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JAZZ

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La création en jazz

Le jazz est né de la société afro-américaine ; mais comme il témoigne d'une évolution formelle propre et a suscité des créateurs originaux, il est un art plus qu'un folklore, un art surgi d'un folklore. Celui-ci – spiritual, blues, gospel, rhythm and blues – a poursuivi parallèlement son propre développement et continue d'envelopper le jazz. Des échanges constants vont de l'un à l'autre. Mais il n'y a de jazz qu'à partir d'une intention créatrice, et l'évolution du jazz est, au premier chef, celle du langage jazziste.

Créer

Jelly Roll Morton - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Jelly Roll Morton

Faire du jazz, c'est, au niveau le plus simple, insuffler le swing à une matière musicale quelconque. Ainsi, Jelly Roll Morton, un des premiers jazzmen, déclara : « Le jazz est un style, non une composition. N'importe quelle musique peut être interprétée en jazz, du moment qu'on sait s'y prendre. Ce n'est pas ce que vous jouez qui compte, mais la façon dont vous le jouez. » Interpréter avec swing, c'est ce que l'on demande, dans un grand orchestre, aux musiciens de pupitre qui suivent une partition. Mais créer en jazz, c'est improviser avec swing à partir d'un thème donné. Ce thème repose, en général, sur une structure harmonique simple. Il est, fort souvent, constitué par le refrain («  chorus ») d'un air de la variété américaine, d'où l'expression « prendre un chorus », qui veut dire : improviser sur les harmonies d'un refrain. Les solos improvisés sont constitués de un, deux, cinq, dix chorus successivement enchaînés.

L'improvisation ressortit donc à la variation. Cette variation, comme il en va parfois chez Armstrong, peut se limiter au déplacement de quelques accents du thème. Dans les années 1930, les jazzmen –  Coleman Hawkins par exemple – paraphrasent la mélodie initiale en exploitant les virtualités de son sol harmonique. À partir de Lester Young, de Charlie Parker et du « bop », les musiciens se sont efforcés de réinventer un discours mélodique personnel en partant des accords de base d'un thème, de fait assez vite oublié. Quant au free jazz, il s'efforce à une improvisation totale, sans contraintes structurelles, et substitue à l'esprit de variation la quête d'une absolue spontanéité.

Schémas et formes

La moitié, au moins, du répertoire des jazzmen repose sur la grille harmonique du blues de douze mesures, abordé sur les tempos. Viennent ensuite les thèmes fondés sur la structure dite « anatole », soit trente-deux mesures réparties en séquences de huit et ainsi disposées : AABA. C'est le schéma usuel des refrains de variétés aux États-Unis (I Got Rhythm). Les jazzmen utilisent également toutes sortes de dérivés – huit, seize mesures, etc. – qui ont en commun d'être toujours des multiples de quatre. Contre cette routine de la « carrure », certains musiciens se sont élevés en composant des thèmes d'un nombre impair de mesures.

Miles Davis - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Miles Davis

Bien souvent, l'esprit de la mélodie initiale est abandonné : celle-ci n'est plus qu'un prétexte et ne sert qu'à poser une grille harmonique. Les jazzmen, alors, remplacent, à l'occasion, l'énoncé d'un thème par une succession de riffs – segments, inlassablement repris, de deux ou quatre mesures –, lesquels se plient à toutes les grilles et possèdent une grande valeur dynamique. De même, certains jazzmen – à l'instar de Miles Davis ou de John Coltrane –, qui cultivent un jazz extatique ou incantatoire, improvisent-ils fréquemment moins sur un thème que sur une brève séquence de trois ou quatre accords, ou sur des gammes modales.

Le jazz de moyenne ou grande formation, qui a recours aux partitions écrites, emploie le même matériel initial, mais en l'ornant de passages ouvragés, introductions, interludes, codas. Les partitions,[...]

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Pour citer cet article

Philippe CARLES, Jean-Louis CHAUTEMPS, Encyclopædia Universalis, Michel-Claude JALARD et Eugène LLEDO. JAZZ [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Médias

Louis Armstrong - crédits : Bettmann/ Getty Images

Louis Armstrong

Stan Getz - crédits : Aubrey Hart/ Hulton Archive/ Getty Images

Stan Getz

Jelly Roll Morton - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Jelly Roll Morton

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