tactiques et stratégiques nées entre-temps. Le rapport coût-efficacité apparaît alors si négatif que la question est posée : la fortification appartient-elle au passé ? ou a-t-elle seulement changé de nature ?

Fortification et technique

Les murailles (de l'Antiquité au XVe siècle)

L'homme a toujours éprouvé le besoin de dresser un obstacle entre lui et une quelconque menace : les sociétés primitives se réfugient derrière un fossé, des abattis, des pieux fichés en terre. L'obstacle est alors passif ; pour être efficace, il doit être renforcé par une défense active, mais protégée. Fortifier, c'est combiner l'obstacle et le couvert que réclament les défenseurs.

Porte des Lions, Mycènes - crédits : A. Vergani/ De Agostini/ Getty Images

Porte des Lions, Mycènes

Pendant des siècles, l'obstacle est essentiellement une muraille dont la hauteur doit décourager l'escalade et s'opposer aux projectiles des armes de jet (arcs, frondes, puis balistes). Précédée ou non d'un fossé, cette muraille est rapidement complétée par un parapet d'où la défense doit pouvoir être menée en sécurité. Elle peut être construite en appareil cyclopéen, à l'aide d'énormes blocs entassés : les Achéens bâtissent à Mycènes des murailles de six mètres d'épaisseur ; les Incas construisent, dans le nid d'aigle de Saxahuaman, une forteresse à trois remparts ordonnés en hauteur, constitués de blocs géants de granit s'adaptant étroitement les uns aux autres sans mortier. Là où la pierre est rare, comme en Mésopotamie ou en Égypte, les murs sont en brique crue (le soubassement seul étant en brique cuite ou en pierre) ou en terre pilonnée comprise entre deux revêtements de briques cuites, cimentées, selon Hérodote, avec du bitume.

Angle mort - crédits : Encyclopædia Universalis France

Angle mort

Le parapet qui couronne le mur est crénelé afin de permettre aux défenseurs de tirer sur les assaillants sans s'exposer eux-mêmes. Mais, si les attaquants parviennent au pied du rempart, ils ne peuvent être atteints que si le défenseur se penche en dehors du créneau et devient donc vulnérable. Ce problème du flanquement et de l'élimination de l'angle mort a et du secteur privé de projectiles b fut résolu soit par la construction de tours flanquantes, soit par le remplacement, dans le tracé de l'enceinte, des fronts rectilignes[...]

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Écrit par

  • : docteur habilité à la recherche, diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris, ancien chef du service historique de l'Armée de terre

Classification

Pour citer cet article

Jean DELMAS. FORTIFICATIONS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Porte des Lions, Mycènes - crédits : A. Vergani/ De Agostini/ Getty Images

Porte des Lions, Mycènes

Angle mort - crédits : Encyclopædia Universalis France

Angle mort

Tracé bastionné - crédits : Encyclopædia Universalis France

Tracé bastionné

Autres références

  • ACHÈVEMENT DE LA GRANDE MURAILLE DE CHINE

    • Écrit par Alain THOTE
    • 247 mots
    • 1 média

    La Grande Muraille fut achevée sous les Ming par un dernier tronçon construit au nord de Lanzhou (Gansu) en 1598. C'était l'aboutissement d'une entreprise ayant connu de très longues périodes d'interruption, mais commencée dès l'époque des Printemps et des Automnes (vers — 500) par les Chinois pour...

  • ACROPOLE

    • Écrit par Martine Hélène FOURMONT
    • 497 mots

    Dans le monde grec, l'acropole (akropolis, « ville haute »), groupement de bâtiments installés sur une éminence, n'apparaît pratiquement qu'à l'époque mycénienne — la Crète ne semble pas avoir systématiquement isolé ses villes sur des hauteurs. On associe généralement l'apparition des acropoles...

  • ALBANIE, archéologie

    • Écrit par Olivier PICARD
    • 2 304 mots

    L'archéologie n'était pas une discipline neutre dans les anciens pays communistes de l'Est : aussi bien la volonté d'écrire une histoire officielle, à la fois nationale et dans le vent de la philosophie du régime, que celle de remodeler le paysage en éliminant les monuments jugés obscurantistes au...

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    Premier site de l'histoire de la nation française, Alésia a été rendu célèbre par le fameux passage de la Guerre des Gaules (VII, 68-89) dans lequel César met en scène la défaite de Vercingétorix en 52 avant J.-C. Devenu « lieu de mémoire » et symbole national de la résistance à...

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