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PÉTRARQUE (1304-1374)

Père de la poésie moderne et de la culture humaniste, auteur en langue vulgaire de cet immortel Canzoniere(Rerum vulgarium fragmenta), qui a suscité des foules d'imitateurs en Italie et dans toute l'Europe et qui a marqué la poésie amoureuse en Occident jusqu'au romantisme et au-delà, et d'une œuvre en latin, impressionnante par sa masse et qui, de son temps, lui valut la couronne de laurier et la gloire, Pétrarque se présente comme une sorte de Janus regardant à la fois vers le passé et vers l'avenir, l'Antiquité et la chrétienté, la frivolité et le recueillement, le lyrisme et l'érudition, la turbulence et le repos, l'intérieur et l'extérieur.

Avide des biens et des plaisirs de ce monde, follement ambitieux, actif, entouré d'une légion d'amis, de disciples, d'adulateurs, flatté et sollicité par les puissants – princes, papes et rois –, tenté et très souvent séduit par la politique – il accepta d'innombrables missions –, il est aussi ce méditatif épris de la solitude dans laquelle il s'est enfermé pendant longtemps et qu'il a élevée au rang d'un mythe. Voyageur infatigable, curieux des mœurs et des choses, amant intrépide de la nature et en même temps érudit, archéologue, philologue, lecteur subtil et passionné des auteurs latins, promoteur de l'étude du grec, même lorsqu'il est tourné vers les Anciens, il est plongé dans l'actualité : conformément à son double rôle de précurseur et de médiateur, il cherche moins, dans les œuvres du passé qu'il admire, des modèles à copier qu'un moyen, en renouant avec les traditions, en retournant aux origines, d'aller de l'avant, de créer ce monde moderne où la morale et la philosophie de l'Antiquité et la foi chrétienne se fondraient, réconciliées.

Les années de jeunesse et la formation

Pétrarque - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Pétrarque

François Pétrarque est né à Arezzo le 20 juillet 1304, du notaire Ser Pietro (Petracco) di Ser Parenzo, originaire d'Incisa dans le Valdarno, et d'Eletta Canigiani. Ser Pietro avait été banni de Florence où il exerçait sa profession, sans doute en raison de démêlés personnels avec Albizzo Franzesi, l'un des chefs de la faction des « Noirs », et non pour des motifs politiques comme son fils le laisse entendre. Pétrarque quitte Arezzo à l'âge de un an et ses parents s'installent à Pise (où Pétrarque enfant a peut-être vu Dante) puis, en 1311, en Avignon, alors siège de la papauté, où son père, grâce à l'amitié du cardinal Niccoló da Prato, espère obtenir une charge lucrative.

Par suite des difficultés de logement, la famille s'établit dans la ville voisine de Carpentras, où le jeune François entreprend l'étude de la grammaire, de la rhétorique et de la dialectique sous la direction d'un modeste maître florentin, Convenevole da Prato, avant de se rendre à Montpellier sur l'ordre de son père pour suivre, pendant quatre ans, des cours de jurisprudence. C'est en 1318 ou 1319 qu'il écrivit les premiers vers latins qui nous restent de lui ; ils furent écrits à l'occasion de la mort de sa mère. De la même époque datent peut-être ses premières lectures et sa découverte des auteurs latins. À l'université de Bologne, où, en compagnie de son frère Gherardo, il poursuit de mauvaise grâce ses études de droit jusqu'en 1326, il consolide son amitié avec Guido Sette, noue avec Giacomo Colonna des liens qui dureront jusqu'à la mort de ce dernier, approfondit l'étude des auteurs de l'Antiquité, élargit ses connaissances de la nouvelle poésie en langue vulgaire.

Revenu en Avignon en 1326 – à la mort du père –, il abandonne définitivement le droit et entre dans les ordres mineurs, décision qui, sans lui imposer de véritables devoirs ecclésiastiques, lui permet d'obtenir bénéfices et canonicats.[...]

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Écrit par

  • : secrétaire général de la Fondazione Giorgio Cini, Venise, professeur à l'université de Padoue
  • : professeur émérite à la faculté des lettres de Rouen

Classification

Pour citer cet article

Vittore BRANCA et Françoise JOUKOVSKY. PÉTRARQUE (1304-1374) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Pétrarque - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Pétrarque

Autres références

  • CANZONIERE, Pétrarque - Fiche de lecture

    • Écrit par Claudette PERRUS
    • 898 mots
    • 1 média

    Un des manuscrits qui contient le Canzoniere de Pétrarque (1304-1374) porte le titre en latin de Rerum vulgarium fragmenta (« fragments en langue vulgaire »). Non que ces 366 sonnets, chansons, sextines et ballades présentent le moindre signe d'inachèvement : Pétrarque désignait par...

  • ANCIENS ET MODERNES

    • Écrit par Milovan STANIC, François TRÉMOLIÈRES
    • 5 024 mots
    • 4 médias
    ...employé de manière dépréciative, pour qualifier l'éphémère et partant le superficiel, la valeur étant dans ce cas associée à la durée, voire à l'éternité. C'est ainsi que Pétrarque (1304-1374), par exemple, appelait Modernes les doctes de son époque, trop imprégnés du latin de la scolastique et...
  • APELLE (IVe s. av. J.-C.)

    • Écrit par Adrien GOETZ
    • 2 450 mots
    • 1 média
    ...ôter la main d'un tableau ». La Bibliothèque nationale à Paris possède une copie manuscrite de ce passage de Pline portant, en marge, les postillae que Pétrarque mettait aux livres de sa bibliothèque. Face à cette phrase, que l'on trouve aussi dans les Lettres de Cicéron et chez Pétrone, il indique...
  • GIOTTO (1266 env.-1337)

    • Écrit par Daniel RUSSO
    • 3 177 mots
    • 6 médias
    ...obligatoirement. À la lecture attentive des documents, nous comprenons que ce genre de réaction n'est pas isolé. Déjà, en 1353, Boccace condamne l'attitude de Pétrarque qui refuse l'invitation officielle de la commune de Florence et accepte de se rendre à la cour des Visconti, à Milan. Un événement considérable...
  • RENAISSANCE

    • Écrit par Eugenio BATTISTI, Jacques CHOMARAT, Jean-Claude MARGOLIN, Jean MEYER
    • 31 095 mots
    • 21 médias
    ...l'Église mais aussi Virgile, Ovide, Cicéron, et on s'inspire d'eux. Pourquoi donc qualifier de néo-latine la littérature qui naît avec Pétrarque, s'épanouit en Italie au xve siècle, brille au xvie siècle dans toute la chrétienté, donne encore de beaux fruits au xviie siècle,...
  • Afficher les 9 références

Voir aussi