PÉTRARQUE
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Vaucluse : solitude et fécondité
De retour en Provence, cherchant à fuir la vie agitée et corrompue d'Avignon toute bruissante des souvenirs de ses années les plus frivoles, il élit domicile à quelques lieues vers l'est, dans la solitude de Vaucluse, aux sources de la Sorgue, lieu qui restera longtemps son refuge sacré, son Hélicon. C'est dans cette retraite qu'en 1340 lui parvient, à la fois de Paris et de Rome, l'invitation à recevoir la couronne de poète qu'il avait sollicitée, certes par ambition, mais aussi pour célébrer finalement, après mille ans d'injurieux oubli, le retour au culte des études littéraires et de la poésie. C'est pourquoi, du reste, il accorde sans hésiter la préférence au Capitole sur la Sorbonne et c'est là que, le 8 avril 1341 (après un examen solennel à Naples où il est reconnu digne de ce suprême honneur par ce roi ami des lettres qu'était Robert d'Anjou), il reçoit des mains du sénateur romain, Orso dell'Anguillara, la couronne de laurier qu'il va déposer en un geste symbolique sur la tombe de saint Pierre.
Ce que l'on a appelé la « crise » de Pétrarque suit de peu cet événement : après une nouvelle période de mondanités et de plaisirs en Avignon (en 1343 naît sa fille naturelle Francesca), il s'engage avec fermeté vers une voie plus recueillie et plus ascétique. Il paraît excessif de parler de conversion ou de crise, alors que tant de vers, parmi les plus anciens, portent la trace de ses angoisses morales et religieuses. Le tourment intérieur qui s'aggrava au cours des années – peut-être en partie à la suite de la décision de son frère, compagnon joyeux de ses anciennes débauches, de se retirer à la chartreuse de Montrieux (en Provence) – se réduit au fond à une lutte entre une foi religieuse sincère et l'impossibilité d'y adapter sa conduite, en refusant les séductions et les honneurs terrestres : situation qu'il analyse lui-même avec une impitoyable lucidité dans le Secretum meum (Mon Secret, 1342-1343) : « Plus d'une fois j'ai songé à secouer le joug ancien, mais il est fiché dans mes os... je [...]
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Écrit par :
- Vittore BRANCA : secrétaire général de la Fondazione Giorgio Cini, Venise, professeur à l'université de Padoue
- Françoise JOUKOVSKY : professeur émérite à la faculté des lettres de Rouen
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Pour citer l’article
Vittore BRANCA, Françoise JOUKOVSKY, « PÉTRARQUE », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 13 avril 2021. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/petrarque/