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PÉTROLE Économie pétrolière

Le deuxième choc (1979-1980) et l'émergence du marché

Après le premier choc, la continuité n'est cependant qu'apparente, car la construction de nombreux équipements nouveaux a été lancée et leur mise en service n'attend que les cinq ou six années nécessaires à la construction des nouvelles centrales électriques, à charbon ou nucléaires, destinées à ne plus utiliser de produits pétroliers. Bref, la réaction économique au premier choc ne se manifeste que de façon diffuse en raison des délais attachés aux investissements, mais elle est considérable. Parallèlement, le premier choc provoque le réveil du nationalisme arabe, déjà préparé par l'accession de Nasser au pouvoir, et celui de l'Islam, notamment en Iran, en Arabie Saoudite et au Koweït. Au sein de chacun de ces trois pays, la crise couve car les traditionalistes, proches des Frères musulmans, récusent l'enrichissement trop brutal, la corruption des mœurs et le passage à des sociétés modernes. Elle éclate en 1978, en Iran, avec la grève des travailleurs du pétrole, et atteint son paroxysme au cours de l'hiver de 1978-1979, attisée par l'aide qu'apportent les gouvernements américain et britannique à la révolution islamique qu'ils croyaient républicaine et libérale

Corrélation entre les importations nettes americaines et les exportations nettes saoudiennes (millions de barils par jour)
 - crédits : Encyclopædia Universalis France

Corrélation entre les importations nettes americaines et les exportations nettes saoudiennes (millions de barils par jour)

Le surcroît de demande induit par le stockage de précaution auquel procèdent les compagnies pétrolières se trouve alors confronté à une baisse volontaire de 1 million de barils par jour de l'offre saoudienne à partir du 1er avril 1979, à la suite de la signature, quelques jours plus tôt, du traité de paix égypto-israélien, à Camp David. Alors même que, selon l'ordre du marché, la fin de l'hiver et l'arrivée de nouveaux équipements destinés à se passer du fioul lourd, en réduisant la demande, auraient dû détendre le marché, le choc éclate : les prix explosent. Ils exploseront à nouveau l'année suivante, en septembre 1980, avec la baisse des productions quand l'Irak attaque l'Iran afin pour renégocier le traité d'Alger de 1975, qui avait fait passer au milieu du talweg du Chatt al-Arab la frontière entre les deux pays, auparavant située sur la rive iranienne.

À la différence du premier choc où les circuits du pétrole n'avaient pas été touchés, la dislocation des réseaux logistiques pétroliers traditionnels rend cette fois nécessaire une ré-allocation complète de l'offre de brut sur les différents marchés pour trois raisons : en amont, l'Iran puis l'Irak n’exportent presque plus rien ; en aval, on assiste à un changement rapide des structures de consommation en raison de la mise en place des nouveaux investissements propres aux politiques nationales retenues par chaque pays ; enfin, entre l’amont et l’aval, l'entrée en service des raffineries des pays en développement va créer de nouvelles sources de produits pétroliers et modifier les flux commerciaux préexistants.

La création des marchés spot et autres marchés à terme pour les divers pétroles bruts et produits pétroliers est la réponse à cette dislocation, phénomène accéléré par la fin des contrôles qu'avaient institués l'administration Eisenhower en 1959 et poursuivis les administrations américaines ultérieures, y compris la fin du contrôle des prix du pétrole domestique. Pétrole et produits pétroliers vont désormais s'échanger au coup par coup, selon les fluctuations des cours et les anticipations des opérateurs. Cette émergence du marché spot, facilitée et encouragée par la libéralisation financière concomitante, est d'ailleurs plutôt une recréation. Le New York Mercantile Exchange (Nymex) du début des années 1980 ressuscite le marché qui existait cent ans auparavant, celui-là même qu'avait étouffé Rockefeller en créant le monopole de la Standard Oil. C'est donc avant tout la nécessité[...]

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Pour citer cet article

Jean-Marie BOURDAIRE. PÉTROLE - Économie pétrolière [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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Effort d’aide publique au développement (pays de l’O.C.D.E.)  
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Effort d’aide publique au développement (pays de l’O.C.D.E.)  

Corrélation entre les importations nettes americaines et les exportations nettes saoudiennes (millions de barils par jour)
 - crédits : Encyclopædia Universalis France

Corrélation entre les importations nettes americaines et les exportations nettes saoudiennes (millions de barils par jour)

Production mondiale de pétrole (millions de barils par jour)
 - crédits : Encyclopædia Universalis France

Production mondiale de pétrole (millions de barils par jour)

Autres références

  • ALASKA

    • Écrit par Claire ALIX, Yvon CSONKA
    • 6 048 mots
    • 10 médias
    ...de croissance explosive ont succédé des temps de stagnation et de reflux. C'est au commerce des fourrures, aux ruées vers l'or, aux dépenses militaires, et enfin à l'exploitation du pétrole que l'on doit ces expansions économiques et démographiques. De 1988 à 2006, l'économie s'est stabilisée et a progressé...
  • ALCANES

    • Écrit par Jacques METZGER
    • 3 614 mots
    • 11 médias
    Les pétroles sont des mélanges d'un grand nombre d'hydrocarbures, où les alcanes, notamment linéaires, prédominent, et de molécules fonctionnelles en petit nombre. Soumis aux opérations de raffinage, ils sont séparés par distillation fractionnée en coupes contenant des mélanges dont...
  • ALGÉRIE

    • Écrit par Charles-Robert AGERON, Universalis, Sid-Ahmed SOUIAH, Benjamin STORA, Pierre VERMEREN
    • 41 835 mots
    • 25 médias
    Mais les principales richesses du sous-sol algérien sont sans conteste ses gisements de pétrole et de gaz découverts dans les années 1950 dans le Sahara.
  • AMOCO CADIZ MARÉE NOIRE DE L' (16 mars 1978)

    • Écrit par Yves GAUTIER
    • 469 mots

    Le soir du 16 mars 1978, le supertanker Amoco Cadiz s'échoue face au petit port breton de Portsall (Finistère-Nord), libérant, en quinze jours, 223 000 tonnes de pétrole léger et 4 000 tonnes de fioul lourd. Les conséquences en sont lourdes : 300 kilomètres de côtes polluées, entre 19 000...

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